jeudi 10 octobre 2013

Lettres de Félicien Rops à Octave Uzanne. Lettre XXVII. Présentées par Maurice Kunel dans le Bulletin du Bibliophile n°4 - 1961. Correction de datation. Le Livre Moderne et L'Art et l'Idée.



Bulletin du Bibliophile et du Bibliothécaire, 1961 - n°4.
Lettres de Félicien Rops à Octave Uzanne, annotées par MM. Kunel et Lefebvre.
pp. 331
La date de cette lettre n'est pas [1896] mais [mi-décembre 1891]



Dans le Bulletin du Bibliophile n°4 pour l'année 1961, Monsieur Maurice Kunel présente une sélection de XXVII lettres adressées par Félicien Rops à Octave Uzanne.

Nous nous sommes penché dernièrement sur la dernière lettre reproduite et annotée, la n°XXVII. Il est indiqué que les annotations sont de MM. Kunel et Gustave Lefebvre.
Or il se trouve que la note (1) est fausse et induit une erreur dans la datation de cette lettre. En effet, MM. Kunel et Lefebvre donnent la date de 1896 pour ce courrier évoquant Le Livre Moderne. La note renvoie, on ne sait trop pourquoi, au Livre Moderne (La Nouvelle Bibliopolis) Floury 1897. Or il ne s'agit pas ici de cet ouvrage mais bien du Livre Moderne dont la première livraison paraît en janvier 1890 et la dernière en décembre 1891.
Félicien Rops écrit : « Aussi ai-je été enchanté d'apprendre par ton boniment du Livre Moderne, - très bien fait d'ailleurs - que, après Le Livre Moderne, tu en ferais un autre encore plus moderne. Tu as inventé le journal mobile à combustion rapide. T'en félicite. A toi, mon Vieil, & à ce soir j'espère. Fély. Amitiés du Clan. »
C'est le 10 décembre 1891, en un humoristique « Acte testamentaire du Livre Moderne » qu'Octave Uzanne annonce sur deux pages la fin du Livre Moderne aussitôt ressuscité en L'Art et l'Idée. Uzanne écrit aux lecteurs de sa revue cet habile testament :

« Ce jourd'hui, dixième jour de Décembre Mil huit cent quatre-vingt-onze, LE LIVRE MODERNE, de par la fantaisiste volonté de son créateur, cesse d'être et de paraître, dans sa vingt-quatrième livraison d'âge, après deux années d'honorable, séduisante et féconde vitalité. Désireux d'échapper à la déplorable monotonie des existences trop prolongées, ce recueil emporte moins de regrets qu'il n'en laisse à quelques curieux contemporains. - La vie lui fut aisée, aimable, exempte de charges, car il resta surtout indépendant d'allures, méprisant les amitiés lucratives, insoucieux des succès d'argent, des notoriétés éclatantes et du tam-tam des réclames sonores.
« Heureux de la sympathie fervente du petit nombre de ses délicats fidèles, il montra toujours vis-à-vis d'eux le culte de la vérité et la conscience sereine et altière de ses jugements. Il ne consentit jamais à confondre la religion artistique et littéraire avec l'esprit d'entreprise commerciale, et, s'il a parfois porté des blessures cruelles à de triomphantes vanités, s'il a éclairé certains puits d'ignorance, indiqué des Himalaya de sottise prétentieuse, on ne saurait dire qu'il ait en quelque occasion que ce soit mis en jeu des intérêts personnels ou mesquins. - Nous croyons donc que le LIVRE MODERNE qui les luttes de sa vie chronique ayant droit au respect même de ses ennemis.
« En disparaissant, hospitalier à la mort comme un épicurien, LE FEU LIVRE MODERNE lègue aux sympathies de ceux qui, l'ayant suivi mois à mois, l'ont connu, approfondi est estimé, - en raison même de la loyauté de ses défauts et qualités, - son successeur direct L'ART ET L’IDÉE, dont la nouvelle physionomie sera présentée aux dilettantes de la littérature d'art le 20 janvier de la prochaine année 1892.
« Il croirait, prenant place dans le silence et la nuit du trépas, se livrer in extremis au mauvais goût d'un boniment en signalant à l'attention des lettrés les tendances exquises et l'expression d'absolue originalité de son héritier présomptifs. - Aussi, à défaut de beauté, d'élégance raffinée, d'esprit, de savoir et d'humour, ne veut-il se flatter de laisser au nouveau venu d'autres talents que celui dont il fut animé. Il prétend toutefois le doter de la force ou de l'énergie de tout dire et de la volonté de tout exprimer, sans songer - désormais non plus que naguère - à aiguiller sa boussole vers la banalité de ces succès qui, s'ils ne sont consentis à la mode, se trouvent prostitués à la camaraderie générale ou abaissés au médiocre niveau du plus gros contingent d'abonnés.
« LE LIVRE MODERNE laisse une devise à L'ART ET L’IDÉE : Attirer les élus, ne solliciter personne, laisser passer les gens, ne batailler que pour les croyants !
« Il abandonne une famille, mais celle-ci saura se grouper de nouveau dans l'intimité artistique et littéraire de la coquette et riante maison qui va s'élever. - Les fidèles n'auront fait que changer de chapelle ! Les rites de la future église ne seront que plus variés. Notre Adieu, en résumé, se voit suivi d'un très prochain au Revoir ! »
[Octave Uzanne]


La lettre n°XXVII de Félicien Rops à Octave Uzanne donnée par MM. Kunel et Lefebvre dans le Bulletin du Bibliophile n°4 de 1961 date donc de quelques jours ou tout au plus de quelques semaines après le 10 décembre 1891, avant le début de l'année 1892. Nous la datons donc avec cette précision : [mi-décembre 1891] à la place de [1896] annoncé.



Bertrand Hugonnard-Roche 

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