vendredi 27 septembre 2019

"à mon excellente amie Mme Antoinette Wallgren en témoignage de haute sympathie d'art" dédicace d'Octave Uzanne (La Cagoule, Visions de Notre Heure, Choses et Gens qui passent, Paris, H. Floury, 1899).



Photo : coll. Bertrand Hugonnard-Roche

Envoi autographe d'Octave Uzanne :

"à mon excellente amie
Mme Antoinette Wallgren
en témoignage de Haute Sympathie d'art
Octave Uzanne"



sur : Visions de Notre Heure. Choses et Gens qui passent. Notations d'art,
de littérature et de vie pittoresque.

Paris, chez le libraire Henry Floury, 1899

1 volume in-8 broché. Tiré à 710 exemplaires.

Celui-ci, un des 650 exemplaires sur vélin teinté.

_________________


Antoinette Wallgren en 1903 (45 ans)


Antoinette Wallgren (1858-1911) était née Antoinette Råström, à Stockholm en Suède. Ses parents étaient graveurs de médailles. On sait peu de choses sur elle. Elle a d'abord étudié la gravure sur bois, puis est devenue sculptrice et décoratrice. Elle a sculpté des plaques de bronze et réalisé des bustes. Elle s'est ensuite tournée vers la décoration extérieure des livres en appliquant des techniques de mosaïque et de cuirs repoussés aux reliures. En 1882 elle avait épousé l'artiste sculpteur Carl Wilhelm ”Ville” Vallgren (1855-1940). 

Octave Uzanne avait découvert son talent de décoratrice de reliures comme l'indique cet extrait :

"Mme Antoinette Wallgren, élève statuaire de son mari, qui jusqu'alors modelait sans but déterminé de délicats bas-reliefs décoratifs sur cire, à peine effleurés de l'ébauchoir et cependant lisibles, s'est avisée, il y a deux ans, d'adapter son talent à l'orne- mentation des livres en obtenant, — sur une matrice en creux reproduisant l'empreinte exacte de son travail, — des cuirs repous- sés qui, après une légère coloration et une intelligente patine lui donnèrent des résultats inspirés. Déjà nous lui devons, pour les récits d'un matelot de Georges Hugo, une décoration marine très fine- ment indiquée; pour Les Yeux clairs, de Camille Mauclair, une plaquette d'un relief déjà plus accusé et d'un art plus subtil; pour le J. Camés d'Arsène Alexandre, une composition sur les arts du feu qui est largement interprétée et d une heureuse disposition, enfin pour la Vie de Notre Seigneur Jésus de James Tissot, Mme Wallgren a presque atteint à la maîtrise et tout nous fait espérer que nous pouvons attendre d'elle des décoration de reliures d'une grande élégance et d'une exécution chaque jour supérieure." (pp. 225-226, O. Uzanne, L'Art dans la décoration extérieure des livres, L.-H. May, Paris, 1898).

Curieusement l'exemplaire offert par Octave Uzanne à Antoinette Wallgren est resté broché, il l'est encore aujourd'hui en 2019, entre nos mains. Antoinette Wallgren n'a pas eu le temps ou n'a pas jugé bon de lui donner une couvrure artistique issue de l'expression de son talent. Octave Uzanne aurait certainement beaucoup apprécié.

Les envois autographes sur les livres d'Octave Uzanne adressés à des femmes, qui plus est à des femmes artistes, sont très rares. Nous n'en connaissons guère qu'un autre à Marguerite Moreno (actrice, épouse de Marcel Schwob) et un autre à Alexandra Laborde (modiste).

Bertrand Bibliomane moderne

mardi 17 septembre 2019

Octave Uzanne en transit malmené entre son estomac et son intestin. Extraits de la correspondance d'Octave Uzanne avec son frère Joseph (1907-1908)


Octave Uzanne (1851-1931)
ici âgé de 49 ans en 1900
(photographie prise à Ligugé dans la maison Notre-Dame chez J.-K. Huysmans)
A cette époque Octave aimait faire bonne chère, les repas mondains et le
parisianisme incessant n'aidant pas à être sobre sur la question alimentaire ...


