vendredi 2 novembre 2012

Une lettre de Félicien Rops (10 août 1886) qui cite trois fois Octave Uzanne. Octave Uzanne boîte aux lettres parisienne de Félicien Rops.

Nous tenons à remercier ici la Librairie ancienne Trois Plumes (Benoît Galland) pour nous avoir permis de reproduire ci-dessous la très belle lettre autographe de Félicien Rops à un destinataire resté inconnu à ce jour (catalogue Librairie ancienne Trois Plumes - octobre 2012). Cette lettre nous intéressait car le nom d'Octave Uzanne y est cité trois fois. Le "bon Octave Uzanne" comme le décrit Félicien Rops dans cette lettre datée du 10 août 1886 par une main anonyme, est, en effet, présenté ici, comme la boîte postale de Félicien Rops à Paris. A cette période, on écrivait à Rops "chez Uzanne" au 72 (bis) rue Bonaparte." On y envoyait aussi l'argent dont Félicien Rops avait toujours le plus grand besoin. Le correspondant de Félicien Rops est ici un ami intime, mais que nous n'avons pas réussi à identifier. Peut-être un érudit Ropsien saura-t-il nous dire à qui Rops s'adressait lorsqu'il écrivait "Mon vieux complice (...)".

Bonne lecture.

Bertrand Hugonnard-Roche
Benoît Galland (Librairie Trois Plumes)


Mardi 3h [note au crayon : 10 août 86] (*)


Mon vieux Complice, je comptais te voir demain, mais Arents m'a prié de venir lui donner des nouvelles indications, & puis le bon Edmond Picard m'apportait des planches !! Je suis parti à 11 heures, & je retourne dans une heure là-bas. Donc je n'ai pas espoir de te voir avant ton endormissement. Voici de quoi nous devions causer ensemble. J'ai un tas de dessins en marche, plus deux nouveaux en train à la Roche Claire. Il me faudra dans une huitaine de jours mardi 17 la somme de 250 frs mettons 300. Je voudrais te faire parvenir les dessins ou du moins les soumettre à ton appréciation avant de demander cette somme à Jullien ? As-tu quelqu'un ici chez lequel je puisse remettre ces dessins ? Il y a entr'autres le frontispice de Cladel & le portrait de Baudelaire "refait" qui sont deux bonnes choses, m'est avis. Puis : Mors & Vita & le Joyeux Hermaphrodisme que tu connais & qui représentent chacun cent frs, - pour toi.


Tu m'écriras et tu m'enverras les sommes à l'adresse du bon Octave Uzanne, soit lettre chargée, ou autrement, si tu as des sommes à m'envoyer. Donc : tout ce que tu as à me dire, dis le moi jusqu'à ton retour par Octave Uzanne, il saura ou je perche, car je compte faire des suites des plus ténébreuses ! & dès lundi !! "aimer & travailler" dit la Sagesse des Nations. Ah! Dis moi encore si à Gerville, je peux t'écrire tout ce que j'ai à t'écrire ou si je l'écris : poste restante à Fécamp. Il y a souvent toutes sortes de choses à ménager lorsqu'on n'est pas à Paris. Réponds moi, tout de suite & adresse : à Mr Octave Uzanne 72 rue Bonaparte & sur une seconde enveloppe pour remettre à Mr Félicien Rops, il a mes instructions. Encore un mot : il est entendu que si tu ne pouvais pas voir les dessins & si l'un d'eux ne te plaisait pas, nous ferions un échange & voilà tout. Je te préviens de tout cela parce que pendant les mois d'août & de septembre je compte faire "un fort coup de chien" A toi mon cher ami & reviens le plus tôt possible en ce vieux Paris. FR [Félicien Rops].


(*) Cette lettre mériterait l’ajout de notes explicatives que nous n'hésiterons pas à ajouter à posteriori en fonction de l'état d'avancée de nos découvertes ou des informations que l'on voudra bien nous communiquer. Les nom d'Uzanne a été mis en gras dans le texte pour le faire ressortir dans le contenu de la lettre. Les soulignés sont de la main de Rops.

3 commentaires:

  1. Cette lettre provient d'une collection dont un autre courrier était adressé à Eugène Rodrigues. Il est donc possible qu'il soit ici aussi le destinataire.

    A priori, vu la période de la lettre et le fait qu'il demande de l'argent, il s'agit probablement d'un des personnages suivants : Detouche, Haraucourt, Uzanne, Rassenfosse, Liesse, Gérardin et Rodrigues.
    Uzanne est bien entendu écarté ici.

    De plus, Rodrigues est un collectionneur assez précoce de l'oeuvre de Rops. Il publia un Catalogue analytique et descriptif de l'oeuvre gravée de Rops en 1897.

    Personnellement, je penche pour Rodrigues, mais je continue les recherches

    Benoît Galland

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  2. F.R semble être intime avec son correspondant ; je dirais que cette missive était adressée à Léon Dommartin, qui utilisait le pseudonyme de Jean d'Ardenne.

    Rops l'interpellait dans ses lettres "mon vieux..., mon cher vieux,...." et avait des rapports plus que cordiaux avec lui. Léon D., lui, parle de Rops comme son "complice en mainte affaire criminelle"

    Ce Léon, était le dépositaire pour des cuivres ou des ses paquets encombrants, et servait d'intermédiaire auprès des collectionneurs et des libraires-éditeurs belges.
    (in Duprilot, Gay et Doucé, p.110)

    D'autres exemples de lettres, non datés (comme souvent avec F.R) :
    "A toi vieille branche, ton vieux truc Fély", ou "Hé bien mon vieil, que devient la mère Doucé ?"
    (du même ouvrage, p.154)

    F.R ne semble pas du tout avoir été famillier avec son avocat-collectionneur, Maître Rodriguez

    Pouêt Pouêt

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  3. Justement, j'ai une autre lettre, provenant de la même collection, adressée à Rodrigues (adresse au dos). Il lui dit "mon vieil" et signe "Fély Rops". Elle est plus tardive en revanche.

    Dans le bulletin du bibliophile (1961, n°3), donnant le texte de plusieurs lettres à Rodrigues, on trouve comme signature : Fély, F.R., Felix, ton vieux Fély, etc. Il est vrai qu'il est moins familier en général, même s'il y a aussi un "mon cher vieux" ou encore "mon vieil" qu'on y retrouve. Toutes ces lettres sont plus tardives, et il semble que ce soit vers 1895, d'après ces lettres que le "cher ami" devient "mon vieil", malgré leurs rapports déjà anciens.

    Votre proposition semble donc plus plausible.

    Benoît

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