jeudi 26 juillet 2012

"Les Maîtres de l'estampe et de l'affiche. M. Georges de Feure." par Octave Uzanne. Article publié dans la revue d'Albert Quantin "Le Monde Moderne" (premier semestre 1898).



Lithographie de George de Feure pour Octave Uzanne.
Carte de voeux pour la nouvelle année 1897.
Cette lithographie a paru dans Les Programmes illustrés des Théâtres et des Cafés-Concerts. Menus, cartes d'invitation, petites estampes, etc., par Ernest Maindron [1896].
Apparemment cette lithographie de grande taille n'a jamais fait l'objet
d'aucune réduction pour l'impression d'une carte de voeux "au format".
Nous avons réparé ce manque puisque cette lithographie de de Feure orne
désormais nos propres cartes de visite imprimées
spécialement pour le blog Octave Uzanne.


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Nous vous proposons un article très intéressant publié dans la nouvelle revue "Le Monde Moderne" lancée au début de l'année 1895 par Albert Quantin, le complice d'Uzanne, celui de ses premières armes de revuiste avec Le Livre entre 1880 et 1889. Il donne au cours du premier semestre 1898 (janvier - juin) un article intitulé "Les Maîtres de l'estampe et de l'affiche. M. Georges de Feure." (*)

Geroges de Feure fut complice régulier des productions bibliophiliques d'Octave Uzanne. Au cours de l'année 1895 il composa la couverture de Feminies (publié en février 1896 pour les Bibliophiles contemporains). Il composa également la première couverture avec des fleurs dans les tons de vert pour le Dictionnaire Biblio-Philosophique (1897). C'est également de Feure qui dessina la carte de voeux d'Octave Uzanne pour la nouvelle année 1897. On voit qu'Uzanne avait tissé des liens assez étroits avec cet artiste pour lui demander à la fois sa participation aux oeuvres qu'ils souhaitaient publier pour ses co-sociétaires des Bibliophiles contemporains, mais également sa participation à ses propres oeuvres comme cette carte de voeux très personnelle.

Nous traiterons bientôt des autres articles qu'Uzanne donna pour Le Monde Moderne entre 1895 et 1902.

Bonne lecture,

Bertrand Hugonnard-Roche


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(*) Georges Joseph Van Sluÿters (6 septembre 1868 - 26 novembre 1943), alias Georges de Feure, est un artiste français de descendance hollandaise par son père et belge par sa mère. Il est né à Paris en 1868, mais la famille est obligée d'émigrer en 1870 lors du déclenchement de la guerre franco-prussienne. De retour à Paris en 1889, il s'établit à Montmartre et se joint à la Bohème parisienne. Son cercle d'intimes inclus les compositeurs Claude Debussy, Maurice Ravel et Erik Satie. Son œuvre picturale est définitivement inspirée par les poèmes de Charles Baudelaire et les romans de Georges Rodenbach. Dans les années 1890, il est reconnu par Puvis de Chavannes comme un des peintres les plus importants du mouvement symboliste français. Son œuvre est caractérisée par de nombreuses représentations de la Femme fatale, thème que l'on retrouve dans l'ensemble des œuvres du courant Art nouveau. Sa renommée comme peintre symboliste et son expérience comme affichiste pousse le marchand d'art Siegfried Bing à l'approcher afin de lui confier la réalisation de la façade du pavillon de l'Art nouveau à l'Exposition universelle de 1900 qui se tient à Paris. De plus, Bing confiera à de Feure la réalisation de deux intérieurs dans ce même pavillon. Les meubles qu'il conçoit pour le boudoir sont louangés par la critique qui y voit une représentation de la quintessence de l'art français. On vante leur délicatesse et leur grâce toute féminine. En 1900, G. Mourey de La Revue des Arts décoratifs les décrit comme « un des ensemble décoratif les plus exquis et parfait que notre époque ait créé ». Une grande rétrospective de son œuvre se tiendra en 1903 et voyagera de Paris à Hambourg et La Haye. Durant les premières décennies du xxe siècle, il continuera à créer des ensembles décoratifs (évoluant du style Art nouveau vers le style Art déco), il créera une compagnie de construction d'aéroplanes et s'intéressera à la confection de costumes et de décors pour le théâtre. En février 1942, suite à une longue maladie, il demandera au ministère des Beaux-Arts d'acquérir deux de ses tableaux pour la collection nationale, ce qui lui sera refusé. Il meurt le 26 novembre 1943 dans le Paris de l'Occupation. (Wikipedia)

mardi 24 juillet 2012

"La Locomotion Future" texte d'Octave Uzanne et illustrations d'Albert Robida (article publié dans la revue éditée par Albert Quantin "Le Monde Moderne" (Janvier 1895).


Nous vous proposons un article très intéressant publié dans la nouvelle revue "Le Monde Moderne" lancée au début de l'année 1895 par Albert Quantin, le complice d'Uzanne, celui de ses premières armes de revuiste avec Le Livre entre 1880 et 1889. Leur amitié ne semble pas s'être démentie entre temps puisqu'il donne ici, dès le premier volume (Janvier à Juin 1895 - pages 103 à 114), avec la complicité de son ami Albert Robida (*), un article illustré de premier ordre intitulé "La locomotion future".

Je vous laisse savourer ce texte d'essai et d'anticipation. Nous traiterons bientôt des autres articles qu'Uzanne donna pour Le Monde Moderne entre 1895 et 1902.

Bonne lecture,

Bertrand Hugonnard-Roche















(*) nous renvoyons le lecteur au site internet des Amis d'Albert Robida.

jeudi 19 juillet 2012

Article intitulé "Vacances en Forêt de Fontainebleau" publié par Octave Uzanne dans Le Briard (Provins) Journal de la Démocratie du mercredi 17 juin 1914.

                
On pourrait dire sans trop se tromper qu’Octave Uzanne a donné son avis à peu près sur tout ! Il a très tôt donné son avis sur les femmes, l’amour et le mariage. Le goût des beaux livres, des belles éditions bien illustrées, des reliures d’art, l’ont entrainé à écrire plus d’un chapitre sur la dilection bibliophile. Ses collaborations diverses et variées dans de très nombreux journaux, des plus prestigieux (Le Figaro, l’Echo de Paris, la Dépêche de Toulouse, etc.) aux plus humbles feuilles locales ou thématiques (L’Auto-Vélo, Le Briard, etc) nous donnent un aperçu encore flou mais d’ores et déjà très vaste de toutes les opinions qu’il aura pu émettre entre la fin du XIXe siècle et 1931, année de sa mort. Ainsi, c’est bien souvent au détour d’une feuille méconnue qu’Octave Uzanne, brave pourfendeur des opinions trop bien reçues et défenseur de toutes les indépendances, se dévoile dans l’intimité de ses pensées.

                Le 17 juin 1914 était un mercredi. Octave put se relire en première page d’un journal local : Le Briard, Journal de la Démocratie. 28eme année – Numéro 45. En avant-dernière colonne de première page, un titre : Vacances en Forêt de Fontainebleau. Signé Octave Uzanne. L’article est assez long, il occupe une colonne pleine page et le haut de la colonne suivante. Lisons donc ensemble cet article que seule la chance nous a permis de retrouver.