Un jour nous avions écrit que nous traiterions de tous les sujets concernant Octave Uzanne, homme public, homme privé. Les informations que nous donnons aujourd'hui sont extraites de la Correspondance entre Octave Uzanne et son frère Joseph (conservée aux Archives Départementales de l'Yonne). Ce billet fait suite à celui-ci : 

Un envoi autographe qui en dit long : Octave Uzanne à l'anatomo-pathologiste français Charles-Joseph Bouchard (1837-1915) 


Le sujet dont nous avons choisi d'extraire les occurrences n'est pas forcément très romantique (voire carrément pipi-caca) mais les fonctions physiologiques humaines ne font-elles pas partie intégrantes de l'Homme, fut-il bibliophile ou homme de lettre ? Baudelaire était-il d'une nature constipée ? Qui saura nous le dire (et pourtant je pense l'information primordiale pour l'histoire littéraire).

Pour connaître un homme ne faut-il pas en savoir plus sur ce qu'on sait être aujourd'hui son deuxième cerveau : son intestin et son estomac ; en un mot son système digestif ? Voici donc relevées pour vous l'intégralité des mentions "estomac" et "intestin" qui se trouvent dans cette riche correspondance entre les deux frères, et ce durant les années 1907 à 1908. Octave Uzanne est alors âgé de 56-57 ans. Sa santé n'est alors pas vraiment au beau fixe. Nous avons élargi les citations d'extraits aux phrases relatives à son état de santé quand celui-ci était évoqué dans le corps des lettres où ces deux mots, estomac et intestin, étaient écrits.

Je sais très bien par avance que seuls les plus téméraires de mes lecteurs iront au terme de cette énumération gastro-intestinale détaillée mais néanmoins passionnante. Je les en remercie. Qui peut se vanter d'en savoir autant sur le transit de Balzac, Flaubert ou Zola ? 

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A propos de l'estomac d'Octave Uzanne


Barbizon, le 7 août 1907

[...] Ma santé s’améliore, bonnes nuits, nervosisme évanoui et constipation vaincue par lavements d’huile le soir. Je me promets bien d’éviter le plus longtemps possible les déconstipants près à l’intérieur. Même la bonne huile de ricin me mettait l’estomac à vif et me détraquait tout entier. [...]

Barbizon, le 13 août 1907

[...] J’ai reçu, du docteur Laffont, une lettre de 5 pages. lettre conseil sur mon état – c’est beau de sa part, lui qui jamais n’écrit – il y a de très bonnes choses et d’autres à dédaigner peut-être – c’est tout un régime quotidien – intelligent en somme et précieux en plus d’un point. Laffont me dit avec justesse que je n’ai aucune tare cardiaque et par conséquent que je n’en ai jamais eu – il me le jure – il ajoute qu’à notre âge ça ne bouge plus le cœur, et que si on a été indemne jusque là on est sûr de ne plus se donner de lésion avec une vie d’hygiène telle que la mienne – Il me confirme également l’excellence de mon estomac et me reproche seulement de l’avoir compromis par mon excessive complaisance à user d’une droguerie persistante – ce qui au fond est vrai. [...]

Barbizon, le 31 août 1907

[...] Ma santé incline au mieux, mes défaillances cardiaques et mes sensations nerveuses sont moins fréquentes ; je me sens solide et je vais, sans drogues aucune, à la garde-robe (*), ce qui est d’une importance primordiale, car la moindre pilule laxative me mettait l’estomac, le cœur, tout le système en état déplorable. Depuis 18 jours la nature seule, les fruits cuits, la boisson de houblon, etc, me font fonctionner très convenablement.

(*) aller à la garde-robe, aller aux toilettes en argot.

Barbizon, le jeudi 31 octobre 1907

Mon cher frérot,

Très bien portant – ma journée à Paris ne me fut pas fatigante, non plus que celle de la veille. Je me sens infiniment plus fort que jadis et vraiment reconstitué – c’est pourquoi, je compléterai la cure dans le midi, et, après, par un permanent plein air ; un intelligent potard (*) de la rue Richelieu m’a donné une solution chloroformique dont l’absorption de deux cuillerées m’a fait délicieusement disparaître ma terrible douleur pylorique dont je suis enfin délivré. Ce pharmacien me conseillait avec justesse d’absorber l’huile de foie de morue en plein repas de midi, afin de bien l’assimiler avec la nourriture – il déclare idiot le conseil des médecins d’absorber cette huile lourde le matin à jeun avec le 1er déjeuner – à midi et le soir au milieu du repas, aussi bien que les autres huiles – je trouve ça en effet pratique. Je me reposerai l’estomac et essaierai la semaine proche. [...]

