lundi 29 août 2022

Correspondance inédite. Lettres d'Octave Uzanne à son frère Joseph Uzanne (1907-1910 et divers). Table.

C O R R E S P O N D A N C E    I N E D I T E 

Octave Uzanne à Joseph Uzanne (*)

_____________________

TABLE


Cliquez ci-dessous sur l'année qui vous intéresse


Année 1907

Année 1908

Année 1909

Année 1910

Mélange et Fragments,

Lettres non datées non localisées



(*) Source Fonds Y. Christ (1 J 780), Archives de L'Yonne, Auxerre. L'ensemble des lettres de la Correspondance entre Octave Uzanne et son frère Joseph (lettres d'Octave à Joseph uniquement) a été entièrement relevé par nos soins. Nous avons retranscrit l'ensemble que nous livrerons ici lettre par lettre. L'ensemble formera un corpus de 67 lettres pour l'année 1907, 95 lettres pour l'année 1908, 50 lettres pour l'année 1909, 22 lettres pour l'année 1910, 38 lettres de diverses années et 36 fragments ou lettres entières non datées, soit un ensemble de 308 lettres ou fragments de lettres. Notre projet arrêté dès fin 2012, début 2013, est de publier l'intégralité de cette correspondance avec notes explicatives. Espérons que nous pourrons mener à bien ce projet prochainement. La mise en ligne pour tous ici sera un premier pas permettant de juger au mieux de la relation fraternelle entre Octave et Joseph pendant les années 1907-1910, connaître l'intimité des deux frères ainsi que les pensées les plus intimes d'Octave Uzanne dans sa vie privée et publique. Mise en ligne Bertrand Hugonnard-Roche | www.octaveuzanne.com

Correspondance inédite. Lettres d'Octave Uzanne à son frère Joseph Uzanne. Mélange. Fragments. Lettres non datées. Lettres non situées.

C O R R E S P O N D A N C E    I N E D I T E

Octave Uzanne à Joseph Uzanne

_____________________


[ref. MEL.1][carte postale de Houffalize en Belgique adressée à son frère Joseph] Houffalize – Ce 31 octobre 1913.

 

Bien arrivé, mon chéri, admirablement accueilli ici, heureux de ce voyage un peu long mais en très beau pays des Ardennes. J’ai eu ta postale. Je t’écrirai demain après excursions – t’embrasse bien tendrement. Octave

 

[ref. MEL.2][carte postale de Tours – Guerre européenne 1914-1915 – Départ du 266e d’Infanterie (la halte sur la place de la gare de Tours avant l’embarquement). Tours, mercredi matin – 28 juin 1916.

 

Déjà très ragaillardi par l’air exquis du Val de Loire respiré avec volupté hier sur l’immense pont-de-pierre. Je pars à midi pour Bordeaux et peut-être directement sur Bayonne, si je me sens en train de continuer. Temps un peu gris, ce matin, mais agréable & doux. Merci d’être venu hier à la gare. Je t’envoie des cartes pour la cérémonie de la Sorbonne dimanche 2 juillet prochain. Tu ferais bien d’aller entendre Barthou. En tous cas donne en mains sûres les 2 cartes qu’il ne faut pas perdre.

Bien affectueux souvenirs à Marie, à toi et à Lisette.

Octave

 

[ref. MEL.3][carte postale d’Etratat – les Falaises] Ce 25 mars 27. Etretat. Vendredi. (adressée à Joseph Uzanne au 172 Bd St Germain Paris VIe).

 

Mon bon vieux chéri, ce matin il pleut et il fait frais, mais je n’en souffre pas comme à St Cloud ou à Paris. Je puis sortir sans fatigue et sans gêne ; tout étant à portée et j’ai au logis bon feu et bon gîte et bon compagnonnage.

Si ce temps se saison persiste je reviendrai directement à Paris St Cloud, mardi soir ou mercredi, car le Havre ne m’interesserait pas plus que Rouen ou Dieppe avec des ciels hostiles et humides.

Santé fort bonne – bien affectueuses tendresses.

Octave

[sur le recto de la carte – dans l’angle gauche supérieur de la vue] 10 h du matin – le soleil [mot effacé] éclatant – effet des [mot effacé] je sors dans le printemps [mot effacé] – (taches d’eau à cet endroit sur la carte ayant effacé partiellement le texte).

[ref. MEL.4][carte postale de la station thermale de la Roche Posay (Vienne) – Vue générale (côté Nord)] Ce samedi 23 juin 23. (adressée à Joseph Uzanne au 172 Bd St Germain Paris VIe).

 

Mon vieux chéri,

J’ai eu ce matin ta lettre de samedi – le temps est joli et tiède – c’est ma 18e journée de traitement. Mes habitudes sont prises, mes relations faites ; je poursuis ; tout en douceur, ma vue dans ce décor si à mon gré en tous points et qui m’attirera désormais. Je suis stupéfait de mon appétit, de tout ce que j’absorbe à la table qui est excellente et copieuse et de l’aisance de mes digestions. Il est vrai qu’après la repas de midi je m’étends et sommeille un peu et que, le soir, dédaigneux des flons flons du dancing, casino, cinéma, music hall et salle de jeux, je suis généralement au lit de 9 à 9 ½ pour être éveillé et debout à 6 h du matin. Je suis donc aussi bien que je le puis désirer et ma dernière semaine confirmera, je l’espère, mon état de plénitude reposée. [la carte n’est pas signée].

 

[ref. MEL.5][carte postale de la station thermale de la Roche Posay (Vienne) – Hotel du Parc] Lundi – 22 juin 25. (adressée à Joseph Uzanne au 172 Bd St Germain Paris VIe).

 

Bien reçu ta lettre d’Auxerre. Puisque Lisette reste dans l’Yonne, tu voudras bien lui envoyer la carte postale que tu as du trouver à son adresse chez toi. Ma dernière semaine débute ; elle ira vite à son terme et, lundi prochain 29, je serai en partance vers Bordeaux et Bayonne. Toujours joli temps avec ciel vaguement nuageux ce matin. Je t’envoie mes affectueuses pensées, et compte sur toi pour le Canaletto. T’écrirai demain lettre.

Octave

 

[ref. MEL.6][carte postale de la station thermale de la Roche Posay (Vienne) – Vue artistique, bords de la Creuse] La Roche P – ce 21 juin 21. (adressée à Joseph Uzanne au 172 Bd St Germain Paris Vie – mais sans adresse – a été expédiée sous enveloppe, qui manque).

 

J’ai eu ton mot ce matin. Il a fait hier un temps vaguement hiverneux, mais, depuis mon séjour ici, je n’ai pas vu ce qui s’appelle la pluie ; à peine un crachin normand de 10 à 15 minutes en tout. Aujourd’hui le ciel a de belles éclaircies. Somme toute, ce temps me fut très favorable et je ne me suis jamais autant plu dans une ville d’eau que je le fais ici où je ne cesse d’apprécier mon bien être, ma placide solitude silencieuse. Je suis à mon 16e jour de traitement. Je crois bien que je pousserai jusqu’à 27 jours et que je quitterai ce doux pays le lundi soir 2 juillet pour coucher à Châtellerault ou Poitiers, rester un soir à Bordeaux et m’installer un peu à Bayonne, pour quelques jours du 4 au 8. [la carte n’est pas signée].

 

[ref. MEL.7][carte postale de la station thermale de la Roche Posay (Vienne) – Le Pont suspendu et le Donjon] Ce 16 juin 1923.

 

Mon vieux,

Toujour à mieux,

Comme les sardines d’Amieux.

Le temps est à souhait pour moi, frais, mais doux, sans température lourde, c’est bien ce qu’il me faut pour mon traitement qui en est à son 11e jour, et dont je suis vraiment ravi.

J’ai fait une jolie balade hier dans l’auto des Lancelot (mari & femme), par un temps superbe.

J’ai bon appétit et fait honneur aux repas de l’hôtel qui sont bons. Je dors comme il y a longtemps que je ne le faisais plus d’un bon bloc, ce qui est de bon indice pour l’état vésical. Bref, je n’ai rien à demander de mieux, et je me félicite d’être revenu dans cette station où nul médecin ne m’aurait envoyé, dont j’ai flairé l’excellence et, qui me plait et réussit à souhait.

J’ai bien reçu la bile bovine. Je suis en essai de la Cholésine Camus (2 pilules à chaque repas) on m’en dit merveille pour la constipation. Je verrai.

Affectueuses tendresses pour vous tous.

Octave

 

[ref. MEL.8][carte postale de la station thermale de la Roche Posay (Vienne) – Hostellerie du Prieuré]  Ce lundi 18 juin 1923.

 

Toujours dans la béatitude de ce pays séducteur, en santé très retapée, me sentant plénitude de bien être physique et moral. Quelle détente après mon nervosisme aigu d’il y a quinzaine !

Beaucoup de départs déjà et d’autres arrivées. Casino et jeux ouverts – mais ces flons-flons de cinéma, et les jeux de boule (style petits chevaux) ne m’emballent aucunement. Je jouis pleinement du silence et de la solitude et conserve mon indépendance en ne me liant pas à autrui. Affectueusement. Octave

 

[ref. MEL.9][carte postale de la station thermale de la Roche Posay (Vienne) – Vue générale prise au bord de la Creuse (vaches au bord de la Creuse, village à l’arrière plan)]. Ce mardi 19 juin 1923.

 

J’ai eu ta lettre ce matin, mon chéri. Le temps est fort joli, très tiède, à souhait !

Je vis toujours dans un bien être délicieux. L’air est ici d’une merveilleuse qualité, pour moi comparable aux vertus des eaux qui me sont si salutaires.

Il est probable que je prolongerai mon séjour bien au-delà des 21 jours rituels – sans doute ne quitterai-je guère avant le 2 ou 3 juillet. Je laisse le temps passer et me sens si bien de mon séjour qu’aucun autre, je le crains, ne lui serait ailleurs supérieur ou comparable. Affectueuses tendresses. Octave

 

[ref. MEL.10][enveloppe-lettre Collection Dubonnet] Etretat. Mercredi 3 juillet 29.

 

Mon chéri,

J’espère te téléphoner demain – si tu appelles vers 11 ½, ce ne sera peut être pas Alphonsine mais moi qui répondra mais moi – sinon ce serait le soir.

Je prends aujourd’hui un autobus en service depuis 2 jours (Dieppe maritime Etretat – le Havre par le littoral il doit me conduire à la gare du Havre en 1 h ¼ vers 4 h 45, à temps j’espère pour prendre le rapide de 17 h 15 qui me fera coucher, soit à Rouen soit à Paris – je verrai en route.

Hier l’après midi fut pluvieux de façon indésirante comme disait ce normand d’Aurevilly qui s’y connaissait en crachins du pays – je suis sorti tout de même.

Je rentre en bon état, très reposé, côté cérébral et dépouillé de tout pessimisme de vieillard attardé sur un globe si transformé par les faits.

Bons baisers.

Octave

 

[ref. MEL.11][carte postale de la station thermale de la Roche Posay (Vienne) – La superbe vallée de la Creuse vue du Pont] Ce 13 juin 25.

 

J’ai bien ton mot, mon chéri, et ses annexes – merci. Pour ta venue ici, elle s’effectuera si tu parviens à réaliser ton projet. Je ne t’en parlerai plus, car je ne crois pas que tu puisses en avoir le loisir ce mois-ci et le 1er juillet je roulerai vers d’autres lieux.