Vacances en Forêt de Fontainebleau

                Bien que le soleil ait été maussade, feutré de nuages gris, et que la température se soit montrée froide et réservée, à l’image d’une prude, les deux jours de Pentecôte ont été fêtés par l’exode prodigieux de quelques centaines de mille de citadins vers les campagnes environnantes. La gaieté des banlieues fut timtamaresque. Les sylvains en manches de chemise, les oréoles printanièrement chapeautées, les silènes évadés des bistros, les nymphes étoffées d’une cape à la mode apportèrent dans la paix des bois des clameurs inhumaines et une fièvre inaccoutumée. Parmi l’encadrement des taillis, sous la voûte harmonieuse des futaies, l’être civilisé ne semble point sentir la douceur de vivre dans le silence éloquent de la nature, ni recueillir en une âme rassérénée la profonde volupté que peut y verser la beauté des choses.
                Ayant fait choix, comme reposoir verdoyant de cet incomparable musée de rochers, de halliers, de grottes, de glorieux chênes ou hêtres ancestraux, de champs de bruyères et de fougères, de bocages opulents et de chaos pittoresques qu’est la grande sylve de Fontainebleau, je pus me demander pourquoi l’homme des villes, aussitôt momentanément délivré de ses laborieuses servitudes, apporte tant de soucis à gâter l’heure des souveraines béatitudes champêtres.
                Pourquoi cette pitrerie en commun, ce goût de saccager les ramées, ce besoin de pousser des cris perçants, de gesticuler, de chanter d’ineptes refrains de music-halls et d’apporter dans le solennel recueillement de la forêt, des vociférations, des vocalises égosillées, des dysphonies effroyables, des braillements enroués et des hurlements étranglés à plaisir ? On dirait que la paix des arbres les inquiète, les trouble, les indigne, ces citoyens libérés, qu’ils en perçoivent l’enseignement et que, loin de se laisser aller à communier avec ce religieux silence, ils se révoltent contre son intensité et veulent profaner l’auguste grandeur de la création en se refusant d’écouter ce qui s’éveille doucement dans leur sub-conscience.
                Quelques-uns montrent de l’entrain, de la jeunesse et, dans la bataille amoureuse des baisers, quelque dévergondage agréable au dieu Pan. En observant leurs rires émus, les demi-taciturnités qui précèdent les humaines tendresses, je me répète ces jolis vers des Fougères que Remy de Gourmont vient de publier dans un remarquable recueil de poèmes intitulé : Divertissements.

O Forêt, toi qui vis passer bien des amants
Le long de tes sentiers, sous les profonds feuillages ;
Confidente des jeux, des cris et des serments,
Témoin à qui les âmes avouaient leurs orages.

O Forêt, souviens-toi de ceux qui sont venus
Un jour d’été fouler tes mousses et tes herbes,
Car ils ont trouvé là des baisers ingénus,
Couleur de feuilles, couleur d’écorces, couleur de rêves.

Mais en dehors des jeunes couples frivoles qui laissent le désir.

Fleurir, ardente fleur, au sein de la verdure,

                Quelle désharmonie entre les évadés de Paris et l’entente cordiale des choses. La beauté symphonique du décor forestier ! Nos citadins ont conservé vis-à-vis de la nature l’état d’esprit que leur prêta Paul de Kock et Pigault-Lebrun. Ils n’ont point l’âme rurale et, violateurs du silence rustique, ils veulent témoigner avec fracas de leur ivresse d’être libérés des géhennes coutumières.
                On en voit, cependant, de plus pacifiques et même de très mesurés dans une classe moins boutiquière et plutôt bureaucratique. Ils semblent soucieux, affairés, renfrognés. Ils sont munis d’un appareil photographique, d’une boîte verte d’herboriste ou d’un petit livre, sorte de guide Dennecourt qui les renseigne sur ce qui doit les faire palpiter d’émotion ou d’admiration vis-à-vis des sites les plus célèbres.
                A leur sécheresse d’allure, à leur mine de contention toute pédagogique, à leur incuriosité des mélodies d’orchestre la grande forêt, à leur oubli du chant des oiseaux ou des larges frissons du feuillage des hêtres, on reconnait les victimes d’une éducation de serre chaude. Ce sont des étudiants ou savants à lunettes, dames respectables ou sévères, demoiselles aux pâleurs lymphatiques chez qui trop de manuels, trop d’examens, trop de brevets et de méthodes ont fini par dessécher le naturel et par détruire toute aptitude au bonheur. Sous ces futaies où s’exhalent toutes les ivresses de la forme, de la couleur, où se jouent les rayons et les ombres, où naguère, Théodore Rousseau, François Millet et Diaz plantaient leur chevalet, ils ne cherchent point des émerveillements instinctifs, des émotions d’art, des leçons de pittoresque, ils repèrent des noms à des arbres.
                Tel un pédant armé de la férule, les administrateurs de la forêt ont peint en bleu sur le grès des rochers ou sur l’écorce des chênes et des bouleaux, hêtres et charmes, un alphabet instructif et réglementaire comme le doivent faire tous les bons ronds de cuir. Les lettres correspondent à des noms de baptême accordés aux ancêtres de la forêt, sinon à des bouquets d’arbres, à des rocs à figure symbolique, comme le Q, ô pudeur ! qui offre l’apparence d’un accroupissement humain. Voici parmi les géants le Racine, le Ponsard ; la Fornarina, l’André Gill, le Briarée, le Francisque Sarcey, et pour désigner d’autres lieux : le Bilboquet du Diable, l’Anneau du Chasseur noir, la Baignoire de Diane. Une petite étoile peinte en bleu prévient qu’il faut admirer. Halte ! fixe ! les yeux à quinze pas … Vous êtes au bel endroit, au chef d’œuvre de nature qui mérite la valeur des gammes chromatiques des Ah ! Ah !
                Bons élèves, ces promeneurs en vacances, mornes et craintifs, facilement suggestionnables, s’acharnent à leur pensum ave ponctualité. Dans leur docilité ils épèlent tous les b a ba des merveilles qui distinguent ce paradis terrestre catalogué à outrance et qu’on visite, guide en main, comme une pinacothèque ou une glyptotèque de pays du Nord ou comme les galeries de peinture de Hollande ou d’Italie.
                Tout en faisant la part du tempérament français volontiers braillard et en reconnaissant que le citadin vulgaire s’amuse d’autant plus qu’il fait davantage de bruit, nous devons admettre que l’art de dépenser élegamment et esthétiquement ses loisirs d’apprend par la pratique, comme l’art de dépenser son argent. Il faut en avoir été largement muni de l’un et de l’autre pour en comprendre la science économique. Ceux qui n’ont jamais longuement approché dans l’intimité la bienfaisante et discrète nature, ne peuvent comprendre son langage ni chuchotter des causeries confidentielles à voix basse avec elle. Il faut être en état de grâce après une intelligente cohabitation familière aux plaines, prairies, bois, vallées, champs de culture et montagnes, pour interpréter idéalement ce que disent les arbres, ce que chantent les ramures, ce que dégagent les parfums des plantes, ce qu’exprime le murmure des sources. Les pauvres diables qui gueulent le font souvent pour s’étourdir et par dépit de n’avoir pas le temps d’écouter.