(*) Potard, pharmacien en argot

Saint-Raphaël, le mercredi 4 décembre 1907

Mon bon chéri ; je vais m’installer demain jeudi chez moi 25 Bd Felix Martin, où tu pourras désormais tout m’adresser. Je ne suis pas fâché de quitter l’hôtel, non seulement parce qu’en ma chambre, je ne connaissais que le provisoire mais surtout parce que la nourriture excellente au début me semblait monotone et ruineuse pour l’estomac. Ces fritures, ces viandes mal rôties, toute cette cuisine de restaurateur ne saurait convenir longtemps à quelqu’un de délicat habitué comme moi à peu mais excellent. J’attends la reprise de mon régime de Barbizon avec impatience et je me défierai même de la table des Bertnay. St Raphael est pourvu de tout et le petit marché abonde en légumes, fruits, volailles, etc. J’ai déjà tout organisé : laitages, bois, pommes de pin, etc. [...]

Saint-Raphaël, le mardi 31 mars 1908


[...] Je me suis mis au lait dimanche pour me débarrasser l’estomac fort encombré, soit par la journée niçoise, soit par celle de Rochard. Maintenant je vais un peu vivre loin des amis. Je ne fais plus signe aux Bertnay, ni à Emile. [...] Je t’approuve de lâcher les dîners du soir - Dans les très grands jours, en mai et juin, ça peut aller encore, sans fatigue, mais s’exposer en hiver, sans raison valable, c’est inepte – Je me couche ici toujours vers 8 ½ à 9 et lis tant que je ne sens pas la fatigue – ces deux derniers jours ayant été fatigué d’estomac je me suis mis au lit à 6 ½ et à 7 ½ sans le moindre ennui, heureux de le pouvoir faire et de sentir mon indépendance à ces détails ; ainsi quel repos et quelle sérénité de pensée, de philosophie ! quel détachement de ces plaisirs si vides et si nuisibles ! de toutes ces sottises collectives qui sont la vie de tant de citadins. [...]


Saint-Raphaël, le jeudi 2 avril 1908

[...] Ma santé est bonne, mais je continue un régime demi lacté pour me remettre l’estomac qui depuis six jours fut nerveux, fécond en bâillements, en gaz, en éructations, en intolérance alimentaires. – je bois du quassia amara et comme j’ai du lait délicieux, et désormais plus aucun repas à accepter chez autrui, j’en profiterai pour me recaler tout cela – ça va déjà mieux. Je ne saurais te dire mon angoisse de songer à retourner à Paris d’ici 25 jours – Hélas ! tout arrive ; mais, je sens bien à quel point je me sens hostile à cette ville de cannibalisme, de lassitudes, d’égoïsmes collectifs, de laideurs morales, de ciels sales, de vanités et de sottises aveugles – Enfin, j’agirai pour régler mon exode et consolider mon indépendance. [...]

Saint-Raphaël, le lundi matin 6 avril 1908

[...] Ma santé est bonne, mais mon estomac fatigué malgré ma sobriété extrême – cela m’ennuie, car si peu que je dîne le soir j’ai souvent des digestions qui m’éveillent avec palpitations, sensations nerveuses généralisées et angoissantes – J’irai sans doute voir le Dr Bontemps cet après midi pour lui parler un peu de mon état général, très bon mais avec excès de facilité à me refroidir et à ne pas tolérer mes alimentations cependant délicates. Hier, pour une heure passée chez les Rouveyre le soir, cependant près du feu, je rentrai les mains glacées comme un mort et tout réfrigéré. Toutes les visites un peu prolongées me font cet effet – aussi j’en fais peu … mais toujours même résultat. [...]