D’ailleurs, avec cette chaleur, le voyage est fatigant, surtout quand le temps du séjour à la campagne n’est pas durable et ce serait ton cas. Je t’ai écrit hier = Toujours bien et plus reposé de jour en jour.

Affectueuses tendresses. Amitiés à Lisette.

Octave

 

[ref. MEL.12][carte postale de la station thermale de la Roche Posay (Vienne) – Casino de Posay – Un coin d’eau – Les canots] Dimanche 14 juin 25.

 

Je t’écris, avec la procession et les chants de la fête Dieu, dont le reposoir fleurs est sous ma fenêtre, sur le champ de foire qui eut lieu jeudi dernier.

Je vais toujours bien – le temps s’est agréablement rafraîchi et c’est délicieux – il y eut deux jours un peu âprement solaires – la détente est sensible et imprévue.

Fais tes affaires au ralenti, ne te fatigue pas surtout – si tu peux venir pour la dernière quinzaine de mon séjour (qui va commencer) j’en serai charmé, mais tout ce que tu me dis équivaut à l’impossibilité où tu seras de le faire – il vaut mieux ne pas s’illusionner.

Affectueusement ton Octave

 

[ref. MEL.13][carte postale de la station thermale de la Roche Posay (Vienne) – Casino de Posay – « La Gartempe » (bord de rivière)] Lundi 15 juin 25.

 

Pas eu mot de toi, ce matin. – ce sera peut être pour ce soir. Il fait un temps superbe, radieux, tout azur et délicieusement frais, il faut même se couvrir un peu. Je continue à cheminer sur le chemin du Paradis – c’est, en réalité, une route qui existe ici, mais en fiction, je me sens marcher sur la voie du bien être et après mes misères récentes, j’en jouis de façon indéniable.

Affectueuses tendresses.

Je suppose Lisette à Auxerre maintenant.

Octave

 

[ref. MEL.14][carte postale Montargis – Vieilles tanneries sur le Pinseaux] (adressée à Mme M. Lizette Christ-Million – 5 rue du Grand Balcon (Corniche-Malmoude) Marseille (Boûches du Rhône). Montargis – 20 août 1925.

 

Merci pour le petit mot – ma chère Lisette. J’espère que tu te trouveras à Sanary-Ollioul ou bien au Bruscy (en face) petite traversée en barque. Il y a aussi Tamaris et tous les environs de Toulon si nombreux et pleins des jolis petits coins peu connus.

Bonne chance. Je suis en balade pour quelques jours dans le nivernais. Amitiés bien cordiales.

Octave Uzanne

 

[ref. MEL.15][papier à en-tête du Grand Hôtel de France (Moderne) – Eaux-Bonnes, le (mardi) 14 juillet 1906.

 

Mon bon chéri,

Je souhaite que ce mot te parvienne avant ton départ pour le Crotoy demain mercredi.

Je vais toujours fort bien et je fais mon traitement en conscience, en étudiant ce qu’il y a de bluff, de blague, d’incertain, de nocif même, selon les cas, dans la vertu des eaux les plus actives, comme celles des Eaux Bonnes, qui le sont très. J’ai encore 8 jours à tirer – le mercredi 22 je filerai sur Pau-Bayonne. J’irai peut-être de Bordeaux découvrir la plage de Royan et le samedi matin ou soir (25 courant) (selon la chaleur qu’il fera) je serai à Paris – si la température est accablante, je prendrai à Bordeaux un train de nuit, de préférence malgré ma répugnance à voyager nocturnement. J’ai hâte de terminer mon déménagement et d’être chez moi, dans le calme de St Cloud. La vie des eaux et des montagnes ne fut, ne sera jamais mon affaire. C’est le néant et pour des résultats bien hypothétiques et si souvent contraires ! A voir les choses de près, la sottise des docteurs, leur charlatanerie, leur ignorance m’apparait encore plus fantastique, plus éhontée !

Quand tu parles de Nubar Pacha – ne manques pas de dire : Boghos Nubar Pacha. Nubar, le vieux, le seul, le maître, qui fut un arménien génial, et que j’aimais beaucoup, est mort il y a 10 ans – son fils, c’est Boghos, qu’on le nomme, ou Boghos-Nubar Pacha, mais jamais Nubar tout court.

J’attends de tes nouvelles bientôt et je t’embrasse bien tendrement. Mes amitiés à Mme Million et baisers à Lisette.

Octave Uzanne

 

[ref. MEL.16][papier libre] St Raphael – 12 mars 06.

 

Mon cher Joseph ; Mariani ne partira que jeudi 19 au soir – il ne sera donc de retour que le dimanche 22 – autant de gagné pour toi. Hier, j’ai vu Paoli, escorté à la gare, en partance pour Cannes, auprès de la grande Duchesse Wladimir qui meurt de frousse d’être assassinée et qui a fait détacher le policier à ses côtés, pour organiser sa préparation – il est désolé d’avoir été soustrait à Edouard et à Biarritz – il est toujours éteint, discret, à demi muet. Les Santelli, homme et femme, plus feux follets que jamais et Angelo, escortaient le chef des sbires – les Santelli partent ce soir définitivement, mais je n’irai plus à la gare, toute en courants d’air – Je me fiche de ces niçois profiteurs.

Angelo déjeune aujourd’hui chez les Khune (?) – demain : P.P.C j’irai déjeuner à la villa Andréa où sera le père Lumière pour un jour. Lundi, j’irai sans doute à Nice chez les Cheret, angelo étant engagé – ce qu’il regrette fort – à déjeuner chez les Bouloumnié qui ont invité aussi les Bertnay.

Aucune nouvelle de Rochard, il viendra quand je ne le voudrai pas et je le verrai assez peu si cela continue – mais, tant mieux, car n’ayant guère plus de 6 semaines à demeurer ici, je veux ménager mon indépendance et ma quiétude à tout prix et ce brave Emile c’est l’égoïste larmoyant sur tout le monde, tout en demeurant uniquement intéressé par ses affaires et intérêts. Je vais aller voir Mme de Suzy – le temps est superbe – depuis ton départ – quelques heures de pluie seulement.

Tu as du lire le procès en cours d’assises de Caroit assassin de Benoit Levy et voir comment l’avocat Henry Robert avait roulé le beau père Sauphar – mon Sauphar ! – dans la boue – c’est un plaisir d’avoir lu sa plaidoirie si féroce contre les youpins fabriquant de misère.

Je suis en ce moment tranquille, heureux, je travaille chaque jour, sans tracas, sans réception, sans visites – je voudrais que cela puisse continuer.

Baisers affectueux.

Octave

 

[ref. MEL.17][carte-lettre bordée noir (deuil de sa mère) à l’adresse de la Place de l’Alma] Paris, ce 24 février 1905.

 

Mon cher franginot,

Je reçois ton mot. Il fait aujourd’hui beau et tiède à Paris. Chez moi c’est exquis. Hier la température fut gibouleuse, mais, ce février est plutôt agréable ici, alors qu’il est grinchu, odieux, sur le littoral. Je me souviens du froid que j’essuyai l’an dernier à cette date à St-Raphaël, ce fut mémorable pour mes sens – je n’eus jamais peau si glacée, corps si transi.

Ma santé bonne, bien que je ne me trémousse point à mon gré depuis le retour. Ce soir j’irai diner à Versailles chez Lady Mary.

Je suis désolé de te savoir encore fatigué et souffrant. Je pense que ça ne sera que passager.

Oui la mère Van der Steppen est une excellente femme qui me plait beaucoup. C’est un ancien modèle épousé, mais elle a toutes les qualités de rondeur et d’intelligence innée des braves femmes d’origine simple, si préférables aux mondaines et noblaillottes. Le mari aussi bon gros garçon, d’un talent tertiaire, mais excellent cœur.

Oui, nous règlerons les affaires et ce serait urgent. Je crois que notre chère mère avait omis pour son bon à lot de Panama de demander sa part de liquidation, si bien que je crains que cette valeur ne vaille plus un sol.

Ganquiteau m’a écrit il y a 3 semaines que nous devions toute l’année d’impositions – j’ai mis de côté toutes lettres de Normand et Cie – à ton retour tout sera en ordre.

Je suis encore bien hanté par notre chère maman, le soir en me couchant – ces chagrins sont lents, lents à perdre de leur acuité.

Mes tendresses.

Octave

 

[en haut de la carte – ajouté – on lit : Je t’envoie un journal où tu liras l’article : Inconscience que tu ne dois ignorer.

 

[ref. MEL.18][enveloppe-lettre adressée à son frère] Caen Vendredi 14 mai (1926).

 

Mon chéri,

J’ai eu ton mot ce matin – j’ai été bien tranquille hier (ascension) avec un temps assez beau. J’ai travaillé de 2 à 4 et ai fait une très longue promenade sur les délicieuses rives de l’Orne. Hier soir, et ce matin, le ciel était pur, merveilleux, soleillé. Je t’écris à 10 h il pleut et grêle. Je me décide à ne pas aller à St Aubin sur mer par le petit « Caen à la mer » et je partirai à midi 50 pour être à Vire à 3 h environ. Selon le temps je règlerai mes actes mais j’y serai demain samedi et peut être aussi dimanche – t’écrirai demain.

Je vais bien sauf difficulté sombre à obtenir libération intestinale. Alphonsine qui fut à Paris mercredi y a été indisposée et à du rentrer à St Cloud, - j’espère que ce ne fut pas grave. Téléphone lui au reçu de ce mot, informe toi et écris le moi – si tu étais inquiet, je partirai pour rentrer aussitôt.

Mes tendresses.

Octave

 

[ref. MEL.19][carte postale de Florence (Italie)] Florence – 10 avril 1911.

 

Bon souvenir de Florence où trop de fêtes et trop de monde – Espère à Ravenne plus de quiétude. Cordialités. Octave.

 

[ref. MEL.20][carte postale de Rome (Italie) : Foro Romano] Roma – Domenica – 7 maggio 1911 [Rome, Dimanche 7 mai].

 

J’ai eu ton mot, je vais bien, encore ici pendant deux journées chargées de fêtes et je filerai sur Pérouse mardi – Je m’arrêterai sans doute à Venise les 13 et 14 courant – après Ravenne tu pourras donc m’y écrire poste restante après Ravenne et avant Turin. Le temps est beau, chaud, mais c’est une ville et jamais le ciel des villes n’est vraiment beau – Tendresses. Merci à Lisette de son mot. Octave

 

[ref. MEL.21][carte postale du Traité de Paix, signé à Versailles le 28 juin 1919] Vendredi = ce 1er août (1919 ?).

 

Mon vieux chéri,

Je reviens de Versailles – Partout foule intense. Je pressens que la chaleur va revenir graduellement offensive et odieuse ici. Je me décide donc à quitter Paris le mardi 12 courant pour Auxerre – je passerai dans la haute Yonne probablement les fêtes assomptionnelles, puis, vers le 18 ou 19, j’arriverai à St Honoré où je retiendrai ma chambre à l’avance. Si vous pouvez venir une après midi à St Cloud voulez vous que ce soit le mardi 5 ou le samedi 9. Je serai sans doute occupé le 10 et le 11 et je partirai le 12 au matin – Mes amitiés à Lisette et à sa mère. Bien affectueusement ton Octave. Réponse svp pour le jour qui vous conviendra.