Octave Uzanne

                   Octave Uzanne habite depuis quelques années déjà dans son appartement de l’avenue de Versailles à St-Cloud ; et même s’il s’est éloigné de Paris, il n’en reste pas moins un citadin. Certes ses escapades en France et à l’Etranger sont fréquentes. Uzanne est voyageur ; il a 63 ans en 1914.
                   Nous avons la chance d’avoir en mains une lettre de son ami Remy de Gourmont (dont les vers sylvestres sont cités dans cet article) non datée mais que nous avions daté par recoupements vers 1914. Gourmont écrit : « Je suis très content cher confrère ami, que la forêt vous fasse du bien. » L’évocation et les dates concordent. Uzanne avait des amis du côté de Fontainebleau, à Bourron-Marlotte exactement. C’est sans doute à l’occasion d’un séjour « à la campagne » qu’Uzanne eu l’idée d’écrire cet article. Il ne semble pas qu’il y eut d’autres collaborations avec le journal Le Briard.

Bertrand Hugonnard-Roche

mardi 17 juillet 2012

Article intitulé "Un grand dégoûté (J.-K. Huysmans)" publié par Octave Uzanne dans la Dépêche de Toulouse le 16 mai 1907.

Article intitulé "Un grand dégoûté (J.-K. Huysmans)" (1) publié par Octave Uzanne dans la Dépêche de Toulouse le 16 mai 1907. Huysmans venait de mourir (12 mai 1907), c'est dire la réactivité avec laquelle Uzanne publia ce papier rempli d'émotions.

Un grand dégoûté.

Celui qui, repose aujourd’hui dans l’éternelle paix et qui détient peut-être la clé de ce mystère de l’au-delà dont, malgré sa foi, s’intrigua sa vie, l’écrivain naturaliste-mystique, Des Esseintes, Folantin, Durtal, fut, en tous ses avatars, un constant pituiteux. On peut dire qu’il traversa ce monde, comme d’autres, passagers sensibles traversent l’Océan, le dégoût persistant au coeur et la nausée sans cesse aux lèvres, prête à fuser.    

 Fils, de petits bourgeois et consciencieux fonctionnaire dans un ministère où le Rond-de-cuirisme lui avait révélé jusqu’à quelle bassesse de plafonnement intellectuel peut s’abaisser dans l’entresol des vulgaires l’habitat de la pensée humaine, J.-K. Huysmans s’était, de bonne heure, familiarisé aux spectables d’existences médiocratiques et vides d’idéal. Il n’en avait point autrement souffert et avait, au contraire, apporté à l’étude de tous ces petits mondes d’indigence cérébrale une ardente curiosité d’écrivain naturaliste novateur décidé à rompre avec toutes les niaiseries des écoles romatico-sentimentales. Mais déjà, il s’écoeurait de la sottise ambiante, analysait les oeuvres et les actes des écrivains en renom avec des hoquets de dégoût, jugeait la société lamentable et fétide, et, avec sa douceur de-blond déraciné de Hollande, ses gestes las et mous, il triomphait dans les jeunes cénacles, en noyant délibérément dans ses déjections de sincère dyspeptique moral tous les faux dieux des temples littéraires à la mode.

 Je le connus, il y a longtemps, bien longtemps, en compagnie de son inséparable de ses débuts, Henry Céard, vers 1879, alors qu’il ne songeait qu’à faire mordre à l’eau-forte de son style ses premiers Croquis parisiens ou à pimenter son Drageoir à épices, recueil de pages colorées et d’éloquentes natures mortes. Il avait stylisé le hareng-saur en ces termes, qui sont encore dans ma mémoire et où sa manière littéraire est assez bien synthétisée: "O miroitant et terne enfumé, quand je contemple ta cotte de maille, je pense aux tableaux de Rembrandt, je revois ses tètes superbes, ses chairs ensoleillées, ses scintillements de bijoux sur le velours, noir, je revois ses jets de lumière dans la nuit, ses traînées de poudre d’or dans l’ombre, ses éclosions de soleil sous les noirs arceaux!"

 Huysmans était, ce qu’il demeura toujours, un causeur placide, au débit plutôt lent, à l’accentuation vaguement parigote et grasse. Aucune impétuosité, aucune ardeur de diction, nulle véhémence. Son langage s’imageait d’argot, se complaisait aux vocables contempteurs d’origine sexuelle, ceux, que jette au passage Colignon à ses confrères on que grasseye naïvement le Marseillais en belle humeur. Ces mots de la rue, il les sortait avec douceur, il les faisait encore plus émollients, — en les enduisant du crachat de ses mépris et il les distribuait avec une inlassable générosité à ses plus notoires contemporains. Il n’y avait en ces procédés aucune pensée mauvaise, nourrie d’envie, et pas le moindre désir de prendre place dans l’assiette au beurre des grosses légumes des lettres. Il n’était ni méchant,ni ambitieux, ni arriviste. Le monde, les salons, les plaisirs bêtes, publics ou privés, pour lesquels les hommes dressent leur vanité en éventail et s’efforcent aux travaux lucratifs, tout cela lui semblait ridicule, stupide et indigne de s’écarter d’un chemin de droiture et de vérité. Il raillait ses camarades qui s’étaient laissé prendre à la glu de la mondanité et il les jugeait perdus dans ces machines pneumatiques que constituent les dîners, soirées, garden-parties ou invitations de châtelains. 

 Mais Joris-Karl Huysmans, dès ses débuts, n’admettait que l’art pour l’art, la religion du beau, la vie conventuelle fleurie de rêves, avec le culte de la perfection. Sa vision était aigu, ses délicatesses super-sensibles ; il scrutait tout le mauvais goût des oripeaux de la mascarade parisienne ; il voyait nettement les tares, les lâchetés, les servitudes, les fades complaisances vis-à-vis du public de tous les décrocheurs des timbales du succès et sa conscience, plutôt que sa poche à fiel, éprouvait le besoin de se dégorger, d’expectorer, de vomir, pour tout dire, les dégoûts accumulés.

 Il apportait, dans ces lâchers de sputations et ces expectorations, un esprit, une drôlerie pittoresque et incomparable, et son verbe, qui rejetait choses et gens au dépotoir, s’accentuait du glossaire de Rabelais, de Vadé et autres maîtres scatologues. Avec lui, c’était le tout à l’égout ruisselant d’adjectifs colorés. Il y avait plaisir à l’entendre jeter ses rancoeurs à la voirie par-dessus les bastingages des convenances sociales. Le jour où il signa, son petit ouvrage, A Vau-I’Eau, où il apparaissait méticuleusement exprimé sous les traits du héros, M. Folantin, petit employé, célibataire inappétent, flatulent, difficile à nourrir, ayant parcouru tout le cycle des falsifications culinaires des restaurateurs de quartier, et trouvé à toutes choses la même saveur de frelaté et la même senteur de pourri, il découvrit l’angle le plus exact, le plus aigu de sa personnalité. Cette sorte de Physiologie du Dégoût est, à mon sens, son livre synthétique. L’auteur de Marthe (histoire d’une fille) ou des Foules de Lourdes, ces deux oeuvres de début et de fin de sa carrière d’écrivain, fut toujours, toujours et encore M. Folantin, désabusé, inquiet de tout, anxieux d’autres choses, écrasé par l’ennui des perpétuels recommencements dont se compose le morne tissu de l’existence aux yeux de certains.

 Il fut Folantin dans le naturalisme, quand il écrivit cette tranche de vie des Soeurs Vatard, où on le retrouve en pleine jeunesse, alors qu’il gérait, rue de Sèvres, au rez-de-chaussée de la maison qu’il habitait, un petit atelier de brochure que lui avait légué son père. Dans En Ménage et En Rade, il folantinise, c’est-à-dire il s’agite dans ses lassitudes, ses détresses morales, les piperies des relations féminines; dans A Rebours même, c’est encore l’être à Vau-l’eau, cherchant à s’évader du vulgaire, du connu, du ressassé des choses et aboutissant à ce néant qui faisait dire à d’Aurevilly: Après cela, l’écrivain n’a plus qu’a choisir entre une balle de revolver et le pied de la croix.