Saint-Raphaël, le mardi 7 avril 1908

[...] Je fus hier voir le Dr Bontemps – j’ai causé un peu avec sa femme plutôt très sympathique et après quelques mots sur mon état général, il m’a fixé de me voir chez moi, le soir, à 4 h sur mon pieu. Cet homme a une toquade fixe qui lui fait voir de l’intoxication intestinale partout et quand même et des « tonnes de matières fécales accumulées dans l’intestin », après m’avoir brassé le ventre fortement il me déclara que j’avais des « matières considérables qui m’encombraient – Oh ! Molière ! ) – cependant mon ventre était souple comme un gant et nullement douloureux – Il m’ausculta cœur et poumons – résultat – vous êtes un ralenti – pouls 60 pulsations, insuffisance, donc insuffisance de flux sanguin dans les poumons, mauvaises fonctions générales … conséquences d’intoxications de l’intestin – d’où régime omnibus que tu connais : manger, boire de tout copieusement, exercice de promenade, pas plus, tous les jours le matin la cuillerée à café d’huile de ricin, puis lavage du rectum avec 100 gr. d’eau tiède – avec ça, tout doit disparaître – voilà pourquoi votre fille est muette – Je sais bien, moi, que je fais surtout de la stase pylorique, que tous mes gaz et ferments viennent de l’estomac qui les fabrique, etc etc, que j’ai de la dyspepsie nerveuse, etc etc, je vais toutefois essayer, en bon mouton, le fameux traitement que tu suis et a suivi ; mais je crains de devoir y renoncer d’ici peu de jours. Je serai toutefois consciencieux et te dirai ce qui en est – ce brave garçon est aimable, mais léger comme un feu follet … il était convaincu que tu avais eu le ventre ouvert et que, seul, il t’a mieux guéri que les chirurgiens – O ! Suggestion ! – je l’ai détrompé sur l’opération, mais peu importe, a-t-il dit … et j’ai compris qu’il préférait sa version et pour lui tu as été opéré, ça lui va mieux comme ça. Ah ! puis Vittel, Vittel pour moi ! Il n’y a que ça. [...]

Eaux-Bonnes (Pyrénées), Grand Hôtel de France, le jeudi 2 juillet 1908

[...] Les journées passent vite, calmes, sereines, aucunement accablantes de chaleur et cependant pas fraîches. Il me semble que je suis déjà un vieil eau-bonnais – je suis mon traitement avec ponctualité ; je ne fréquente personne à l’hôtel, mais je connais quelques braves gens du pays. [...] Je verrai le Dr papa Cazaux après midi – Je suis merveilleusement reposé, mes nuits dans un silence de désert son favorisées d’un vrai sommeil profond de bébé. Ce climat est sédatif – c’est remarquable comme repos – à l’hôtel la nourriture est délicieuse, saine, vraiment digne des délicats estomacs et gourmets – Je me couche le soir à 8 ½, et, le matin, la brave Marie, une vieille béarnaise de 48 ans m’apporte à 7 ½ mon café, très bien fait, et fait la causette – excellente femme conne toutes celles de ce pays de Béarn où se trouvent les derniers bons domestiques courageux, dévoués et gais. Je regrette de te savoir ainsi souffrant de l’estomac – Paris est une ville où il est si difficile de vivre en paix avec ses organes. Eté, comme hiver, on y souffre pitoyablement, car tout nous y blesse, nous y accable, le mauvais air, l’humidité, les senteurs, les poussières, les chaleurs anormales étouffantes, c’est miracle qu’on y résiste encore. Si j’étais resté à Paris, me dit ma grosse bonne Paliotte (de Pau), j’y s’rais claqué ! Monsieur, ça c’est sûr ! Certes elle a raison ! – Je m’applaudis d’aller vivre à St Cloud où je baignerai dans le silence, l’air vif, la quiétude, près ou loin de Paris, à ma convenance. [...]

Saint-Raphaël, 35, Boulevard Félix Martin, le mardi 2 mars 1909

[...] je me suis mis un peu au régime et malgré tout j’ai des troubles nerveux le soir, ou plutôt la nuit avant de pouvoir m’endormir et je n’ai plus ma belle ardeur des premiers jours sur le littoral. [...] Je resterai chez moi, m’observerai, et, si mes fatigues un peu cardiaques, qui viennent peut être de l’estomac, persistaient, j’irai voir le Dr Caldiquès ; mais, avec un peu de Valérianate et du calme alimentaire, j’espère en sortir bien vite. [...]

Saint-Raphaël, Hôtel Beau Rivage, le jeudi soir 4 mars 1909

[...] Ma santé est assez bonne, mais je la dois surveiller. J’ai eu l’estomac un peu surmené par les repas de Valescure, il me faut si peu de chose. Depuis dimanche je m’entraîne à ne prendre que le nécessaire et je tâche de reconquérir une langue propre, mais ça n’est pas facile – on se détraque plus vite qu’on ne se retape. [...] Je désire ronronner un peu chez moi, me soigner et ne me point fatiguer – à nos âges l’utilité de se dépenser n’apparait pas de toute urgence – on vit sur son capital de forces, on ne fait plus d’économies, il faut se ménager. [...]

