lundi 25 mars 2013

Octave Uzanne, Edouard Drumont, Les Spartiates et la France Juive (1886).

Edouard Drumont écrit une lettre à Salomon Reinach en date du 14 mai 1908, lettre qui sera publiée dans son livre de souvenirs intitulé Sur le chemin de la vie publié en 1914 (*). Cette lettre vise à faire tomber les affirmations de M. Salomon Reinach selon lesquelles le financement de la France Juive (1886) et la fondation de la Livre Parole, auraient été le fait de l'aide du R. P. Jésuite Du Lac et d'une manière plus générale par les Jésuites français. Drumont répond :

« [...] Tous vos collègues historiens de l'Académie des Inscriptions vous assureront que la meilleure méthode pour débrouiller une période d'histoire, c'est d'interroger les témoins vivants quand il y en a. Quant à moi, pour le point spécial dont je vous parle, je vous indique trois témoins : le Père du Lac, M. Joseph Odelin, Octave Uzanne. [...] Quant à mon excellent ami Octave Uzanne, il a été, avec Raoul Duval, le seul confident de mes intentions de publier la France juive. Expert en matière d'imprimerie, il m'a mis en rapport avec Darantière, imprimeur à Dijon, et il sait que j'ai publié mon livre avec mes seules économies de journaliste. Vous voyez, Monsieur, que votre affirmation ne repose absolument sur rien [...]. »

De cet extrait on retiendra qu'Octave Uzanne, encore « excellent ami » d'Edouard Drumont à la date de 1908, a pris une part importante sinon déterminante dans l'édition de la France Juive en 1886. On retiendra également que le nom de l'imprimerie Darantière apparaît comme un choix entièrement dicté par Octave Uzanne et les bonnes relations qu'il pouvait entretenir avec cette maison qu'il avait fait travailler plusieurs fois pour ses ouvrages.

Ailleurs dans ce volume, à propos des Spartiates, Drumont écrit :

« [...] Mon ami Octave Uzanne, un des fidèles et des assidus des Spartiates, a cette plaquette, mais il m'écrit qu'il est à Saint-Raphaël « en espalier au soleil » et naturellement il n'a pu me l'envoyer. »

S'adressant à son ami Gaston Joliivet, Drumont évoque les dîners des Spartiates :

« [...] Dîner des Spartiates, où nous nous réunissions jadis entre amis, et où pour la première fois j'annonçai que j'allais publier un livre sur les juifs. [...] C'était un dîner de fondation déjà ancienne quand je commençai à en faire partie [...] Le dîner était assez fermé dans un sens, mais très peu exclusif au point de vue des idées politiques ou autres. Des hommes très différents par la situation qu'ils occupaient dans la vie, avec la certitude que leurs propos ne seraient pas colportés partout. [...] Il y avait là l'ambassadeur d'Angleterre, Lord Lytton, poète dans sa jeunesse, et qui avec ses cheveux longs et ses yeux perdus dans le vague, ressemblait plus à un artiste incompris qu'à un membre du corps diplomatique. [...] » Drumont évoque encore le comte Nigra, Raoul Duval, Arsène Houssaye, le peintre Ziem, Dupray, Goncourt, Paul de Saint-Victor. Drumont écrit plus loin : « [...] Au dîner des Spartiates ne figurait aucun Juif et l'atmosphère n'était pas une atmosphère favorable aux idées cosmopolites et faussement humanitaires. Lord Lytton, le prince Galitzine, Nigra, Meredeath étaient des Anglais, des Russes, des Italiers, des Américains ; on était plein de courtoisie pour eux, on les aimait pour leurs qualités, mais on n'éprouvait pas le besoin de fraterniser avec toutes les nations et de boire tous dans le même verre. Chacun avait son verre. On plaisantait les financiers cousus d'or, on racontait à l'occasion des anecdotes sur les Rothschild ou des opérations fantastiques d'usuriers juifs. [...] »

Il est très intéressant de savoir qu'Octave Uzanne se trouvait au milieu de ses gens « admis à l'unanimité », dans ce bouillonnement d'idées à fois progressistes et réactionnaires, mélange savamment dosé de politiques et de littérateurs. Les réunions mensuelles avaient lieu chez Brébant autrement parfois appelés  « Dîners Brébant ». En 1875 les réunions se déplacent  « chez Laurent, des Champs-Elysées. » En 1888, le dîner est définitivement déplacé « Au Lion d'Or ». Nous n'avons encore que peu d'informations concernant l'intégration d'Octave Uzanne aux Spartiates, mais il apparaît d'ores et déjà évident que ce cénacle dut lui être d'un grand secours pour le placement de ses éditions de luxe et de ses abonnements de revue (Le Livre). Nous verrons très bientôt plus en détail cette aventure d'Octave Uzanne au sein des Spartiates.

A lire ou à relire :




Bertrand Hugonnard-Roche

(*) Edouard Drumont. Sur le chemin de la vie (souvenirs). Paris, collection « Les proses », Georges Crès et Cie, 1914 [achevé d'imprimer le 31 mars 1914], pp. 132-133, chapitre intitulé « Encore une légende à détruire » (lettre adressée à M. Salomon Reinach et datée du 14 mai 1908).

Note : Le 24 avril 1886, Darantière (imprimeur dijonnais) qui vient de remettre les clichés du livre à Flammarion, envoie sa facture à Drumont. Finalement Drumont abandonna le règlement de l'affaire aux soins d'Ernest Flammarion : Darantière écrit à Uzanne qu'il est prêt à donner quittance contre un chèque de 6 325 F sur Dijon. Faites si vous voulez un dernier effort pour transiger à 6 000 ; si Darantière refuse envoyez le chèque et finissons-en. Je compte sur vous pour terminer cette affaire d'ici 2 à 3 jours. (in la librairie Flammarion 1875-1914, Ed. IMEC, 1992)

2 commentaires:

  1. Arte a diffusé un reportage-téléfilm, qu'on peut encore voir en Vod (Arte+7), sur Drumont. Dans ce reportage, il est indiqué que c'est Alphonse Daudet qui a avancé l'argent nécessaire à la première publication, et qui a mis Drumont en rapport avec Marpon.

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