 Huysmans s’affala aux genoux du Rédempteur, mais Durtal, son nonveau héros, curieux de mysticité et néo-converti, c’est une manière de Folantin changeant par dégoût de restaurateur moral et qui ouvre la porte de l’Eglise avec quelque perversité d’abord, avec sincérité peu après. Dans Là bas, dans En Route, dans l’Oblat, le taedium vitae se fait jour; la sérénité béatifique, l’extase heureuse n’ont pas eu raison des répugnances de M. Folantin: — le chercheur, n’entre pas en religion comme dans du beurre, comme écrirait Durtal, il s’attarde aux aigreurs du petit lait.

 Tous les naïfs qui demandent aux amis du regretté écrivain les raisons réelles de sa conversion ne l’ont pas lu, l’ont mal lu, ou ne l’ont point compris. Le, grand dégoûté alla du Diable à Dieu, de l’auge à l’autel, d’un mouvement nerveux et logique comme font les malades inquiets qui, aux heures insomnieuses, virent de gauche à. droite, et cherchent la position la plus confortable pour fixer le sommeil. Désemparé, n’ayant plus ni estomac équilibré, ni organes favorables au plaisir, las des curiosités satisfaites dans les bouges et les bas-fonds sociaux qui longtemps l’intriguèrent, noyé dans l’insipidité et la maussaderie des relations courantes, découragé de tout, saoul de médiocrité ambiante, il se mit à fuir les lumières crues à la façon des Lycanthropes; la pénombre des églises l’accueillit. Il crut y trouver un apaisement, mais Folantin-Oblat ne put se passer de Paris; il le quitta en l’exécrant, dans un bondissement nauséabond du coeur, mais avec quel plaisir y revint-il, sans même insister sur le plaisir qu’il avait d’y réinstaller ses pénates!

 Je fus, jusqu’à ces deux dernières années, où il se terra davantage dans la souffrance et la résignation, un fidèle ami de J.-K. Huysmans. Il m’ouvrit volontiers sa vie et sa belle intelligence, et je crois y avoir lu largement et sans hypocrisie. Je ne pense pas mal servir sa mémoire en le montrant, en cet article hâtif, au lendemain de sa mort, tel que je le compris et sentis, tout en m’extériorisant hors de ses croyances, qu’il n’essaya jamais, d’ailleurs, de faire partager à ses amis. Nul ne porta et n’exprima l’ennui de vivre avec un plus démonstratif pessimisme et ne chercha avec autant d’àpreté les avatars intellectuels qui peuvent ici-bas s’offrir aux grands désabusés. Mais le coeur de l’hagiographe de sainte Lidwine de Schiedam fut à la hauteur de l’esprit et du talent de ce rare lettré. Sa vie, dont il exprima mais ne rechercha point l’originalité, fut toute dévouée à l’art, et, si sa conclusion s’ennoblit par le martyre physique, saintement supporté, on peut dire qu’à aucune époque de son calvaire de dégoûté il ne montra jamais la moindre défaillance morale et ne sacrifia rien au public, à la réclame, au désir du gain ou à la popularité. Sa probité littéraire reste souverainement pure.

dimanche 15 juillet 2012

Article intitulé "Forces cosmiques" publié par Octave Uzanne dans la Dépêche de Toulouse le 25 septembre 1929


Article intitulé "Forces cosmiques" publié par Octave Uzanne dans la Dépêche de Toulouse le 25 septembre 1929. Octave Uzanne est âgé de 78 ans lorsqu'il publie cet article des plus étranges. 

Forces cosmiques (1)

 Voilà déjà trente années que je collabore à cette Dépêche libéralement ouverte aux idées et scrupuleusement respectueuse des opinions de ses collaborateurs. Je m’y sens, aujourd’hui, installé ainsi qu’un patriarche bavard dans une famille de lecteurs bienveillants. J’ai reçu de ceux-ci, au cours de ce début de siècle, nombre de lettres souvent fort intéressantes et toujours agréables par leur tour l’esprit ingénieux et alerte. Je ne crois pas toutefois en avoir reçu aucune qui m’ait donné un envol intellectuel vers des zones aussi élevées que celle qui me parvint, il y a deux mois, signée d’un vieux Toulousain, vivant obscur et isolé dans son labeur, rue Saint Léon, plus ambitieux de faire connaître ou prévaloir ses idées dans une voie pratique et de les voir vulgarisées, que d’en tirer vanité, réputation, honneurs ou fortune.

 M. Frédéric Dufourg (2), tel est son nom, a sans doute trouvé, dans mes menus écrits, cette avide curiosité de multiples connaissances et qui m’a si constamment tenu, jusqu’à ce jour, en bel appétit de vivre afin de mieux nourrir mes goûts de savoir. Mon caractère de doute, de scepticisme, de volonté suivie de n’admettre lue la relativité de toutes vérités et de chercher le contrôle des valeurs, si fréquemment surfaites, par le truquage publicitaire de l’opinion, l’a peut-être incité à me révéler les lumières successivement découvertes par ses travaux qu’il poursuit en solitaire depuis 1892. L’ensemble de ses études sur les Forces Brutes de la matière des trois règnes et sur tous les phénomènes de l’Univers, par les Forces Intelligentes, doit former deux volumes, à peu près au point. L’auteur, toutefois, n’estime pas que le moment soit encore venu de cette publication révolutionnaire, qui nous ramène aux prodiges rigoureusement scientifiques des initiés de l’Antiquité, dont l’enseignement était oral. Il exprime, sans forfanterie, la conviction d’avoir vaincu le mystère, le miracle, le surnaturel, en découvrant les propriétés intimes de l’atome formatif de la matière universelle de notre monde. Cet infiniment petit atome, bien que si puissant, constitue la Force Brute originelle dont M. Frédéric Dufourg déclare avoir codifié les lois par lesquelles, à l’exemple de la nature, il parvient à matérialiser les corps solides, liquides, gazeux et jusqu’aux fragments minuscules de toutes les pierres précieuses avec la multiplicité de leurs couleurs. Il se fait fort, également, de liquéfier les Forces atmosphériques improprement dénommées : Electricité. Il explique ainsi, avec expériences décisives à l’appui, la formation de la terre, ses origines, ses Forces Brutes et la cause de ses phénomènes : Rotation, lévitation, translations, transformations et, notamment, sa conservation par matérialisation de molécules centrifuges, produites par décomposition de sa matière et par matérialisation des molécules centripètes de recomposition des corps évanouis. – Est-ce compris ?