Saint-Raphaël, Hôtel Beau Rivage, le dimanche 7 mars 1909

[...] Ma santé tout à fait meilleure. L’ordonnance du Dr Courchet me sera salutaire, je l’avais d’ailleurs prévue en m’ordonnant à moi-même frictions et infusions et Valérianate – La voici : le matin une affusion d’eau chaude à 38° - me recoucher après pendant une demi heure puis friction vigoureuse au gant de crin – avant le repas, 5 minutes avant – une cuillerée à soupe de phosphate de soude 6 g. – sulfate de soude 3 g. – eau distillée 200 g. – ceci pour favoriser le suc gastrique et préparer une bonne digestion – (tu pourrais essayer) – ne pas boire aux repas – après déjeuner un cachet de charbon végétal de 0,50 avec une infusion très chaude de « menthe verveine et oranger. » Je te recommande ce mélange d’infusion, il est exquis. Enfin, le soir, de la Valérianate d’ammoniaque et la recommandation de manger lentement et de mâcher longuement même les potages et les crèmes – ce que je m’applique à faire. En plus : rester allongé pendant ½ heure après les repas, tu vois que tout cela n’est pas trop bête. [...] ce n’est pas seulement sa nourriture et son estomac qu’il faut surveiller, c’est sa vie et son travail – il faut s’aérer, marcher quand même, faire manœuvrer ses muscles et se donner tous les soins d’hygiène nécessaire. [...]

[à partir de la mi-mars 1909 la santé d'Octave Uzanne s'améliore notablement, il envisage même des voyages en Italie et ailleurs en Europe. Il reste à Saint-Raphaël jusq'aux premiers jours d'avril. Il part ensuite pour Marseille (19 avril 1909) puis se trouve à Chambéry (25 avril 1909) d'où il fait halte à son retour de voyage (sans doute en Italie), puis il est de retour à Saint-Cloud Montretout 1e 16 juin 1909.]

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A propos de l'intestin d'Octave Uzanne


Saint-Raphaël, le 26 avril 1907 (matin)



[...] Ma santé est bonne ; j’ai du arrêter un jour mon huile de ricin, car je me sentais l’intestin tout à fait délabré – un peu de repos est nécessaire – je verrai le Dr Bontemps avant de m’en aller ; peut-être vendredi – J’ai fait préparer le mélange Ducreux, magnésie souffre ; j’en userai quelque nuit où je me réveillerais à l’heure congrue – on peut délayer dans l’eau froide, ce que je ferai. [...]



Barbizon, le 13 août 1907



[...] Je me sens de mieux en mieux – Le bromure a merveilleusement calmé mon état nerveux devenu sédatif et les compotes et fruits cuits ont régularisé les fonctions intestinales, sans autre aide. Je pense, j’espère que je me trouve en bonne voie de santé intégrale. C’est si bon de se sentir bien. [...]


Saint-Raphaël, 35, Boulevard Félix Martin, le mardi 7 avril 1908


[...] Je fus hier voir le Dr Bontemps – j’ai causé à un peu avec sa femme plutôt très sympathique et après quelques mots sur mon état général, il m’a fixé de me voir chez moi, le soir, à 4 h sur mon pieu. Cet homme a une toquade fixe qui lui fait voir de l’intoxication intestinale partout et quand même et des « tonnes de matières fécales accumulées dans l’intestin », après m’avoir brassé le ventre fortement il me déclara que j’avais des « matières considérables qui m’encombraient – Oh ! Molière ! ) – cependant mon ventre était souple comme un gant et nullement douloureux – Il m’ausculta cœur et poumons – résultat – vous êtes un ralenti – pouls 60 pulsations, insuffisance, donc insuffisance de flux sanguin dans les poumons, mauvaises fonctions générales … conséquences d’intoxications de l’intestin – d’où régime omnibus que tu connais : manger, boire de tout copieusement, exercice de promenade, pas plus, tous les jours le matin la cuillerée à café d’huile de ricin, puis lavage du rectum avec 100 gr. d’eau tiède – avec ça, tout doit disparaître – voilà pourquoi votre fille est muette – Je sais bien, moi, que je fais surtout de la stase pylorique, que tous mes gaz et ferments viennent de l’estomac qui les fabrique, etc etc, que j’ai de la dyspepsie nerveuse, etc etc, je vais toutefois essayer, en bon mouton, le fameux traitement que tu suis et a suivi ; mais je crains de devoir y renoncer d’ici peu de jours. Je serai toutefois consciencieux et te dirai ce qui en est – ce brave garçon est aimable, mais léger comme un feu follet. [...]