 

[ref. MEL.22][carte-lettre à l’adresse de St-Cloud] Ce 1er juin 17. Adressée à M. Albert Lantoine (24 rue de Navarre, Paris 9e).

 

Mon cher confrère,

Je viens de passer dix jours sur le front britannique où j’ai vu de la beauté et de l’horreur, et, surtout, cette ineptie qui semble de plus en plus stupide (à mesure qu’on s’approche des réalités) de la guerre – Et dire que nous sommes muselés par la censure qui ne veut et ne tolère que le mensonge le dernier dieu de l’humanité imbécile. Et l’on rêve de gueuler de la vérité crue !

J’ai trouvé ma lettre tombée au rebut par suite de la loufoquerie de l’ami Bourge, et aussi votre Ile de Serk dont la lecture m’a ravi en me reportant à des souvenirs d’heureux âge où l’on pouvait sentir la paix et l’harmonie des beaux sites de nature.

Merci de l’envoi – J’aimerais vous rencontrer parfois, soit en un déjeuner à Paris, soit en une promenade dans le Parc de St Cloud. En nous écrivant à l’avance on y pourrait parvenir.

Mes sympathies et bons souvenirs.

Octave Uzanne

 

Avez-vous nouvelles du Commandant ?

 

[ref. MEL.23][papier libre à l’adresse de St-Cloud] Ce jeudi 17 mai 1917. Adressée à M. Albert Lantoine (9bis rue du Faubourg Poissonnière).

 

Mon cher confrère,

Notre ami Bourge qui ne m’a pas permis de le voir depuis des ans, car il bourlingue toujours sur un océan d’incertitudes et ne m’offre guère de bouée d’attache, me propose de me rencontrer avec lui chez vous ce 19 courant samedi matin 9bis Faubourg Poissonnière.

Je lui écris marquis’Hotel, place Pigalle que je suis heureux de pouvoir accepter son filin, pour atterrir vers lui, ce samedi vers midi ¼ ou 20, mais pour assurer l’abordage je vous lance ce mot pour que vous régliez toutes choses avec Iann Karmor qui ne doit plus se mettre en plongée.

J’aurai grand plaisir à vous retrouver et je vous serre bien sympathiquement la main.

A samedi j’espère.

Octave Uzanne.

 

[ref. MEL.24][papier à en-tête du LIVRE] Paris, le 29 juin 1881.

 

Mon cher Monsieur,

Voilà l’article redemandé pour retouches.

Veuillez me le retourner sous huit à quinze jours.

Croyez moi bien à vous,

Octave Uzanne

[ref. MEL.25][papier à en-tête du LIVRE] Paris, le 31 décembre 1883. Adressée à Charles Monselet, cette lettre s’est pourtant retrouvée dans les papiers de Joseph Uzanne ... a-t-elle jamais été envoyée ? ni reçue par Monselet ?

 

Mon cher Monselet,

Je n’ai pas de chance avec vous au début de l’année nouvelle ; heureusement que nos bonnes relations sont au dessus des questions d’affaires, ce qui mitige pour moi l’ennui de cette lettre.

Voilà que l’administration du livre, éditeur en tête, tablant sur la lenteur des renouvellements d’abonnements, se réunit en commission de budget pour aviser à mille et une économies dont vous êtes la première victime.

On supprime tous les gros traitements, le vôtre est au premier rang et est jugé excessif, vu la situation actuelle et c’est moi, palsambleu qui suis chargé de vous mander ceci – Plus de Causerie anecdotique ! – moi qui était si heureux de cette bonne aubaine de vous compter comme chef de file de ma seconde partie. – moi-même je suis rogné – c’est une question d’héroisme et de dévouement qui se comprend de ma part, mais vous aviez mieux à faire, vous, mon cher ami, que de jouer les St Labre sur le seuil de ma revue bibliophilique.

Votre premier article est composé, mais comme on ne veut pas donner lieu à des réclamations d’abonnés qui, dès le numéro de février se verraient privés de leur « Monselet », il ne sera pas inséré.

Je tiens la copie à votre disposition ou épreuve si cela vous est agréable.

Je vous quitte et vous cache toute ma mauvaise humeur. Alceste n’était qu’un Philinte à côté de votre ami en ce moment.

Toujours tout à vous.

Octave Uzanne

P.S. Vous savez que par exemple je maintiens et à bon prix les oubliés et dédaignés seconde partie. Ici, ce serait une question de cabinet – rien moins que cela – et cela n’aura pas lieu – Je compte donc sur un Sylvain Maréchal soigné. Octave.

 

[ref. MEL.26][papier à en-tête du LIVRE] Paris, le 20 déc. 1883

 

Mon cher monsieur,

Je ne puis mettre la main sur Herman Sevogel von Basel – J’ai beau chercher ce que j’ai pu faire de ce grand in-4°, je ne trouve pas ; il est probable que je m’en serai défait en faveur d’un ami – en tout cas, je suis au regret de ne vous le pouvoir envoyer.

Nous parlerons des Expositions Iconographiques lorsque j’aurai le plaisir de vous voir ; il y a difficultés nombreuses et après conversations avec M. Quantin je ne vois pas la chose possible.

Recevez, cher monsieur, mes cordiales salutations.

 

Octave Uzanne

 

[ref. MEL.27][papier à en-tête du LIVRE] Dijon, le 13 novembre 84.

 

Cher monsieur,

Votre lettre me parvient à Dijon – je pars demain pour l’Allemagne où je resterai une quinzaine.

Je compte absolument sur vos articles Fournel – Fournier pour le 16 au 18 car je désire qu’ils soient insérés en décembre.

Je vous ferai envoyer à mon retour les volumes que vous me demandez. J’ai grand peur que le H. de la Garde dont vous me parlez ; journaliste tout à tour au Pays, à Angers, à Auxerre, actuellement Capitaine en retraite à Romans (Drôme), ne soit le « brûlé du feu du ciel » dont vous me parlez. Je compte sur vous. A bientôt.

 

Octave Uzanne

 

[ref. MEL.28][papier à en-tête du LIVRE] Paris le 5 août 1885.

 

Monsieur Sigaud – Imp. Jouaust & Sigaud

 

Mon cher ami,

Veuillez donc voir mon compte de dépôt et s’il y a quelque chose à mon actif, comme je l’espère, n’ayant point passé à la caisse depuis plus de 18 mois. Je vous prie de le remettre à mon frère à qui je remets un reçu en blanc. A vous sincèrement d’amitié.

 

Octave Uzanne

 

[ref. MEL.29][papier à en-tête du LIVRE] Paris, le 14 août 1885.

 

Cher monsieur,

Je suis très touché de voir que vous avez pensé à moi pour le « Livre de Pochi » - je suis ami de cœur de notre cher Cladel et rien ne peut m’être plus agréable que de me joindre à tous ceux qui l’aiment pour concourir à former un petit livre destiné à sa fille aînée.

Malheureusement je suis en ce moment accaparé par le travail, à ne savoir que devenir et je ne vois rien dans mes cartons susceptible de pouvoir convenir à votre petit décaméron.

Quelle serait la dernière limite pour la livraison de la copie ?

Si j’ai quelques latitudes je ferai l’impossible pour être des vôtres.

Veuillez donc me lancer deux mots à ce sujet et trouvez ici l’expression de mes sentiments les meilleurs.

 

Octave Uzanne

 

[ref. MEL.30][papier à en-tête du LIVRE] Paris, le 25 août 1885.

 

Cher monsieur,

Je suis assez souffrant depuis quelques jours, et, qui pis est, affligé d’une baisse et d’une fatigue terrible de la vue.

Avec tous les travaux qui menacent de me déborder je me vois avec un réel regret, obligé, par crainte de vous faire attendre au-delà du possible, de renoncer au plaisir de collaborer au « Livre de Pochi » et je vous le mande aussitôt.

Ne comptez donc plus sur moi et croyez que je suis très affligé de ne pouvoir me joindre aux vrais amis de Cladel.

Trouvez ici, cher monsieur, l’expression de mes sentiments bien sympathiques.

 

Octave Uzanne

 

[ref. MEL.31][papier à en-tête du Victoria Hotel à Chicago] Chicago – 23 mai 1893.

 

Ma chère maman aimée,

J’ai enfin eu hier, tenu un mot de toi ; si léger qu’il ait été, il m’a fait bien grand plaisir après être resté si longtemps privé de tes nouvelles directes.

Me voici pour ainsi dire sur le retour ; je quitte Chicago d’ici une heure, et, comme je passe par une autre ligne que celle de l’aller, je vais rester 36 heures en route pour arriver à New-York jeudi matin 25 – avec de bons sleepings, c’est un plaisir, et, comme je suis muni de laissez-passer, je n’ai qu’à me laisser vivre et emporter sans souci ni dépenses autres qu’à l’hôtel. Je resterai à New-York jusqu’à lundi soir 30, j’y ferai vendredi mes adieux au bon Mariani que j’ai quitté il y a déjà 26 jours ; dimanche je verrai Bouchor au passage – tout cela au milieu d’une vie très affairée et très laborieuse.

Mariani sera à Paris le 4 juin par La Touraine, Joseph pourra lui dire un bonjour à cette date 11 rue Scribe, il y trouvera de mes nouvelles assez récentes.

Le 29 je passerai la nuit en wagon pour arriver à Niagara le 30 et voir les chutes ; le lendemain je filerai sur le lac et le St Laurent pour prendre le 1er bateau qui descendra les rapides, puis après un voyage au Canada je reviendrai à New-York le 8 juin juste à temps pour m’embarquer sur la Bourgogne qui lèvera l’ancre à 6 h du matin le 10 (midi à Paris). Huit jours après, ma chère maman, je pourrai t’embrasser, mais si tu devais aller à La Villotte, peu importe, tu pourrais t’y installer et j’irais t’y embrasser pour 24 h. car je reviens pour travailler à mes livres, sans enthousiasme, mais par devoir et désir de palper les quelques sous qui me donneront l’an prochain l’indépendance nécessaire à mon amour des voyages et de l’étranger.

Cette petite fugue en Amérique m’aura semblé excessivement courte ! tout passe et si vite ! J’aurais aimé beaucoup y prolonger mon séjour et voir la Californie et le sud, mais il faut être maître de soi et commander sa vie, si on ne veut pas la rater.

J’aurai d’autres part incessamment travaillé depuis mon départ, à voir, à apprendre, à observer et à écrire – ce misérable Figaro a reçu de moi dix lettres, et il n’en a publié que deux – les plus pittoresques et intéressantes sont restées je ne sais où – je sais bien que tout me sera payé, mais c’est navrant et dégoûte du journalisme français. L’Illustration a reçu 5 articles. Les croquis, dessins, photos à poste continue - somme toute j’ai presqu’autant pondu qu’à Paris et sans fatigue autre que la volonté dépensée pour produire et me soustraire aux amis.

Je t’embrasse, chère maman, j’attends un mot de toi jeudi soir à mon arrivée à N-Y.

Tendresses à l’excellent Jose ; à tous deux de cœur et d’affection.

Octave

 

[ref. MEL.32][carte postale du lac de Königsee (Bavière)] adressée à Mme Veuve Uzanne, Couvent des Dames Augustines, place de Mantes, St Germain en Laye près Paris (Seine et Oise). Cachet du 11 septembre 1904. (le texte est écrit sur le recto de la carte, en haut et en bas).