 « Je fais donc, m’écrit M. Dufourg, la preuve matérielle que les matériaux atomiques de notre planète n’ont pas de fin et que ce qu’on prétend être la fin de la matière est un recommencement sans fin de la matière impérissable. La terre est un organisme vivant, formé de deux hémisphères d’inégale puissance. Elle est un aimant. L’animal est un aimant accusé par les deux hémisphères du cerveau. Le végétal est un organisme développé sur graine, faite de deux hémisphères cotylédonaires. Il est également un aimant. « Il y a donc analogie de conformation dans les trois règnes formés de Forces Brutes atomiques. Il est naturel qu’ils soient soumis aux mêmes lois, puisque la terre fournit au végétal et à l’animal les matériaux d’édification que les transformations alchimiques, explicables, changent de nature, mais sans modifier les lois qui les dominent. Dès lors, les phénomènes des trois règnes s’enchaînent sous l’empire des mêmes lois, à la différence que si la terre se répare et se suffit, le végétal et l’animal peuvent s’affaiblir et s’anémier, tout comme les aimants permanents qu’une transfusion d’énergie vitale, une réaimantation régénère, en leur donnant le maximum de vie attractive et de force moléculaire. » Cette transfusion est faite avec une énergie de nature végétale ou animale, c’est-à-dire avec un calorique de la nature de l’organisme à réparer, à renforcer, à régénérer. Il est facile de déduire de cet exposé les formidables conséquences que les découvertes de ces admirables Forces naturelles apporteraient dans le domaine des richesses agricoles et dans la reconstitution de l’animalité et de la conservation de la bête humaine actuellement livrée aux méfaits de la chimiatrie pharmaceutique médicamenteuse. Je suis un bien misérable physicien, et dans le département des sciences en général, mon rôle ne saurait être que très effacé ; mais les théories de mon correspondant, qui s’adressent à ma raison et qui font revivre en moi des conceptions qui me furent chères sur l’égalité des trois règnes de la nature, m’apparaissent saines, logiquement assises sur des bases que l’Antiquité avait déjà établies.

 Frédéric Dufourg ne saurait donc, à mes regards, prendre figure de visionnaire, de rêveur ou de déséquilibré. Ses travaux et ses expériences sont contrôlables et renouvelables à son gré. Il voulut bien me faire l’honneur de me proposer d’assister aux résultats qu’il peut obtenir sous un rigoureux contrôle pour faire naître méthodiquement de l’énergie végétale des fleurs semées en pleine terre et aboutissant à leur épanouissement floral au bout de cinq jours. Pour de tels résultats, il sait donner aux graines leur maximum de force attractive. Il peut même, en moins de deux heures, obtenir la dématérialisation d’une plante vivante et sa rematérialisation sur sa graine. Ce n’est pas de la sorcellerie, ce sont des faits acquis sans thaumaturgie aucune. Pourquoi, le principe des Forces Brutes étant semblable pour l’animal que pour le végétal celui-ci ne pourrait-il pas être également, en vertu des mêmes lois, régénéré, invigoré, reconstitué par une méthode analogue. Les initiés n’opéraient certes pas autrement jadis, en se servant des Forces atmosphériques faites d’atomes en liberté. On pourrait réparer un corps vivant, rétablir l’équilibre de vie d’un organisme désorienté en leur transfusant les éléments qui ont contribué à leur formation et qui recomposent la substance soumise à la décomposition permanente.

 Le génie grec, et plus particulièrement le surprenant philosophe et physicien Héraclite, admettait déjà toutes les lois reconstituées et élargies par le remarquable Toulousain dont je résume ici les travaux. Il faudrait citer des pages et des pages de ce grand compatriote des illustres Milésiens, Thalès et Aristide, pour témoigner, une fois de plus, qu’il n’y a vraiment rien de nouveau sous le soleil. Le remède universel, selon M. Dufourg, l’unique et infaillible remède de la matière universelle de notre monde, c’est l’atome minéral, végétal et animal, qu’il faut savoir capter, condenser et distribuer méthodiquement. Voilà ce que successivement et progressivement, ont révélé à ce génial et obscur travailleur de Toulouse, l’étude primordiale de l’organisme planétaire, de l’organisme végétal plus évolué, de celui de l’animal, donc de l’être humain qui est l’œuvre quintessenciée de la création. A l’égard des Forces Intelligentes sans cesse en activité dans l’univers, ce vrai maître ès sciences n’est pas moins précis et formel, car il fait la preuve matérielle de la Force Intelligente qui dirige les Forces Brutes dans toutes les actions de la machine humaine, tout comme un wattman interchangeable, Force Intelligente impulsive, dirige la machine dont il a la conduite. Ce qui semble étrange, à vrai dire, c’est que de telles révélations n’aient pas encore préoccupé le groupe soi-disant d’élite que nous nommons les hautes sphères du monde scientifique, et que M. Frédéric Dufourg n’ait pas encore été conduit au Capitole de la gloire. C’est là un sujet peut-être assez moliéresque et qui mériterait sans doute une nouvelle causerie. Elle serait assez peu agréable à l’entendement des pontifes officiels des Instituts. C’est une raison pour que j’y engage quelque jour mon esprit d’indépendance.

               Octave UZANNE.


(1) Cet article a été reproduit en tête de l'ouvrage de Frédéric Dufourg publié en 1932 seulement (Uzanne est mort le 31 octobre 1931), précédé de ces quelques lignes : "Sur le rudimentaire jalonnement des Forces Brutes des trois règnes que je lui en donnai en 1927, après douze années d’attente patiente, le profond penseur Octave Uzanne en exprima son enthousiasme dans un article qu’il publia, le 25 septembre 1929, dans La Dépêche de Toulouse, sous le titre FORCES COSMIQUES." Vient ensuite la reproduction in extenso de l'article donné par Uzanne. A la suite de l'article reproduit, Frédéric Dufourg donne ces quelques lignes d'explications :  "Les découvertes par lesquelles l’auteur de ces travaux a percé tant de mystères de la Nature frappèrent Uzanne qui avait fait des études solides sans parvenir à sortir des, ténèbres qui l’encerclaient. Il avait fouillé les écrits des philosophes grecs et il était allé dans l’Inde espérant y trouver un rayon de lumière, que son ignorance de la Physique intéressant l’évolution des Forces Brutes en mouvement perpétuel ne lui permettait pas d’apercevoir. Il ne lisait pas dans le livre de la Nature parce qu’il n’en connaissait pas les caractères alphabétiques par lesquels on apprend à syllaber avant de lire. Mais le principe sur lequel repose la Trimurti hindoue – la Trinité – faite de Brahmâ, créateur, Çiva, destructeur et Vishnou, conservateur et fécondateur, trois Forces éternelles en activité perpétuelle sur notre planète et dont je lui expliquai le mécanisme par l’action des Forces Brutes, cette Vérité lui ouvrit définitivement les yeux et satisfit sa raison, parce que je le faisais ainsi remonter à l’origine et à la cause de toutes les Choses, de tous les prodiges, de tous les mystères, de tous les miracles. Octave Uzanne me remercia de ce que je l’avais sorti du chaos, et il insista avec force pour que je l’autorise à publier, dans un quotidien, les points essentiels de mes résultats, en respectant l’opinion de Gaston Bonnier que je me réservais de faire connaître ultérieurement. Assez encensé pour le modeste résurrecteur que je me sais des Forces de l’Univers, utilisées par les initiés de l’Antiquité qui en instruisaient les foules, je m’abstins de faire savoir à Uzanne que je me traitais en vue de dissiper la presbytie dont j’étais affligé depuis trente ans. En effet, par transfusion méthodique de l’énergie terrestre de nature spéciale, par charges de molécules curatives centrifuges dont il est parlé dans ce livre, j’ai pu me guérir de la presbytie, car depuis plus de deux ans, je lis et j’écris sans lunettes malgré mon grand âge : Le miraculé que je suis pour ceux qui croient au surnaturel n’est qu’un bénéficiaire des Forces Brutes émanées de la matière planétaire, Forces savamment distribuées par les Initiés et les Prophètes, savants de l’Antiquité, que l’on divinisait en raison de leurs prodiges, comme on sanctifie et on immortalise, en nos temps d’ignorance, ceux dont on perpétue la mémoire. Je ne suis qu’un modeste chercheur désintéressé et sans autre mérite que celui de publier les résultats de mes recherches pour en instruire les générations futures. Quel que soit l’accueil réservé par la présente génération à ce livre, tiré à mille exemplaires, mon œuvre d’inlassable chercheur est désormais impérissable. Le temps fera le reste. Et si je meurs avant l’heure, mes enfants publieront le second volume de cet ouvrage : Les Forces Intelligentes."

