Octave Uzanne signe de ses initiales (en tant que rédacteur en chef et directeur du Livre), ce petit compte rendu à la sortie de l'édition bibliophilique des Nouveaux contes à Ninon d'Emile Zola illustrés par Edmond Rudaux (Paris, Conquet, 1886, 2 vol. in-8°). Le ton est louangeur, et pour l'illustrateur Rudaux et pour l'auteur Zola (une fois n'est pas coutume).
Bertrand Hugonnard-Roche
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Emile Zola (1840-1902) |
Depuis longtemps il était convenu que ce livre serait un bijou par ses illustrations ; on avait vu une à une, à l'état de préparation, dans la librairie de la rue Drouot, les 30 illustrations dessinées et gravées à l'eau-forte par Ed. Rudaux, et les plus farouches Bêcheurs du clan des "Amis des Livres" étaient d'accord pour reconnaître que Conquet allait mettre au jour une oeuvre exquise.
Il n'y a donc pas eu surprise, mais nous avons revu avec un rare agrément ces en-têtes de page si habillement composés, d'une si gracieuse variété et surtout d'une facture d'eau-forte si artiste. M. Rudaux se grave lui-même, c'est-à-dire qu'il n'aurait pas d'excuses à invoquer si ses compositions n'avaient pas la perfection du rendu et toute la grâce désirable. Aussi n'a-t-on rien à lui reprocher, il a mordu ses cuivres avec amour, il les a pointillés avec tendresse, burinés avec chaleur, mettant partout la lumière et l'harmonie, distribuant sans faillir ses valeurs, tour à tour blond, gris et violent, mais toujours vibrant dans la note juste et voulue.
Soit qu'il traite le plein air ou l'intérieur, le nu ou le costume moderne, M. Rudaux apporte toujours dans son faire sa personnalité très intéressante. Son illustration n'a rien à reprendre à notre avis. C'est de la vignette par excellence.
Zola, pour cette réimpression, a fait un bout de préface sous forme de lettre à l'éditeur. Le brave bourgeois de Médan, on le voit, est flatté de se voir si noblement habillé ; mais il se sent un peu gauche devant tout ce luxe. Il n'est pas, déclare-t-il, un bibliophile. Ce qu'il lui faut, ce sont des livres de travailleur, de vulgaires bouquins d'étude, fatigués par l'usage, las d'être lus, toujours chauds de la passion qu'on a pour eux ; il aime emporter ces vieux amis dans sa poche sans crainte de les abîmer et ne les quitte qu'en lambeaux. - Mais n'est-ce pas là le vrai bibliophile à la façon de Montaigne ? Les amis platoniques des non coupés souriront, laissons-les faire.
Quoi qu'il en soit, que M. Zola nous fasse de bons ouvrages ; les éditeurs à la manière de Conquet se chargeront d'en faire de beaux livres. La preuve en est dans cette jolie édition des Nouveaux contes à Ninon.
O. U. [OCTAVE UZANNE]
Le Livre, Bibliographie moderne, 10 mars 1886
Le Livre, Bibliographie moderne, 10 mars 1886
ici Uzanne dit surtout du bien de l'illustrateur et de l'éditeur, ce qui n'est pas étonnant, puisque ce sont ses chouchous, et reconnaît seulement à Zola le mérite d'avoir permis cette édition...
RépondreSupprimerpar ailleurs, les Nouveaux Contes sont d'une veine assez peu naturaliste. On n'est pas dans les Rougon-Macquart..
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