 

Je n’ai pu t’écrire encore, chère mère, tant j’ai voyagé sans trêve depuis six jours. Santé tout à fait bonne – très beau temps, paysages et villes admirables – je coucherai demain samedi à Vienne d’où je t’écrirai.

Soigne-toi bien et pas d’imprudence – à bientôt une lettre. Tendresses cordiales. Octave

 

[ref. MEL.33][papier libre] Caire 21 décembre 94. Vendredi (adressée à son frère Joseph au 168 Bd St Germain).

 

Mon cher Joseph,

Reçu hier soir ta carte télégramme du 14 et c’est tout. Tu dois avoir reçu mes clefs expédiées il y a huitaine et de nombreuses lettres.

Très occupé par mes courses à baudet aux environs du Caire, par les musées, les travaux, bien portant, heureux.

Ce soir je dîne chez Nubar Pacha, lundi chez Cogardan et mercredi matin je file pour le haut Nil, 21 jours de navigation et d’excursions.

J’attends plus amples nouvelles lundi et mardi, je ferai suivre après les lettres en retard à Guirghr [pour Guirg ?], puis à Louxor ; nous allons être éloignés de près de mille lieues.

J’embrasse notre chère mère comme je l’aime bien profondément et vous souhaite une heureuse fin d’année.

Ce mot pour le bateau de Chine qui a de l’avance, il te parviendra mardi ou mercredi.

Ton Octave

 

[ref. MEL.34][carte avec médaillon en relief – Venise « Sinceri Auguri »] Venezia – (samedi) 17 avril 99.

 

Caro fratello –

Ici, depuis hier dimanche, après arrête de 24 h à Milan ; je jouis d’un temps superbe et suis seul, n’espérant plus guère voir Dom – Je resterai à Venise jusqu’à mercredi soir environ, puis traverserai Florence un jour, de là à Gênes et enfin à Cannes ou je coucherai dimanche soir, incognito, sauf pour notre mère – Je coucherai à Terminus Marseille lundi et serai mardi 25 à Paris – tu peux m’écrire poste restante Gênes. Affectueux baisers. Octave

 

[ref. MEL.35][carte postale de Salzbourg, Mirabellgarten] Cachet de la poste du 12 septembre 1904. Adressée à Madame Veuve Uzanne chez les Dames Augustines place de Mantes Saint Germain en Laye (Seine et Oise).

 

Mère chérie – Si tu as à m’écrire pour me donner de tes nouvelles, fais ainsi l’envoi : Oct. Uzanne. Congrès de la Presse – Vienne I Autriche – 5 Fleismark.

Tendrement. Octave

 

[ref. MEL.36][carte postale Durlston Bay, Swanage –Royaume Uni] Adressée à Joseph Uzanne 172 Bd St Germain Paris. Cachet du 22 juin 1905.

 

Bonjour de l’isle de Wight temps superbe – t’embrasse. Octave

 

[ref. MEL.37][carte postale de S. Margherita Ligure – porta e Grand-Hotel] Samedi 9 juin 1906. Adressée à Joseph Uzanne 172 Bd St Germain.

 

Matinée passée au travail devant l’immensité. Toujours bien et heureux – n’irai que demain à la Spezia pour passer l’ennuyeux dimanche ici sur mer – Temps toujours beau – Arriverai mardi à Florence. Je ne suis pas sûr d’aller à Venise par crainte moustiques. Ecris moi : Florence, ferma inposta (affizi) j’y serai jusqu’à jeudi au moins. Tendresses. Octave

 

[ref. MEL.38][papier timbré République Française] Testament d’Octave Uzanne en faveur de son frère Joseph.

 

Paris ce 10 septembre 1906

Je dis Dix Septembre 1906 –

Par ce présent écrit, je déclare que, sain de corps et d’esprit, je ne connais et reconnais comme seul héritier de mes biens, après ma mort que mon frère bien aimé Joseph Omer Uzanne, domicilié actuellement 172 Boulevard St Germain, à Paris.

En cas de décès, c’est à mon frère Joseph Uzanne que reviendraient toutes les valeurs déposées, soit chez moi, soit à ma maison de crédit industriel et commercial, bureau G. (compte 917) 27 avenue Marceau à Paris. Mon mobilier, ma propriété littéraire, tout ce qui m’appartient ou serait à me revenir deviendrait la propriété de mon frère Joseph.

Pour les legs et souvenirs que je désirerais laisser à des personnes chères, mon frère, avisé de mes volontés par notes spéciales à lui remises, aurait à se conformer à mes désirs qu’il connait d’ailleurs et agirait avec toute la sollicitude et le désintéressement que je lui reconnais.

 

Octave Uzanne

 

En mon domicile, à Paris, 5 place de l’Alma.

 

[au verso]

 

Ce six juillet 1910 –

Ayant changé de domicile et habitant

62 Boulevard de Versailles à St Cloud (Seine et Oise)

Je contresigne de nouveau pour affirmer la validité de mes volontés, ce testament en faveur de mon frère Joseph.

 

Octave Uzanne


[ref. ND.1][papier libre] Ce vendredi soir – 5 h.

 

Je reviens d’Anthéor où je fis un de ces repas monstres à la lyonnaise, de chez Bertnay – nous étions seuls, en douce intimité, avec un temps radieux – ce fut charmant – j’y fus ce matin à pied, je revins à pied après déjeuner, jusqu’à Agay, où une voiture m’attendait qui m’amena à Raphaël à l’heure traîtresse de 3 ½ à 4 h.

Je m’étais arrangé pour que Rochard ne vint pas – après la journée barbante d’hier, j’avais assez de ce général Troupeaux, de ce vieux chef de bataillon sentimental, barbon et barbant.

Ma santé excellente – je me suis arrangé ici pour ne prendre le soir qu’un seul potage et négliger le succulent menu, (le potage de légumes est fait et passé pour moi) et j’ai repris mes habitudes sobres de St Cloud qui me sont tout à fait indispensables.

J’ai eu ta lettre avant de prendre ce matin le train de 8 ½ pour Agay. Je te retourne l’épître de l’adipe du Mans, ex garçon de café, j’y joins une autre lettre à laquelle tu répondras.

Ma petite vitesse est arrivée et déballée et en place – je n’attends donc plus rien et resterai ici à travailler tout cette semaine sauf les balades chez la mère Loyé et aux alentours. Ce sale Echo de Paris ne m’a rien fait paraître. J’écris à Simond Henry de me retourner mon article sous une enveloppe que je lui adresse et jamais plus je ne remettrai les pieds dans cette maison loufoque dont je me puis si aisément passer. Tu ferais bien de les sacquer pour ton supplément et remplacer par un autre journal.

Si tu écris à Carton de Wiart, pas un mot je te prie pour la correspondance de cet hiver. Le baron est un homme qu’il ne faut pas presser ; ça ferait mal – je partirai le 2 janvier et je lui écrirai une lettre très suggestive et détaillée vers le 15 ou 20 courant, le convoyant vers le Figaro, si le Matin ne marche pas (et il ne marchera pas) et aussi vers le New York Herald qui, à mon avis, serait excellent pour l’affaire – (Figaro et Herald alternativement, j’y ai pensé, ce serait la perfection).

J’ai aussi composé un programme de distribution de la brochure avec nombres indiqués – je lui enverrai ce projet en temps opportun, il en fera ce qu’il jugera nécessaire – c’est son affaire.

J’espère que Mariani reprendra son aplomb – mais quand il ira bien, les déjeuners, les pique assiettes de Valescure, la vulgarité de Lumière (cet ignoble rasoir dont les B[ertnay] me dirent tous les méfaits cet été) le ramèneront à la mauvaise voie - je le redoute – ne peut-il donc pas vivre paisible, solitaire, pour lui ! le pauvre homme !  dis lui mon opinion.

A bientôt, mes tendresses – pour toi et affecteux souvenirs à Mme M.

 

Octave

 

[ref. ND.2][carte-lette à l’adresse de St Cloud]

 

Yvonne Dupontavice m’a télégraphié hier qu’elle m’attendait rue de Valois à son hôtel à 6 h – je n’ai pas répondu ni donné signe de vie. J’écrirai plus tard que j’étais absent.

 

Octave

 

[ref. ND.3][papier libre] (itinéraires possibles pour un voyage, très probablement adressé à son frère Joseph).

 

7 à 8 jours

 

Paris Anvers – (avec ou sans arrêt à Bruxelles) – 1 jour ou 2

Anvers Rotterdam par eau (canaux), par le bateau télégraphe – 1 nuit

De Rotterdam à Dordrecht par eau (beaux bateaux) ou par chemin de fer – 1 jour

Dordrecht (Hôtel Armes de Hollande)

De Dordrecht à Middelburg – 1

(Middelburg – Vèere – Dombourg – Flessingue – 1

Flessingue à Breskens par tramways à Bruges ou à Heyst sur mer – 1

De Heyst à Blakenberg – Knock, Ostende, Bruges – 1

Ostende à Furnes par tramways

Furnes à La Panne sur Mer – 1

puis Dunkerque –

ou

- Paris à Liège

- Liège à Spa

- Aix la Chapelle

- Cologne (de Cologne à Koblentz par le Rhin et retour)

Cologne à Dusseldorff ¾ heure

De Dusseldorff à Nimègue par chemin de fer

Nimègue par le Rhin à Dordrecht

et retour par Ile de Walcheren

(voir ci-contre) [la suite manque]

 

[ref. ND.4][enveloppe-lettre à en-tête de l’hôtel Beau Rivage à St Raphaël (Var)] Mardi soir.

 

Mon chéri,

Voici des mauvaises épreuves de nos photos.

J’aurai les tirages vendredi ou samedi et t’enverrai celle qui te reviennent.

Naturellement tu seras, toi, fait en rond.

J’ai dit adieu à Villeneuve à la gare et j’ai laissé Angelo et Paoli attendre la venue du Dr Emmery des Brousses.

Je n’irai pas à Valescure avant vendredi ou samedi – jeudi tout le monde va à Nice – pas moi.

Bien affectueux baiser.

 

Octave

 

[ref. ND.5][carte postale de la villa Paulotte à Anthéor, maison des Bertnay] (adressée à Joseph Uzanne par Paul Bertnay).

 

Tous nos meilleurs vœux, mon cher ami – en attendant de vous embrasser de bon cœur quand vous reviendrez dans nos parages.

Nous recevons d’Octave une carte de Colombo – mais où le joindre pour lui envoyer nos souhaits ? -  si vous savez où on le trouve, vous serez gentil d’être notre interprète.

 

Paul Bertnay

 

[ref. ND.6][carte postale de Cannes – Le Port] Dimanche.

 

Toujours bien – temps à gros grains, mais très doux, avec éclaircies favorables à la balade. J’ai mon ami Heinemann depuis vendredi soir, il doit partir demain pour Monte Carlo.

J’ai bien eu ta lettre hier. Soigne toi, ne te surmène pas – tout doit arriver à point – rien ne sert de se tuer et personne ne nous en sait gré – alors – affectueusement.

Octave

 

[ref. ND.7][carte-lettre à l’adresse de St Cloud] Les Pins – Le Cannet – Samedi soir.