(2) Frédéric Dufourg, Alchimiste (c'est tout au moins tel qu'il s'auto-désigne et qu'il signe ses écrits). Ce qu’il fait, ou mieux ce qu’il a fait à maintes reprises, dit-il, et devant témoins, c’est, jonglant avec les forces brutes de la Nature : de faire sortir et pousser à son gré et à son heure, soit les racines seules, d’une graine, soit la tige seule ; décupler par simple régénération des semences les rendements des, végétaux ; réduire jusqu’au vingtième le temps nécessaire à la croissance des plantes ; renforcer ou redonner, quand elles l’ont perdue leur odeur aux fleurs ; modifier à son gré les couleurs des dites fleurs ; rappeler à la vie des arbres morts ; accomplir enfin et telle que l’accomplissaient les anciens, la palingénésie des plantes. Ces « miracles », il les obtient grâce à un double fluide, un fluide blanc et un fluide rouge qu’il tire et condense, celuici de la terre, celui-là de l’air.

samedi 14 juillet 2012

Index des articles publiés par Octave Uzanne entre 1899 et 1930 dans la Dépêche de Toulouse (mise à jour permanente).


Octave Uzanne a collaboré pendant plus de trente ans à La Dépêche de Toulouse, de 1899 à 1930 au moins. Nous cherchons à établir la bibliographie complète des articles publiés. Articles touchant à presque tous les sujets, de l'art aux moeurs en passant par quelques portraits d'auteurs disparus. Comme on le verra ci-dessous, il n'hésita pas à toucher quelques sujets sensibles comme la guerre, l'alchimie et les forces cosmiques, etc. Nous compléterons ce billet au fur et à mesure de nos découvertes. Par ailleurs, chaque fois que ce sera possible, nous vous donnerons lecture de ces articles dans les colonnes de ce blog.

Articles publiés dans la Dépêche de Toulouse :

- Modernités : La Jeunesse littéraire méridionale et les Idées en marche (12 novembre 1899) 
- Toulouse-Lautrec (16 septembre 1902)
- Poètes de notre heure (6 mars 1903)
- Moeurs des Diurnales (19 septembre 1903)
- L'ingénieuse publicité (28 décembre 1904)
- Maxime Gorki, l'annonciateur de la tempête (17 août 1905)
- Joris-Karl Huysmans : Un grand dégoûté (16 mai 1907)
- M. Spoelberch de Lovenjoul (21 juillet 1907)
- Le Voyage de Montaigne (28 novembre 1908)
- Causeries : Des livres (25 janvier 1909)
Deux écoles : le futurisme, le primitivisme (14 mars 1909)
- Petites villes d'Italie (2 avril 1909)
- Les Salons (4 mai 1909)
- Notre époque : Casanova (1er mai 1911)
- Casanova (26 janvier 1912)
- Jean Lorrain (26 juillet 1912)
- L'Esprit d'origine étrangère : Bernard Shaw (26 février 1913)
- La pudeur envahissante (11 mai 1914)
- Aiglon ou Aiglonne (19 mai 1914)
- Nietzsche et la Guerre (11 octobre 1916)
- Écrits sur la guerre (27 février 1917)
- Un Diogène Théocrate (17 novembre 1917)
- Le Front des Spéculateurs (2 décembre 1918)
- Un dandy stoïcien (17 février 1922)
- Titre inconnu (sur la morale, la société, etc) (28 février 1926)
- Hommes et choses : Marcel Schwob (3 mars 1927)
- La maîtrise du génie (30 avril 1927)
- Le Fémini-Masculisme (Rachilde) (27 mars 1928)
- Forces cosmiques (25 septembre 1929)
- Le Théâtre faisandé (21 mai 1930)

Articles dont nous n'avons pour le moment relevé que le titre sans en connaître la date exacte de parution :

- Les représentations en plein-air de La Mothe Saint-Héraye
- Marchandise littéraire
- Idiopathies littéraires

A suivre ...
Bertrand Hugonnard-Roche

lundi 9 juillet 2012

Petit pamphlet anti-photographique par Octave Uzanne (1897).

Dans son Dictionnaire Bibliophilosophique, typologique, iconophilesque, bibliopégique et bibliothechnique à l'usage des Bibliognostes, des Bibliomanes et des Bibliophilistins, imprimé pour les sociétaires de l'Académie des Beaux-Livres, Bibliophgiles contemporains, achevé d'imprimer le 14 octobre 1897, à l'entrée ILLUSTRATION, Octave Uzanne, polybibliographe et philologue comme il se définit lui-même sur la page de titre de l'ouvrage, développe en quelques lignes son avis tranché sur l'influence de la photographie dans l'illustration des livres (1).

Octave Uzanne photographié par Nadar (vers 1890)
Après avoir écrit qu'une Histoire de l'illustration des livres restait à faire ; que l'illustration bibliophilique était alors en pleine révolution, bien que cadrée par les contraintes liées à la technique typographique même (la forme rectangulaire du livre, la pagination, le système de brochage ; Uzanne écrit :

"Nous avons été le premier à montrer, avec les publications successives de l'Eventail et de l'Ombrelle, vers 1881, l'art de s'évader avec fantaisie des dogmes étroits de la typographie et, depuis lors, combien nous ont imité sans paraître vouloir nous reconnaître comme un prédecesseur."

Vient ensuite les quelques lignes anti-photographiques :

"L'illustration aura cependant à lutter contre son ennemie masquée, la photographie et l'imagerie directe, calquée sur nature à l'aide de procédés chimiques. On tentera un gros effort pour acclimater dans le livre moderne l'exacte fixation des êtres et des choses, mais sans succès, espérons-le.
L'art ne vit que de mensonges, d'irréalité, d'envolée au dessus de la vie courante. La photographie est pesante comme le bon sens, ennuyeuse comme la logique et la vérité ; elle donnera toujours des images mornes, trop précises, grises, mélancolieuses comme des rappels brutaux à nos ambiances d'existence ; elle ne peut et ne doit être que l'intermédiaire entre la nature et l'art ; c'est une proxénète, ce ne sera jamais une jeune première idéale. Même dans les romans les plus vulgaires, elle ne saurait être admise comme moyen absolu d'illustration car les mises en scène de personnages sont toujours insuffisantes de pose, de sincérité, d'expression."