Saint-Raphaël, 35, Boulevard Félix Martin, le vendredi 17 avril 1908


[...] ma santé est bonne et j’éprouve grand bien de mes prises d’huile chaque nuit, me donnant des selles faciles et souvent fort odorantes, indiquant que l’intestin demande à être purifié – Je crois que les pilules du Dr Nepper sont à la longue intoxiquantes et nuisibles – il en faut trop prendre, tout cela doit faire un sâle mastic dans les boyaux. [...]


Dimanche 19 avril 1908 [non situé mais Saint-Raphaël]

[...] J’espère que ta santé est parfaite, mon intestin se vide, s’amollit, s’améliore, je crois, avec l’huile – J’irai voir le Dr Bontemps mercredi et le remercierai – je prends le ricin de 2 à 3 heures dans la nuit. [...]

Vendredi 24 avril 1908 [Saint-Raphaël]

[...] Ce docteur Bontemps est un bonhomme, mais d’une légèreté fabuleuse, il voit tout à la grosse, choses et gens et se montre optimiste sur tout – Sa toquade intestinale, heureusement, n’est pas mauvaise – il a pris une bonne formule sans avoir eu à l’inventer et c’est le pionnier des matières fécales, le terrassier des agglomérations intestinales. [...]

Caen, vendredi 14 mai 1926

Je vais bien sauf difficulté sombre à obtenir libération intestinale. (*)

(*) cette lettre sort du cadre chronologique annoncé mais traite du même sujet et montre qu'en 1926, soit quelque vingt plus tar, Octave Uzanne, alors âgé de 75 ans, subit les mêmes inconvénients de santé liés au transit intestinal.

Bertrand Hugonnard-Roche

mercredi 4 septembre 2019

Octave Uzanne cinglant avec la première grande publication de l'artiste-éditeur Georges Hurtrel (1881)



Octave Uzanne, Le Livre, compte-rendu des livres d'étrennes pour 1881



Octave Uzanne dans sa revue bibliographique Le Livre, dans la rubrique consacrée aux livres d'étrennes pour 1881, écrit :

"La Vie de sainte Catherine d'Alexandrie, publication par Jean Mielot, nous parait être la première publication de cet éditeur ; c'est une grand in-8, de belle apparence et dont le texte intéressant du secrétaire de Philippe le Bon, duc de Bourgogne, a été revu et rapproché du français moderne par l'érudit bibliothécaire à la Nationale, M. Marius Sepet. L'éditeur a développé un grand bon vouloir et a appelé à lui un nombre d'illustrateurs suffisant pour produire un chef-d'œuvre d'édition. Malheureusement le chef-d'œuvre n'a pas été exécuté et les horribles encadrements tirés en rouge missel sont lourds, disgracieux et du plus déplorable effet, les bois hors texte n'ont rien de remarquable et l'ensemble du volume, disons-le franchement, est irrémédiablement manqué. M. Georges Hurtrel nous pardonnera notre critique, avec l'assurance que nous n'avons aucun motif de lui être désagréable ; mais il est à regretter de voir se produire en France de grands ouvrages d'art qui font tache absolument par leur mauvais goût." (Octave Uzanne).

La messe était dite pour le critique Uzanne ! A vrai dire, nous aurions envie d'écrire la même chose plus d'un siècle plus tard, et ce pour la plupart des ouvrages édités par Georges Hurtrel : "Trop riche pour être pauvre. Trop pauvre pour être riche." En gros, si les éditions G. Hurtrel en imposent souvent au premier regard et peuvent faire illusion, elles n'ont, malheureusement, pas le fini des éditions d'un Léon Curmer ou d'un Albert Quantin. Le compte n'y est pas et l'ensemble donne toujours une impression de "cheap" (pour parler comme les winners). Alors même que les volumes Hurtrel se vendaient à des prix allant de 20 à 60 francs, beaucoup plus en grand papier, cela ne semble pas très judicieux. Néanmoins, ne soyons pas dupe, peut-être Octave Uzanne, en 1881, voyait-il en Hurtrel un nouveau concurrent sérieux pour la Maison Albert Quantin au sein de laquelle il écoulait ses propres productions artistiques et bibliophiliques pour les étrennes également.

Bertrand Hugonnard-Roche


Page de titre du livre incriminé par Uzanne.
Format in-4 28,5 x 21 cm

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