 

Mon chéri,

J’ai quitté St Raphaël par le rapide de 9 h 28 ce matin et j’étais à Cannes à 10 h – j’y ai fait mes emplettes, rencontré les Donnay, Terrasse, Santelli ; le temps était clair, agréable, soleillé – à midi j’ai déjeuné chez le brave père Ducreux, avec beaucoup de jeunes femmes et jeunes hommes ; - ce vieillard aime la jeunesse et est très entouré – nous avons eu ton télégramme à 2 h, tandis que j’étais là et il en a été très touché et m’a chargé de te le dire. Le père Ducreux a vieilli physiquement mais son intelligence est alerte.

Je viens de monter au Cannet par le train et à pattes. Je retrouve la baraque Rochard glacée – je ne parviens pas à allumer du feu, je me couvre et vais tâcher de m’installer, mais je déteste vraiment ce coin et je n’y ferai pas long feu – vive l’hôtel à côté de ce Casino désaffecté.

Ma santé bonne – je t’écrirai bientôt, demain soir ou lundi – ici on est loin de tout, postes difficiles, journaux du matin difficiles – Il faut être idiot pour être venu se loger dans ce sale endroit. Enfin, en voyageant à Grasse, à Nice, à Cannes etc., en travaillant surtout je m’en tirerai, mais je ne donnerais pas 25 000 frs de la maison d’Emile, surtout si j’étais tenu d’y demeurer.

Affectueuses tendresses – à bientôt.

Je t’écris à l’arrivée dans ce triste patelin.

 

Octave

 

[ref. ND.8][papier libre] Ce mercredi

 

Voici, mon chéri ; je ne puis mieux faire, il t’appartient de mettre au point, de biffer dans les noms cités, dans cette besogne je suis incompétent – c’est à toi de juger – ce genre de littérature m’est bien hostile, mais j’ai fait de mon mieux pour te rendre service. Je me débats dans une foule d’affaire avant de partir, courses à Paris, vêtements, dentiste qui me martyrise, 3 à 4 heures chaque jour, mais c’est indispensable, article le matin ou correspondance considérable, affaires diverses chez moi – ah ! je n’ai pas une seconde.

Louis va mieux et se regrimpe avec énergie en mangeant avec grand appétit – Je crois qu’elle ne me retardera pas pour partir. J’irai demain matin à Paris, déjeunerai P.P.C avec Alphonsine, puis dentiste, impossible songer à te voir.

Affectueux baisers.

 

Octave

 

[ref. ND.9][papier libre] Ce mardi

 

Mon chéri,

Je vais bien – voici la clef du cabinet Louis XIII.

Je vais à St Cloud terminer toutes choses, ordonner mes peintures et achever de prendre mes mesures.

Je vais tâcher ce matin de céder à Berheim le Guerrier et le Bébé endormi que j’ai retapés – je ne crois pas à la Générale Villiers – les gens font beaucoup d’embarras quand ils manifestent des désirs qui ne leur coûtent rien – quand il s’agit de casquer et d’acheter vraiment – ils se défilent – je connais la ruse, ta Générale est de cette race là, crois le bien – tu le verras par la suite – ou bien je le verrai sûrement par expérience si je ne traite pas avec Bernheim.

Bien affectueusement.

 

Octave

 

J’ai quelque peu dormi cette nuit avec un peu de chloral et, de 6 à 8 ce matin jai fait un article, corrigé des épreuves, ce qui me laisse libre pour tous travaux du jour … Dieu sait si j’en ai !!

 

[ref. ND.10][carte-lettre Hôtel Beau Rivage à St Raphaël (Var)] St Raphaël Lundi soir.

 

Alors : à jeudi, mon chéri, tu me diras quand tu pourras arriver – mieux vaut 1 h que 7 h du soir.

Le temps est soleillé, mais le terrible vent d’est glacé persiste. Je reviens de Fréjus à pied ; ce vent me coupait la figure – j’ai déjeuné samedi à Valescure entre Angelo & Paoli – J’irai peut-être demain déjeuner à Anthéor, si le vent tombe un peu – je retournerai mercredi à Valescure.

J’ai vu arriver ici un vieil ami anglais avec sa femme – (une vieille caricature) – je m’en débarrasse peu à peu, mais c’est dur à les remettre en place et à conserver ma liberté et ma solitude à table, à ma petite table que je ne veux abandonner. Dieu que les hommes sont rasants !! J’aime tant être seul ! J’ai assisté samedi & dimanche aux offices – notre pauvre mère mourut en 1904 et non en 1905, ce serait donc le 5è anniversaire et la cinquième année de sa mort – si je ne me trompe.

Alors je t’attends. Toutes mes tendresses.

 

Octave

 

[ref. ND.11][carte-lettre Hôtel Beau Rivage à St Raphaël (Var)] St Raphaël Mardi soir 6 ½.

 

Mon chéri, j’arrive d’Anthéor, où je fus à pattes, d’Agay, par un beau soleil et d’où je reviens tardivement par le train de 5 ½ d’Agay – après arrêt à l’auberge pour infusion.

Hier, je passai quelques bons moments à St Aigulf où je trouvai chez Mme Loyer un jeune couple aimable, le mari peintre, logés chez elle.

Aujourd’hui, Bertnay et sa mère seuls étaient à la maison, madame Bertnay était à nice.

J’éprouve le besoin de sortir et de marcher un peu car c’est nécessaire à la santé et au bon équilibre moral et physique – ceux qui, comme Rochard, ne marchent jamais sont ignoblement envahis, presque difformes et ne sauraient vivre bien portants.

J’ai eu ton télé hier soir et ta lettre ce matin ou plutôt à 1 h après midi avant de partir.

Je te prierai peut être avant ton départ de voir Alphonsine et de lui fixer rendez-vous après midi – ça lui fera plaisir et tu me donneras de ses nouvelles. Elle a été malade du côté de la machoire.

A bientôt – à quinzaine – je resterai à Beau Rivage, j’y suis fort bien et puis j’ai vu Bickel, toutes ses grandes chambres sont occupées.

Tendresses.

 

Octave

 

[ref. ND.12][papier libre] Ce samedi 5 h. (1908)

 

Merci de ton mot, mon cher frérot – je le reçois en sortant de Valescure où je suis allé déjeuner ce matin pour faire mes adieux à Villeneuve qui rentre à Marseille mardi soir.

Ce fut cordial et plus agréable qu’avec la foule et les femmes – la pluie tombe depuis hier, mais il fait doux et agréable –

Rochard me télégraphie qu’il rentrera mardi et qu’il céderait les Pins à 170 000 – J’en écris aux Bertnay en fixant 180 000 dernier prix – J’attendrai Rochard vers jeudi. Dis moi si tu l’as vu et ce que tu lui as dit. Mariani viendra peut être avec moi chez les Chéret, samedi 14 – Il rentrera, je crois, du 17 au 19 à Paris – je le retiendrai le plus possible.

Bien affectueux baisers.

 

Octave

 

Angelo, Villeneuve, Alna étaient venus m’envahir hier après midi, c’est ainsi que je fus à Valescure ce matin – Santelli ne parle pas de rentrer, il restera jusqu’à la fin sans doute.

J’ai appris la mort de ton ami Paul Sain.

 

[ref. ND.13][papier libre] Ce vendredi.

 

Mon cher frérot,

Je vais plutôt mieux, avec des alternatives de dépressions et de fatigues, mais la toux est infiniment moindre, bien que les bronches soient encore grasses et chargées et le cerveau idem. Laffont hier m’a ausculté et a encore trouvé un petit point de rien, au bas du poumon droit – j’ai sinapisé et sinapiserai ce soir.

Demain samedi je ferai une sortie légère, également, dimanche et lundi, je partirai pour Barbizon – ce que j’avais retenu a été loué à des américains mais je tâcherai de m’arranger provisoirement dans la même maison et j’y suis attendu lundi sans faute.

Je tiens à ce que personne ne sache exactement où je serai – je dis à tout le monde que je vais à l’aventure, sauf quoi, tous les ennuyés et raseurs me viendront voir et ma douce vie contemplative et indépendante serait troublée – d’ailleurs dès que j’irai bien je verrai Moret, Montigny, Nemours, etc et chercherai des coins – peut-être irai-je à Recloses, mais je ne veux voir personne et vivre à ma guise. Tu comprends ça.

Je suis navré de te voir si fragile et, par ta faute – tu as détruit les réactions de ta peau en te couvrant outre mesure, si tu ne t’entraines à refaire l’éducation de ta peau, à te couvrir de moins en moins, à t’aguerrir à l’air qui ne fait du mal qu’à ceux qui vivent, comme toi, hors de la normale. Je crains bien que tu ne sois de plus en plus fragile et débile à l’avenir.

J’ai lu la cure de soleil de Rikli, c’est un livre d’admirable logique et de médecine naturelle.

Moi, bien que malade-convalescent, je commence à me découvrir, lit, vêtements, etc., et je m’en trouve bien – si je reste, comme je l’espère, cinq à six mois hors Paris, je tonifierai ma peau, je l’acclimaterai aux variations de température et je tâcherai d’être, comme les solides, toujours peu couvert, aéré et prompt à réactionner – Tout est là – Je voudrais te convaincre – des ablutions, des frictions, de l’exercice, valent mille fois les gros vêtements.

J’aurai plaisir à te voir demain samedi, si tu préfères rester chez toi aujourd’hui à te soigner – si je sors, je rentrerai à 4 h environ.

Si tu es encore malade, nous pourrons nous voir dimanche P.P.C.

Tâche donc de m’avoir 3 pains de savon Lumière antiseptique pour dimanche. Je prierai Filleul lundi de m’amener à 11 h 25 – une auto-taxi fermée du boulevard pour aller à la gare de Lyon.

Mes tendresses.

 

Octave

 

[ref. ND.14][carte-lettre à l’adresse de St Cloud] Jeudi 4 h.

 

Merci, mon chéri – j’ai eu une lettre du Dr Bloch que je verrai samedi – ma malade a bien dormi, 7 heures de suite – et moi aussi – je suis très bien aujourd’hui et reposé et d’aplomb.

Le docteur « Marcou » est revenu ce matin – à l’auscultation il a trouvé le haut du poumon droit encore très, très congestionné – mais Louise se sent mieux ; je lui ai donné un salutaire lavage intestinal, ses règles arrivent, j’espère en une modification heureuse sans vouloir être ni optimiste ni pessimiste pour l’avenir – l’essentiel est qu’elle se relève d’abord je verrai demain Laffont et, si je puis sortir je te téléphonerai demain vendredi 3 à 3 ½ pour t’aviser de la situation.

Envoie moi au plus tôt ton article à revoir.

J’ai des occupations multiples mais je redeviens tout à fait combatif vis-à-vis d’elle, c'est-à-dire que je me sens bien – c’est le moment pour moi d’opérer ta révision.

Joli temps sain – Hier soir c’était la mort dans le brouillard – je rentrai frissonnant après ma courte sortie – aujourd’hui froid mais délicieux.

Tendresses.

 

Octave

 

[ref. ND.15][papier à en-tête du 17 quai Voltaire mais utilisé à l’envers] St Cloud.

 

Mon chéri,

Je pars ce matin jeudi à 11 ¼ pour Paris et Liège, j’espère que tu as eu ma lettre mardi soir te disant la visite du Dr Nepper.

Je souhaite que tu ailles bien, que tu prennes goût à ton voyage, que tu te familiarise avec l’étranger ou j’ai si souvent vécu seul et sans ennui – je pense aller directement demain à Hanovre et Magdebourg. En tout cas, je ne t’écrirai qu’à mon arrivée à Berlin, lundi matin, et je le ferai à Venise ou tu seras installé.