Uzanne termine :

"Plus l'Illustration restera spirituelle, dégagée, traitée d'un trait amusant et décisif, en manière de croquis, plus elle aura la chance de réussir, à la condition qu'elle ne suive le texte qu'approximativement, en le paraphrasant de loin, tels les pizzicati du musicien accompagnant la sérénade.
Nous croyons aussi au mariage de plus en plus intime du dessin et de la typographie. Le livre tel qu'on le comprit longtemps avec ses hors textes d'une exécution si facile, si banale, si bête, ne sera bientôt plus toléré par les amateurs de goût ; le livre à encartage d'estampes a fait son temps.
Ce que le texte épousera, ce sera la taille-douce, le bois, la chromotypo et mieux encore la litho, si douce, si flexible, si vaporeuse, si femelle à côté des nettes vigueurs mâles de l'impression typographique. Ce sera par la fusion des procédés qu'on reformera peu à peu le caractère de l'Illustration contemporaine."

A notre connaissance seuls deux ouvrages publiés par Octave Uzanne ont bénéficié de la photographie comme illustration. Le premier publié à la fin de l'année 1893 est son guide touristique Vingt jours dans le nouveau monde. De Paris à Chicago. (Paris, May et Motteroz, 1893), on y trouve en effet parmi les 175 dessins de l'ouvrage quelques reproductions photographiques en noir et blanc. Le deuxième est son Histoire de la locomotion publiée en 1900 dans lequel on trouve à la fin, pour l'histoire de la locomotion moderne (automobile et tramway) quelques photographies. Uzanne a toujours banni par ailleurs la photographie de ses publications.

Bertrand Hugonnard-Roche

(1) pp. 232-234

jeudi 5 juillet 2012

Propos d’un indépendant – Théâtre contemporain, par Octave Uzanne (juillet 1905).


Propos d’un indépendant – Théâtre contemporain, par Octave Uzanne[1].

            On parle beaucoup de la crise théâtrale. Elle ne s’explique hélas que trop aisément.
            Jamais les auteurs dramatiques n’ont affirmé autant de prétentions à apporter sur la scène française des sensations directes de vie sociale, des visées philosophiques ou humanitaires et jamais, je le crains bien, ces prétentions ne furent aussi peu justifiées. Le théâtre[2] tient encore chez nous une place excessive. Je sais bien que c’est un de nos articles d’exportation dont nous tirons quelque profit moral et beaucoup de fierté, mais je persiste à croire que nous valons infiniment mieux par le renom de nos savants, de nos historiens, de nos philosophes, de nos polygraphes, de nos romanciers et même de nos journalistes que par la valeur intellectuelle de nos amusements dramatiques. Il est bien permis de discuter l’apport que font à notre patrimoine national des hommes qui accaparent si aisément la place dans tous les trains rapides filant sans arrêt vers le succès et l’éphémère gloire et qui connaissent, du jour au lendemain, les flatteries de la célébrité et les sourires moins décevants de la fortune.
            Il faut un an et souvent bien davantage pour écrire un livre qui se tienne, disait, - ou à peu près, - le grand Balzac ; une pièce de théâtre au contraire, réclame quelques semaines voire quelques mois et produit beaucoup plus de publicité favorable à l’auteur même avant qu’elle n’ait été jouée. Que faut-il être pour hésiter à se donner soit au livre soit à l’art dramatique ? Un imbécile, ajoutait Balzac[3], selon la conception des gens de boulevard qui n’arrivent à comprendre que l’œuvre interprétée ; un homme de génie, diront d’autre part tous ceux qui pensent combien est généralement supérieur l’ouvrage livresque, mûri, sérieux, documenté qui atteindra l’individu et demeurera incompris de la collectivité. Depuis les temps déjà lointains où l’auteur de la Comédie Humaine exposait cette opinion, le théâtre a considérablement accru son importance à Paris et, par répercussion, dans toutes nos provinces. Les auteurs dramatiques se sont multipliés beaucoup plus qu’on ne suppose, car pour un heureux auteur qui voit enfin et finit par accaparer le feu de la rampe, plus de mille fabricants de tragédies, de drames, de vaudevilles, de scénettes attendent avec d’évangéliques patiences les moyens de se produire et n’y arriveront, pour la plupart, assurément jamais.

* *
*

            Qu’y a-t-il de bon, de médiocre ou de chef-d’oeuvral dans tous ces laissés-pour compte des productions dramatiques d’inconnus ou de méconnus ? Qui le pourrait dire ? Peut-être bien infiniment plus de pièces remarquables que parmi celles qui sont jouées chaque soir avec un déconcertant succès. Nous ne pouvons juger que des comédies qui, actuellement encore, tiennent l’affiche avec les noms des derniers arrivés, lesquels sont les virtuoses et les monopoleurs des triomphes à la mode. Je veux parler des principaux fournisseurs attitrés de nos premières scènes parisiennes, sans qu’il soit nécessaire de les prendre individuellement à parti.
            Franchement, à juger des choses sans engouement ni esprit de coterie, on s’explique assez mal la faveur persistante avec laquelle sont accueillies telles ou telles pièces récentes de ces auteurs qui règnent aujourd’hui pour ainsi dire tyranniquement sur toutes les scènes de la capitale. Les œuvres qu’ils nous donnent n’ont assurément point la valeur puissante[4], la vigueur littéraire, l’ingéniosité théâtrale, l’originalité de thèse, l’élévation de verbe et d’action pour tout dire qui se rencontraient dans les œuvres d’Emile Augier, d’Alexandre Dumas fils ou de Sardou, non plus que l’alacrité d’esprit, la drôlerie bien française, la malicieuse observation par quoi excellaient les vaudevilles joyeux de Gondinet, de Labiche, de Meilhac et Halévy. Quant au vieux Papa Scribe, cet Ingres du dessin scénique, qu’il est de bon goût de blaguer aujourd’hui, d’autant plus aisément que ceux qui se gaussent de son œuvre ne l’ont jamais lue, quant à ce merveilleux compositeur d’imbroglios dramatiques qui ont noms Une Chaîne, la Camaraderie, Bertrand et Raton ou Bataille de Dames, on peut être sûr qu’il ne saurait davantage être mis en comparaison avec les menus producteurs favorisés de notre heure. Les héros de ses pièces étaient moins exceptionnels, de plus noble origine morale et la vie qui circulait impétueuse dans ses scénarios valait à coup sûr l’action médiocre ou le dialogue amoral, inquiétant et désabusé de nos chefs-d’œuvres actuels.

* *
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            Un professionnel du théâtre étranger qui est plutôt cosmopolite et voit les choses avec bon sens et justesse, me disait récemment : « Vos pièces modernes commencent à nous déconcerter tant à Londres qu’à New-York ; nous n’y retrouvons plus votre admirable logique jointe au piquant de votre esprit et à votre art de nouer une intrigue pour la dénouer après, peu à peu, fil à fil, jusqu’à un dénouement agréable et curieusement amené. Vos œuvres qui semblent avoir encore tant de succès sur vos Boulevards ne supportent plus aussi aisément l’exportation et je dirai même que, pour ma part, je n’éprouve point le même plaisir à les consommer sur place, c’est-à-dire à les entendre et voir interpréter par leurs créateurs. Sur vos scènes originales, m’expliquerez-vous cela ?
            Quelle explication pourrait-on donner, à moins que de reconnaître un état relatif des choses théâtrales qui, espérons-le, n’est que transitoire. Il y a davantage d’eau claire, je veux dire de vains papotages drôlement dialogués, que de talent et d’esprit de marque dans les stupéfiantes comédies du jour qui vont aux nues avec un minimum d’action, d’intrigues, de types à caractère et de scènes dramatiques. On dirait que moins c’est touffu, plus le cerveau du spectateur en éprouve d’aise et de soulagement. Cet intellect public demande plutôt à être frôlé que pénétré.
            Le spectateur moderne ne veut-il plus avoir à penser, à juger, à se passionner ? Ne cherche-t-il pas plutôt à opérer sa digestion sans aucuns efforts intellectuels, très confortablement, en écoutant des choses qu’on lui affirme être excellentes et d’un faiseur de bonne marque qui ne saurait tromper. On le pourrait croire, tant il est docile en apparence aux succès qu’on lui impose et qu’il paraît s’empresser aussitôt de consacrer. Mais il ne faut pas trop s’y fier et son acquiescement est plus spécieux que réel. D’ailleurs l’art théâtral se corse de tant d’autres intérêts aux yeux de certain public. Pour les femmes il y a les robes de Mlle X…, les coiffures de Mlle Y…, l’originalité artistique des décors, pour les hommes, la beauté piquante ou perverse de ces dames, le chic fashionable des jeunes premiers, sans parler des musiques de scène. Puis, avant tout et surtout, la nécessité s’impose socialement d’avoir vu la pièce à succès et de pouvoir en parler. Qui dira les éléments qui compensent la réussite superficielle d’une pièce de théâtre à Paris !

