Envoi autographe de Jean de Tinan à Octave Uzanne, signé T.
sur L'exemple de Ninon de Lenclos amoureuse (1898)
Coll. B. H.-R. - acquisition octobre 2013.
Le vendredi 25 novembre 1898 paraissait en une de l'Echo de Paris la chronique hebdomadaire d'Octave Uzanne titrée Visions de notre Heure, Choses et Gens qui passent. Des quatre petites chroniques rassemblées ce jour là, celle datée du 19 novembre est consacrée à la disparition du jeune Jean de Tinan mort à seulement 24 ans.
L'acquisition récente d'un exemplaire resté broché de L'exemple de Ninon de Lenclos amoureuse (achevé d'imprimer le 6 mai 1898) portant sur le faux-titre un envoi autographe de l'auteur à Octave Uzanne (voir photographie ci-dessus), incite à la mise en ligne de la courte chronique que ce dernier consacra à la disparition du jeune auteur prometteur. La voici (*).
Nous ne savons rien, à cette heure, des relations qui ont pu exister entre Jean de Tinan et Octave Uzanne.
19 novembre [1898]. Jean de Tinan. -. Silhouette de souvenir.
Pourquoi faut-il que non seulement nous avons à pleurer le subit départ de nos aînés, à saigner de la disparition de nos contemporains, mais encore à incliner nos regrets vers ceux qui poussaient à peine et que nous regardions grandir sur un fond d'espérance ? – Le pauvre Jean de Tinan s'en est allé, tout jeune et palpitant, emportant avec soi, comme eût dit Balzac, toutes ses illusions, s'ensevelissant, comme un roi d'Orient, avec les pierreries, les trésors, la fortune humaine que thésaurise la jeunesse. – Nous ne lirons plus dans le Mercure ses fantaisie capricantes sur les Cirques, Concerts et cabarets, ni ses livres ingénieux, alors qu'un peu hâtifs, où il exprimait en d'originales formules quelques unes de ses visions nouvelles de la génération en marche.
Je revois ce grand garçon, long, mince, au visage pâle, souriant d'une façon constante, mais d'un sourire accentué de mélancolie ; je le revois sous le feutre mou dont il ombrageait son chef avec ses beaux yeux noirs enquêteurs et inquiets devant lesquels, comme de funèbres papillons, devaient tournoyer des feuilles mortes, présage de ses brèves destinées !
Que de beaux titres de livres il nous ravit jalousement ! – Il avait le génie des titres étranges, amusants et non sans logique. Il montrait un dandysme très personnel : il eût créé un smart à part dans la littérature de demain.
Octave Uzanne
(*) Cette chronique d'Octave Uzanne a déjà été mise en ligne par l'auteur du blog Autour de Jean de Tinan le 14 novembre 2011. C'est à ce jour le blog qui regroupe le plus grand nombre d'informations sur Jean de Tinan et son oeuvre.
On sait qu'Uzanne fréquentait le père de Jean de Tinan, Eugène-Jean-Marie-Maurice-Théodose Le Barbier de Tinan (Château-Chinon, 1842-Tours, 1918). En sa compagnie, autour de l’année 1886, Uzanne rend visite au bibliophile Eugène Paillet, où se retrouvent aussi réunis : Henri Beraldi, de Villeneuve, Bauchard et Raoul Léonor l’Homme Dieu du Tranchant, comte de Lignerolles. Uzanne doit certainement le rapporter dans "Nos amis les livres" et il est fort probable qu’il ait pu croiser, à cette époque, le fils du baron de Tinan, le petit Jean. À voir aussi la biographie de Jean de Tinan par J.-P. Goujon (Plon, 1991) : Uzanne y est mentionné cinq fois.
RépondreSupprimerDamien G.
Bonsoir Damien,
RépondreSupprimermerci beaucoup pour ce commentaire intéressant. Je vais essayer de me procurer la biographie par Goujon. J'aurai certainement l'occasion de revenir sur la relation des Tinan / Uzanne.
Bonne soirée,
B.