J’espère bien que tu sauras voir Venise, qu’il faut voir seul, où il faut se perdre, s’égarer, se retrouver, aller au hazard dans les moindres ruelles et ne manquer aucune église, surtout celle de St Sebastiano, sur la Giudecca, où est enterré Paolo Veronese.

Il y a une centaine d’églises et de chapelles et des maisons à voir à l’infini. Les étrangers voient mal et peu Venise – Il y faut marcher beaucoup et ne rien négliger – en dehors des Frari et de San Giovanni et Paolo, que de petites chapelles ! celle des Esclavons où sont surtout les peintures de ce surprenant Carpaccio – entre partout, ne néglige rien.

Enfin, tâche de te bien débrouiller, vas à Burano, à Forcello, à Chioggia.

Je t’embrasse tendrement.

 

Octave

 

[ref. ND.16][carte-lettre à l’adresse de St Cloud] Ce mercredi soir 8 h.

 

Merci, mon chéri, de ta venue – dans tout cela, je fais ce que je dois faire, et de mon mieux – c’est un évènement comme il en arrive tant dans la vie et que je prends à cœur, cela est naturel.

Ce soir la malade a fait de la température vers 4 ½ 38 ½ ; je suis descendu chez le médecin qui m’a dit de lui donner 50 mg de Cryogénine (des frères Lumière) et de renouveller ce soir, si la température est à 39. A 6 h ½, il y avait 39 ½ de température, j’ai fait prendre un cachet de 50 mg Cryogénine pour obtenir une température de 39 ½ à 7 ½ et de la transpiration – ce qui n’est pas mauvais – j’ai bien fait de ne pas aller à Paris, il ne faut guère quitter ses malades qui si vite dans des cas tels ont des variations si brusques, de telles poussées empiriques souvent – ce soir je veillerai à assurer la bonne nuit calme, si c’est possible.

J’espère que tu as vu le Dr T. Block et qu’il a reçu mon mot à temps – je ne crois pas que tu aies pu arriver avant 4 ½ à Paris.

Quant à Faisans, agis comme tu voudras et pourras. Je te laisse carte blanche, si toutefois tu me veux prévenir et si tu es sûr que Faisans fasse la chose à titre tout à fait amical – tu comprends ça.

Je t’embrasse affectueusement – je vois les choses tour à tour au pire et au mieux – il faut savoir attendre – mais c’est long – bien à toi

 

Octave

 

[ref. ND.17][papier libre] Jeudi. (avant le 28 juin 1908)

 

Mon cher Joseph, 

Je vais assez bien, grâce au sommeil, mais je suis très fatigué malgré tout, et je crois que, n’étant tenu à rien pour la date de mon déménagement, je vais le différer à fin juillet, afin d’aller me reposer à la mer du 28 juin environ au 25 juillet à peu près.

Je t’approuve d’aller à Londres. Il faut toujours faire ce qu’on a décidé et décider toujours ce que l’on veut faire, c’est une règle de vie confortable à soi et à autrui.

Si tu veux venir demain matin déjeuner avec moi – nous causerons un peu avant ton départ – je ne parle pas de dîner car je me couche à 8 heures.

Bien affectueusement.

 

Octave

 

Un pneu si tu ne peux venir – si non, c’est décidé – sois chez moi vers 11 h ½.

Je viens encore de vendre à 2 libraires 1.050 frs de livres – j’arrive à 19.300 frs de ventes depuis novembre – je dépasserai 20.000.

 

[ref. ND.18][papier libre] Jeudi matin. (juillet – Barbizon)

 

Mon cher frérot,

Pas mot de toi ce matin – ce sera sans doute pour le courrier de midi.

Il fait toujours doux et agréable ici et ces deux derniers jours j’ai fait de longues et agréables promenades à pied à travers bois et champs.

Demain soir le Dr L[affont] et son amie arrivent. Je les ferai circuler de mon mieux pour les jours de fête et reprendrai avec joie ma solitude après leur retour à Paris.

Ma location prendra fin ici du 26 au 27. Ma petite proprio a loué pour août à dater du 28 juillet – je verrai ce que je ferai – peut-être Cauterets ou Mont Doré, peut-être Le Coq en Belgique, peut-être Biarritz ou tout simplement un autre coin de Forêt pour août-septembre – j’y suis si bien et l’idée de circuler en août m’est si désagréable.

J’irai donc demain probablement me promener du côté de Nemours puis, de là, à Bourron, à Marlotte, à Montigny pour voir si j’y trouve le nid qui me déciderait à villégiaturer jusqu’à l’automne. Si rien, à mon gré, dans tous les environs que j’explorerai, je réintégrerai Paris vers le 26 pour filer au début d’août vers l’Auvergne, les Pyrénées ou la mer du nord.

Je t’enverrai la demande aux [mot agrégé illisible] parisiens cette après midi si tu dois en user. Je regrette que tu sois fixé si tard, car il faudra que Fillol fasse diligence pour obtenir le permis. Je te verrai avec regret remettre ton départ et ne pas prendre ton plein de vacances à l’air.

Bien affectueusement.

 

Octave

 

[ref. ND.19][papier libre] Ce lundi 10 h.

 

Mon cher frérot,

Je vais beaucoup mieux – toutes mes affaires sont faites. Malgré le temps indécis, je ne veux pas l’être, car l’air m’est nécessaire – je partirai ce soir par le train de 4 heures.

Je te prie de demander à Filleul de cueillir sur le boulevard vers 3 h une bonne auto-taxi bien fermée qui pourrait être à ma porte à 3 h 10 3 h ¼ au plus tard – il y viendrait avec elle pour me prévenir et je filerai aussitôt avec Louise.

Ne t’inquiète pas de ma décision – il vaut mieux, puiqu’à Paris avec ce temps aigre je ne pourrais sortir, que je parte au bon air – je pourrai faire sans fatigue mes premiers pas, peu à peu, vêtu comme il faut et sans façon.

Bien affectueusement et mes baisers bien tendres – je t’enverrai nouvelles ou te téléphonerai demain de Barbizon.

Je compte bien sur toi pour l’auto – 3 10 à 3 ¼ à ma porte en priant le chauffeur de tourner sur la ½ lune du trottoir pour être directement devant la porte de ma maison.

 

[la lettre n’est pas signée]

 

[ref. ND.20][papier libre] Mardi 9 h matin.

 

Mon bon chéri,

Louise va toujours de mieux en mieux, aucune élévation de température, toujours 37 à 37 ½, elle s’alimente bien, ne tousse pour ainsi dire point, sinon pour expertorer blanc, son poumon se dégage avec une rapidité considérable – n’étaient les pronostics de Faisans et Aguinet, je serais pleinement satisfait et plein d’espoir – le mieux est attendre et voir.

Ma santé assez bonne, mais ce temps humide et brouillardeux est plus malsain que les pires journées d’hiver – je me garde de sortir, sauf aux heures soleillées – demain j’irai le matin me faire travailler la machoire à 10 ½ chez Trepka Block, mais je ne pourrai aller déjeuner avec toi – je mangerai un morceau dans le quartier de la Madeleine, dare dare et ferai aussitôt toutes mes courses dans le VIIIe payer mes impositions, voir ma société Place de l’Alma etc. – de façon à rentrer à 3 h, car on m’apporte mon bureau demain soir ou jeudi matin – mon fameux bureau – si ce n’avait été la maladie de Louise, sûrement j’aurais avancé mon départ pour le midi – car ce temps est malfaisant – j’espère te voir bientôt, mais, tous ces jours-ci je serai pris par le terrible dentiste – veux-tu venir sûrement dimanche avec Mme Millon vers 1 h ou 1 h ½ et rester un peu ? je m’arrangerai pour n’avoir personne et te remettrai ton article tout refait – tendrement. Octave

 

[ref. ND.21][papier libre] Mardi soir 8 h. (Juin ? - Barbizon)

 

Je viens de faire, avec l’américaine que j’invitai et Louise, une promenade en calèche vis-à-vis, de Barbizon à Fontaine – le port par la vallée de la Sole, la Croix de Toulouse etc, en revenant par Chartrettes, Bois le Roi, Brolles, etc – Temps exquis.

Comme je me plais infiniment dans ce calme et que j’aimerais peut être y prolonger mon séjour une grande partie de juillet tu m’obligerais d’écrire au Dr Percepied au Mont-Dore pour lui expliquer que je compte aller m’y faire soigner et lui demander si la fin août début septembre est encore favorable au Mont-Dore auquel cas j’irais du 20 ou 25 août au 12 ou 15 septembre. Tu me diras quand tu viendras – une anglaise à pris l’une des 2 chambres d’ici – l’autre, la dernière est la moins bonne – tu pourras t’adresser aux Charmettes si tu te décides à venir.

Affectueux baisers.

 

Octave

[ref. ND.22][papier libre]

 

Mon cher Joseph,

Je continue à me débattre contre tant d’affaires et de lettres et d’arrangements pour partir libre sans doute mardi car le plus tôt sera le mieux – je filerai mercredi sur Lyon.

Filleul ne m’a pas remis le talon de la lettre recommandée à Simon – Envoie le moi – je suis heureux de partir libre de tout engagement, je chercherai peut-être du côté de Cannes pour passer un hiver moins isolé – mais que je voudrais donc que tout ça soit fini !! je suis à bout et fort énervé – à samedi midi [chez] Mariani. Tendresses cordiales.

 

Octave Uzanne

 

[ref. ND.23][papier libre] Dimanche soir.

 

Mon chéri, comme convenu, je pense que rien ne m’empêchera de démarrer de St Cloud ce prochain mardi – La malade me semble en mesure d’affronter le trajet en auto ou autrement – je ferai descendre les malles à la gare et enregistrer pour Paris, grande (et petite vitesse pour le midi à transporter le lendemain matin) – je n’aurai pas besoin de Filleul et j’arriverai vers 4 à 4 ½ au terminus ou sa sœur fera coucher Louise, la déshabillera et la laissera – je te prierai seulement d’envoyer Filleul au Terminus pour demander à l’heure que je te fixerai les numéros des chambres qui me seront attribuées au 3e ou 4e (côté gare) afin que je n’aie pas à descendre au bureau et à attendre dans les courants d’air – je te téléphonerai lundi après midi ou bien t’écrirai pour préciser toutes choses. Filleul viendrait au devant de moi avec les clefs de chambres – c’est le plus important.

Pour le mercredi matin, j’ai commandé à la Cie de l’ouest cour d’Amsterdam un omnibus 6 places qui viendra à l’hôtel terminus à 7 h 45 pour enlever malles et colis. Filleul n’aurait donc qu’à se trouver mercredi gare de Lyon à 8 h ½ environ à l’arrière des voitures. Il conduirait Louise et sa sœur dans le compartiment que tu ferais réserver par Fritz avec le réservé permanent : tu peux t’occuper de cela dès lundi ! Je m’occuperai alors de l’expédition des bagages, du timbrage, des billets, de la grande et petit vitesse, avec Filleul – au besoin Filleul enverrait la petite vitesse après mon départ et en port du, à St Raphaël ou à Cannes.