* *
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Il n’en demeure pas moins démontré que notre vieux théâtre français s’anémie par la tête[5]. En dehors des intéressants spectacles, parfois de premier ordre, qui se donnent longue carrière au Théâtre Antoine, et plus rarement aux Français, le reste, qui passionne surtout les soireux et le monde spécialement boulevardier, ne vaut à mon sens que par la réclame : on nous monte plus ou moins le job sur les auteurs à la mode qui ne sont trop souvent que faiseurs de mets à viande creuse. Les étrangers sont aussi bien en droit que nous-mêmes de se demander la raison qui porte nos critiques à crier au chef-d’œuvre chaque fois que nos nouveaux auteurs promus aux plus mystérieuses gloires procréent quelque pièce nouvelle qui décèle une indigente ou démoralisante imagination, une vision sociale plutôt déplorable et faussée, moyenne, et des facultés théâtrales pour le moins médiocres. Lorsque d’ici dix ou vingt lustres, quelques un de nos petits neveux à esprit fureteur et mystificateur s’efforceront de s’intéresser à ce qui nous passionnait au début de ce vingtième siècle, ils seront sans doute ahuris de constater combien peu nous fûmes difficiles dans nos distractions intellectuelles, et ils riront de nous, comme nous pouvons aujourd’hui rire des admirateurs passés de Colin d’Harleville, de Dancourt, de Fagan, de la Chaussée, de Berquin, de Bruys et Palaprat.
            Notre temps si fertile en évènements, si pittoresque dans l’évolution des mœurs sociales, si drolatique au point de vue des thérapeutiques nouvelles, des phobies sanitaires, des agiotages de toute nature, serait digne d’alimenter la verve et l’observation d’un nouveau Molière qui répudierait comme d’abusifs moyens scéniques l’éternel adultère ou les monotones expositions du concubinat[6]. Il n’y a qu’à regarder autour de soi pour concevoir ce que pourrait être le théâtre satirique contemporain, le théâtre sain, moralisateur, vigoureux, de haute expression française, théâtre de généralisation flagellant gaiement les ridicules présents, revenant à la vieille formule du Castigat ridendo mores[7] et ne s’abâtardissant pas dans l’anecdote graveleuse, la peinture des vices d’exception ou la complaisante analyse des personnages tarés ou des milieux décadents[8].

                                                                    OCTAVE UZANNE.


[1] Publié dans la petite revue Les Arts de la vie, n°19 de juillet 1905 (tome IV). Rédaction et administration Chaussée d’Antin Librairie Larousse dépositaire, Paris. Revue paraissant le quinze de chaque mois sous la direction de Gabriel Mourey. Le premier numéro de cette revue parait le 15 janvier 1904. Elle naît, en effet, non seulement de l'union d'écrivains et d'artistes qui souffrent de voir leurs convictions les plus chères méconnues ou dédaignées, mais des aspirations du grand public intellectuel qui réclame depuis longtemps un organe sincère, indépendant, de libre discussion, où règne, au lieu du mensonge intéressé, la vérité loyale et courageuse. Les Arts de la Vie ne sera pas plus une revue de vulgarisation qu'une revue de spécialisation. Elle sera vivante avant tout et reflétera tous les aspects de la vie contemporaine. C'est assez dire qu'au lieu de s'adresser à quelques-uns seulement, à cette prétendue aristocratie dont on s'est trop préoccupé jusqu'à ce jour de satisfaire les goûts, elle entend s'adresser à tous et provoquer enfin la cohésion de toutes les forces saines et fécondes – aujourd'hui dispersées, faute de discipline, - sans le concours desquelles l'évolution des arts ne peut suivre ses voies normales. Donc, il ne s'agit point de flatter le public et de se mettre complaisamment à sa remorque ; au contraire, de le guider en l'éclairant. (source http://livrenblog.blogspot.fr/2011/01/les-arts-de-la-vie-1-2-3.html ). Uzanne ne participa pas aux numéros 1, 2 et 3. Nous n’avons pas trouvé de collection complète de cette revue. A priori il y a eu au moins 21 numéros soit deux années d’existence (1904 et 1905).

[2] A noter qu’Octave Uzanne n’a jamais écrit ni publié de théâtre sous son nom, privilégiant toujours le roman ou la nouvelle sur l’art dramatique. C’est un genre qu’il a toujours soigneusement évité. Il faudrait lire les comptes rendus des pièces jouées ou publiées entre 1880 et 1889 et dont il rend compte personnellement dans la revue bibliographique Le Livre. C’est une étude à faire.
[3] Uzanne prend Balzac pour témoin. Il omet cependant de signaler combien Balzac dût au théâtre dans la propagation de son œuvre. Même si le théâtre n’est pas le mode d’expression le plus utilisé par Balzac, il s’en sert pour gagner vite l’argent qui lui manque toujours. Le théâtre s’écrit vite. Il en usera au début de sa carrière comme à la fin, même s’il ne connut pas le succès dans cette voie. Le Nègre (1823), L’école des Ménages (1839), Vautrin (1840), Les ressources de Quinola (1842), Pamela Giraud (1843), La Marâtre (1848), Mercadet le faiseur (1851).
[4] Uzanne n’a pas reconnu tous les talents, il s’est parfois (souvent) trompé quant à ceux qui survivraient à la postérité. Son esprit paradoxal, oscillant sans cesse entre désir de modernité et conservatisme moralisateur, ne lui a sans doute pas permis de reconnaître les grands noms de la littérature et de la scène.
[5] « Les travaux de ses contemporains, leurs préjugés, leurs snobismes, leurs erreurs, Octave Uzanne s’en amuse ou s’en attriste ; plus souvent il s’en moque. » in Revue politique et littéraire, Revue Bleue, 1912, vol. 50, p. 128.
[6] Cette pique est sans conteste adressée à Georges Feydeau (1862-1921) et ses vaudevilles alors très en vogue. Feydeau, en 1905, a déjà publié et fait jouer de nombreuses pièces usant de « l’éternel adultère et (des) monotones expositions du concubinat. »
[7] La comédie châtie les mœurs en riant.
[8] Uzanne n’a pas toujours été aussi hostile aux milieux décadents fin de siècle. Nombre de ses amis d’alors en faisait partie.

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