Je crois qu’ainsi tout s’arrangerait – je pourrais mardi à l’heure que je te déterminerais pour mon arrivée à Terminus remettre à Filleul mes permis à ½ droit et complets pour qu’il les fasse timbrer avant mon arrivée voilà – je vais bien – je te téléphonerai lundi pour préciser le tout. Tendresses. Octave

 

[ref. ND.24][papier à en-tête de l’Hôtel Terminus PLM Lyon-Perrache]

 

Mon bon frérot chéri,

Voyage excellent et sans le moindre anicroche, à Lyon, avec une chaise roulante, j’ai conduit la malade à l’hôtel ou deux délicieuses chambres communiquant au 2e attendaient vraiment claires et coquettes et supérieures au chez soi – ce n’est plus l’infâme Terminus de l’ouest.

Louise s’est mise au lit – je vais la faire un peu dîner et demain sa dernière étape avec son beau frère sera relativement aisée bien qu’elle doive changer de voiture à Culoz – ce qui est embêtant, mais j’arrangerai toutes choses au mieux.

Je trouve ici une lettre de l’hôtel des Roches Rouges à Agay assez tentante et un télé de Rochard annonçant lettre et m’avisant qu’il m’attend à Cannes.

Je ne décide rien encore – mais je me sens déjà heureux d’avoir pris le large et quitté mon logis enguignonné de St Cloud.

Je t’écrirai demain un petit mot.

Je tiens à t’embrasser affectueusement et à te remercier du fond du cœur de toutes tes gentillesses et sollicitudes dont j’ai été très touché dans mes ennuis.

Mille tendresses, mon chéri – à demain.

 

Octave

 

[ref. ND.25][papier libre] Samedi.

 

Mon bon chéri,

Veux tu me faire prendre chez Poulenc 122 Bd St Germain

1° Nitrate de cuivre fondu : 50 g

2° Nitrate de sesquioxide de fer : 50

3° Sulfate de cuivre : 30 g

4° Sulfate de fer : 30 g

Sequioxide de cuivre 30 g

Ne pas oublier le savon Lumière fils – Hermophenyl.

Je vais assez bien, toujours un peu de douleurs épigastriques. J’ai porté un peu de mes maigres produits à Nepper que j’espère voir demain ou lundi. Je suis toujours archi-occupé, afin de filer le lundi 25 – j’ai eu de Mazure le permis pour Louise ½ droit ; j’attends encore le mien de la Dépêche où je viens de télégraphier sauf quoi je verrai à m’arranger autrement.

Toute ma vie est prise et fixée heure par heure, jusqu’à mon départ, sorties, visites, réceptions et travaux nombreux – oh ! combien ! Ce soir, je rentrerai à 7 h – j’aurai le Dr Laffont et Mlle Lassalle à dîner – je les mettrai dehors à 9 ½ ou 10.

Demain – travaux et resterai chez moi toute la journée dominicale – j’ai en attente experts de gravures, dessins, Nepper, etc, mais si tu veux venir bavarder de 4 à 7 tu me trouveras très probablement délivré de tout le monde – sauf Alphonsine.

Lundi – après midi prise entièrement – je dînerai le soir chez Mme de Roddaz – le matin Durel, puis livres à céder à autre libraire.

Mardi – journée prise – courses, articles et le soir Remy de Gourmont à dîner – ouf ! ce sera la fin des obligations terminées.

A dater de mercredi je me réserve pour mes travaux littéraires, mes malles, expéditions et je serai parti pour tout le monde. J’espère bien arriver à tout faire et à quitter Paris le lundi 25 à 2 h 40 – Mes tendresses.

 

Octave

 

[ref. ND.26][papier libre] Ce samedi.

 

Mon chéri,

Ma grippe va bien mieux ; j’ai pu sortir dix minutes hier – j’ai des heures de dépression, car cette sale maladie est protéiforme et perfide, mais somme toute, je crois bien que j’en serais délivré vivement.

Je voudrais reprendre des forces pour tout ce que j’ai à faire avant de filer à St Raphaël et j’ai tant de papiers à classer et ranger !

Ces ciels gris, même pluvieux, ne me déplaisent pas ici ; je les crois moins malsains que ce temps anormal des jours derniers – je suis heureux ici d’être indépendant et solitaire – mais quelle difficulté pour le rester – que de lettres pour j’espère avoir de tes bonnes nouvelles – je t’embrasse tendrement.

 

Octave

 

Empêche les gens de me venir troubler !

 

[au verso] Lady Mary a perdu son mari – Elle est en Angleterre – sa fille, aujourd’hui millionnaire, vit avec son mari démissionnaire, au château d’Huchigny près Vendôme.

 

[ref. ND.27][carte-lettre à en-tête de l’Hôtel Beau Rivage à St-Raphaël (Var)] Samedi.

 

Mon chéri – il fait un temps superbe et un soleil ardent – le mistral a balayé les menues grisailles du ciel, la vie chante de nouveau dans l’air – c’est exquis.

J’irai déjeuner demain chez les Bertnay, mais, en chemin de fer, pour ne dépenser ni coupé ni auto – il y a ici des autos au kilomètre, moins chères que les coupés Séquier – Lumière ne parla pas de m’envoyer prendre – il est toujours à Anthéor, mais sa voiture doit venir aux approvisionnements des Bertnay.

Je partirai à 8 ½ visiterai les Roches Rouges et me débrouillerai pour aller à Anthéor, à pied ou en voiture close, selon le temps et le vent, et pour revenir le soir. Je serai prudent – mais je regrette déjà de m’être engagé – c’est si loin, cette Paulotte et si onéreux pour s’y rendre.

J’ai été donner le bonjour hier au Dr Bontems – il te trouva merveilleusement portant à Vittel.

Je vis toujours seul, heureux, sans soucis – les nouvelles de Louise me paraissent excellentes, du moins la « convalescence continue » - son médecin m’écrira sans doute la semaine prochaine – J’ai reçu la lettre de Durel – j’attends le catalogue.

Mes tendresses cordiales.

 

Octave

 

Rochard m’écrit une lettre où il se dit affolé, abruti, malmené par l’Ambigu, incapable de voir personne, etc. – tant mieux pour toi.

 

[ref. ND.27][carte-lettre à en-tête de l’Hôtel Beau Rivage à St-Raphaël (Var)] Ce vendredi soir 6 ½.

 

Mon chéri, avant ton départ un dernier mot qui te parviendra dimanche matin – sans doute – j’ai écrit à Angelo que j’irai déjeuner avec lui demain samedi – j’irai à l’église m’associer à ta messe par la pensée, car je n’ai pu obtenir de messe en noir, ici, avant le 28 ou 28, alors j’ai préféré attendre ta venue afin que nous assistions ensemble à cette messe de la semaine prochaine.

Ce matin je suis allé à la Garonnette, d’où par la Corniche – 7 h ½ - j’ai rejoint St Aigulf où j’ai déjeuné aimablement chez la mère Loyé avec 9 à 10 personnes amusantes.

Les matinées, ces jours-ci étaient très froides, glacées, et aujourd’hui, après une belle matinée, le vent s’est élevé, le ciel couvert et le temps fut très froid.

J’espère que tu auras beau temps pour ton arrivée ; ce serait de la déveine noire s’il en était autrement, car j’eus si merveilleux temps depuis deux mois.

Hier, je fus à Cannes et rentrai à 2 h ½ - j’ai pris un furieux rhume subit mercredi soir, mais heureusement j’ai pu le juguler et il ne m’empêche aucune excursion – dans le nord j’en avais pour 15 jours – Mes tendresses cordiales – Je t’attends et ne t’écris plus.

 

Octave

 

[ref. ND.28][papier libre] Ce vendredi matin.

 

Mon chéri,

Bon petit voyage, je te souhaite.

Tu as un bon train d’Anvers le matin à 8 h 49 – te conduisant à Rosendaal à 9 h 33 – là, tu changes de train pour Rosendaal Flessingue et pars à 9 h 39 – pour être à Middelburg à 11 h 20 – c’est très direct – billet direct naturellement pris de Anvers pour Middelburg, ou, et tu as « billet de 25 frs » de Rosendaal à Middelburg – ou plutôt de la frontière : Easchen – voir Middelburg avant le déjeuner. En Zélande, on vit à l’anglaise – le déjeuner à la paisible abbaye (Hôtel) à lieu de midi ½ à 1 h ½ environ dans un silence religieux – tu pourras voir Veere après déjeuner et peut être Domburg – mais promène toi bien à Middelburg tout y est curieux, les maisons surtout, les costumes, les femmes, les marchés – je te prie de dire à Filleul de me faire suivre la lettre qui peut m’arriver (de Louise) confiée à tes soins – qu’il la fasse suivre ici à St Cloud ou me la réexpédie sous enveloppe – inutile de lui donner aucune explication sauf lettre à me faire suivre.

Je vais recevoir les Leival – Mes tendresses – Bonne route et ne te hâte pas.

 

Octave

 

Ne manque pas de voir Flessingue, la digue [difficile à lire] – la gare et son quai pour les gros bateaux anglais de Queens Borough – etc.

J’écris à M. Ducreux pour avoir nouvelles.

 

[ref. ND.29][carte-lettre à en-tête de la Place de l’Alma – encadrement noir] Dimanche.

 

Mon cher Joseph,

Voici mes notes =

3 ou 4 papiers explicites et bien datés pour le marbrier, avec mesures, plans, indications techniques, etc.

Tu pourras terminer l’affaire – j’avais fait prix pour 80 mots environ – il y en aura 165 à peu près – le prix d’ensemble pourrait être de 100 f au lieu de 80 f peut être 110 – tu verras ça.

Il s’agirait de 4 pierres avec plaques de marbre sur pupitre [schéma d’un pupitre tracé à la plume] comme je lui ai expliqué.

Quant aux nôtres, nous ne sommes pas pressés – elles seront au bas.

Je te donne aussi des indications pour nos 4 concessions. Je suis d’avis d’écrire à Edmond pour faire abandon du terrain de notre petite sœur à la ville – si tu es de mon avis écris la lettre et signe la de nos 2 noms.

A demain par téléphone, le matin. Cordialités.

Dimanche

Octave

 

[ref. ND.30][papier libre] Ce jeudi.

 

Mon cher Joseph

Hier, journée des Bertnay, temps pluvieux ininterrompu qui nous a emprisonnés dans la villa Emilienne – Ces braves Bertnay arrivés en voiture découverte du dit Emile trempés et, je le crains, un peu déconfits. J’ai fait venir le soir pour les emmener un coupé fermé.

Journée cordiale  - j’aime infiniment ces gens la, surtout la femme – ils sont délicieux, l’homme même fin et subtil en ses appétits de bon vivant.

Aujourd’hui le soleil revenu. Nous allons chez Maëterlinck à Grasse déjeuner – mais je répudierai la promenade en auto.

Je quitterai les Pins samedi à 7 h ½ pour prendre le train de 8 h et déjeuner à Marseille à 11 h ½ - je coucherai le soir à Nîmes et le lendemain à Toulouse – Mille tendresses, mon chéri.

Octave

 

[ref. ND.31][papier libre] St Raphaël – Jeudi soir – 8 h. (fin novembre 1907 ?)

 

Mon bon chéri,

Je reviens de me promener à Ste Maxime, demain j’irai à Agay, hier j’étais à Boulouris, mais je me sens déjà familier avec Raphaël, bonne petite bourgade fort commode, assez plaisante et où j’ai trouvé logis selon mon goût, le premier que j’avais vu, hier matin, découvert à mon arrivée, sans agence, c’est un premier étage, (le seul de la maison) juste au dessus des bains de mer, face à l’immensité. C’est à la fois villa et appartement, mais, ça ne sent pas le locatis. Le propriétaire est un brave courtier maritime (Marcelin Simon) ; tout est en plein midi – c’est clair, gai, juste conforme à ce que je rêvais, en plein centre de St Raphaël – (adresse 35 Boulevard Félix Martin –

Si ce logis ne m’était apparu, j’y aurais renoncé, car tout ce que j’ai vu à St Raphaël était ignoblement meublé, tapissé, agencé … et dieu sait ce que j’en ai vu ! de quoi me donner le dégoût des propriétaires qui osent louer de tels taudis et des locataires assez cochons et inesthétiques pour les occuper.

Le midi n’offre rien de ce qu’on trouve dans le nord, c’est de la mauvaise literie à bas prix, des meubles d’infâme bric à brac, pas de batterie de cuisine, tout camelotte – quant aux courtiers de location, c’est la guerre au couteau, je te conterai les scènes vécues depuis hier – je crois avoir trouvé pour moi la « perle du littoral » - juste à ma pointure comme dirait un cordonnier. Seulement, le local en question est occupé ; les dames russes qui y sont ne partiront que mercredi 4 décembre, et, comme elles sont sales comme des Russes, je me suis entendu je me suis entendu pour faire tout lessiver et blanchir, rideaux, couvertures, rabattre les matelas, tout à neuf. Naturellement j’ai la certitude qu’aucun phtysique n’habita ce local depuis que la maison est bâtie – il n’y vient que des locataires coutumiers de diverses saisons, de Draguignan, de Londres, gens qui crèvent de santé – (prix pour 5 mois : 900 frs – au lieu de 1 200 -)

Je pense entrer « chez moi » vers la fin de la semaine prochaine et m’y installer de façon à y être tranquille, heureux et surtout laborieux – on ne peut souhaiter endroit plus chaud et plus soleillé, rien que la mer devant soi, les Maures à droite – Hier le Victor Hugo mouillait en rade, il a levé l’ancre à midi aujourd’hui.

J’ai écrit un mot aux Bertnay ; j’irai dès que le pourrai et aussi Rochard.

Je ne sais encore de quelle façon je dépenserai les 8 ou 9 jours sans logis – j’irai peut-être à Ste Maxime au Grand Hôtel où j’ai fait prix aujourd’hui de 12 ou 12 f par jour pour 2 personnes, avec chambre sur le devant au midi – je verrai demain l’hôtel d’Agay et peut-être, somme toute, préférai-je rester ici ma huitaine. Cet hôtel n’est pas mal ; la nourriture est supérieure à celle des meilleurs hôtels du pays, les chambres sont saines et ripollinées ; le seul ennui est la situation centrale qui donne le manque de vue.

Ma santé est excellente, je suis gai comme un pinson, très solide et il me fallut l’être pour ces deux journées de luttes pour locatis – je suis sûr, je sens que je retirerai le meilleur profit de mon hiver dans cette contrée de Paradis.

Je ne cesse de m’émerveiller de ce ciel, de ce soleil chaud et vivifiant de ces senteurs balsamiques, de ces fleurs qui poussent partout, à la stupéfaction de Louise qui se fleurit à toutes les clotures de roses qui vaudraient deux ou 3 frs pièces à Paris, de ces arbousiers qui sont chargés de fruits exquis – c’est vraiment idéal et je pense que quand on est libre comme je le suis, maître de son travail et de ses gains, il faut être idiot pour vivre dans la boue, la folie, le brouillard, le manque d’air, la saleté parisienne.

Je rentrerai sans doute à l’Alma du 8 au 10 avril pour préparer le bazardement de mes bibelots et mettre ma vie pratique en accord avec mes théories définitives et bien assises, mais dès que je serai libéré de mon appartement, je prolongerai l’hiver mon séjour ici de plusieurs semaines et ne rentrerai vers les ciels de suie qu’en mai au plus tôt.

Je te demanderai par la suite l’adresse du Père Ducreux.

J’ai vu la brave Mme Hugues. Quant au chef de gare pas encore – ce n’est point M. Lefèvre mais M. Droin – M. Lefèvre est mort il y a 2 ans – je connais tous les employés, mais petite vitesse est annoncée.

Je t’embrasse bien tendrement, mon bon chéri – te voilà bien renseigné et bien rassuré sur ton frérot.

 

Octave

 

Ecris moi poste restante St Raphaël, j’y ai tout centralisé et ça me donne le plaisir de voir ces aimables demoiselles des Postes.

 

[ref. ND.32][papier libre] Paris dimanche soir – Sans me relire.

 

Bien portant, mon chéri, malgré mes fatigues et tracas.

Je suis allé vendredi chez Ollendorff – Gil Blas, à la Cie Transatlantique où j’ai refusé de prendre passage sur le Jules Charles, car tout y était toujours comble, chez Maple pour mes inst[ructi]ons et autres courses urgentes – Hier, je fus chez Mercier au Fg St Antoine pour mobilier à voir et prix à savoir, chez Barbedienne choisir tous mes papiers pour St Cloud – etc., etc.

Mon logis est comparable à une arrière-boutique de bric-à-brac – j’ai tout mis bas – travaillant soir et matin – tout irait bien si je n’avais reçu ce matin une lettre de mon expert, reniant en son nom et au nom de cette fripouille de Couturier notre forfait et me déclarant que « cette affaire serait traitée aux conditions ordinaires, c'est-à-dire au prorata des frais dans lesquels sont compris les honoraires du commissaire priseur et des experts. Furieux, indigné, j’ai écrit à Tual dénonçant à cet ex ami l’ignoble conduite de ce Couturier, lui déclarant que j’étais prêt au scandale et à discréditer son étude tombée en si piètres mains, j’ai écrit à Lasquin et à Couturier pour leur déclarer que je ne me laisserais pas faire ce coup du père François, je me suis précipité chez Camille Ducreux, avocat sérieux pour lui demander une consultation, il était parti en auto – j’espère le voir ce soir ou demain – Bref je lutterai ferme et au besoin si je suis tenu à la vente que (sic) je donnerai que le fouillis, les babioles, décidé à discréditer, à atteindre ces fripouilles dans leurs intérêts.

Je garderai le Carriès, les belles pièces, le mobilier, etc. – Nous verrons bien – cette infâme m’aurait rendu malade – mais j’ai écrit un article sur Coppée pour la Dépêche pour me remettre d’aplomb, je viens de l’envoyer et ça va mieux.

Je ferai ce soir mes Echos de vente pour le Figaro, Gil Blas, Echo, Libre Parole et t’enverrai celui du Figaro.

Affectueusement – mon appartement est envahi par toute la famille de ma sous locataire – 6 enfants, une amie, etc.

 

Octave

 

[ref. ND.33][papier libre]

 

Mon cher Joseph,

Je dînerai samedi à Sèvres chez Cladel – Comme il faut nous voir et que je m’enferme dimanche pour essayer de me remettre au travail, viens déjeuner samedi matin à 11 h moins ¼ précises.

C’est dit, n’est-ce pas ?

Bien à toi et à demain matin.

Octave

 

Vendredi matin

 

[ref. ND.34][papier libre] (fragment incomplet ?) (1909)

 

J’ai appris par faire part la mort de Godebski 74 ans – enterré il y a huitaine – Pauvre diable !

Lancé un mot ce matin à Sarraut qui le trouvera à son retour sans doute – reçu aussi l’invitation au dîner du Pineau le samedi prochain – tu m’excuseras si tu y vas ou même si tu écris. Nous sommes 10 à 12 à l’hôtel – Brunet et sa femme sont encore à Fontainebleau, mais ça marche tout de même fort bien.

Ces notes écrites en simple bonjour, avant de sortir par un temps indiciblement beau – ma table est toute en or solaire et mes mains sont baignées de chaude lumière – je me sens si reposé, si heureux et paisible ! Si dépourvu de soucis, si dépris de ces horribles nécessités de vivre à Paris que j’apprécie chaque jour les bienfaits de ma nouvelle vie depuis deux ans et la claire vision que j’ai aujourd’hui des choses, des besoins réels, du peu qu’il faut pour vivre heureux.

 

[ref. ND.35][papier libre] (fragment incomplet ?) (1909) (probablement la suite du fragment précédent).

 

Quand tu auras ta bonne et seras paisible du côté servante, tu m’obligeras, comme tu te le propose de voir Alphonsine et de lui témoigner un peu d’affection et d’intérêt. Elle fut si bonne, si tendre, si vraiment dévouée pour moi, sans mots, sans phrases, avec une si rare simplicité, que je lui en suis profondément reconnaissant – c’est un cœur d’or et je suis très heureux de l’avoir – si je pouvais trouver ici un petit logis tout à fait à mon goût, et que sa mère soit partie pour un autre monde, je l’appellerais ici ou l’amènerais avec moi l’an prochain.

J’adore l’hôtel, j’y suis heureux et si libre, mais je suis devenu si amoureux de sobriété, de vie végétarienne le soir que j’ai trop de tentations de céder à mes appétits gloutons à table et ici la cuisine est trop tentatrice.

Cette pauvre chère Alphonsine serait aussi si heureuse de cette lumière et de cette tiédeur ! Je t’embrasse affectueusement et aussi Mme M.

Octave

 

[ref. ND.36][papier libre] (fragment incomplet ?)

 

Tu peux m’écrire lundi à Bayonne et mardi à Terminus Bordeaux (gare St Jean). J’ai reçu, en cours de route, un gros paquet d’épreuves de mon n° sur l’Egypte – 1650 lignes que je vais retourner d’ici à Sedeyn – octobre : c’est demain. Il faut aviser à la publicité – aussitôt mon retour je m’emploierai à en faire un peu si possible.

Si tu as conservé le n° du Temps du mardi 3 courant, prière de me l’envoyer – on me dit qu’il contient une reproduction de mon article de la Dépêche sur les aviateurs.

Mes amitiés et souvenirs à Mme M.

Bien affectueusement ton

Octave


(*) Source Fonds Y. Christ (1 J 780), Archives de L'Yonne, Auxerre. L'ensemble des lettres de la Correspondance entre Octave Uzanne et son frère Joseph (lettres d'Octave à Joseph uniquement) a été entièrement relevé par nos soins. Nous avons retranscrit l'ensemble que nous livrerons ici lettre par lettre. L'ensemble formera un corpus de 67 lettres pour l'année 1907, 95 lettres pour l'année 1908, 50 lettres pour l'année 1909, 22 lettres pour l'année 1910, 38 lettres de diverses années et 36 fragments ou lettres entières non datées, soit un ensemble de 308 lettres ou fragments de lettres. Notre projet arrêté dès fin 2012, début 2013, est de publier l'intégralité de cette correspondance avec notes explicatives. Espérons que nous pourrons mener à bien ce projet prochainement. La mise en ligne pour tous ici sera un premier pas permettant de juger au mieux de la relation fraternelle entre Octave et Joseph pendant les années 1907-1910, connaître l'intimité des deux frères ainsi que les pensées les plus intimes d'Octave Uzanne dans sa vie privée et publique. Mise en ligne Bertrand Hugonnard-Roche | www.octaveuzanne.com

LinkWithin

Related Posts Plugin for WordPress, Blogger...