Poser un problème, c'est déjà le résoudre à moitié. Effectuer une recherche demande de la persévérance, un peu d'habileté, de hasard, et une certaine dose de chance.
Une recherche en amène souvent une autre. C'est ainsi que je viens de faire le lien entre la famille Uzanne d'Auxerre et la famille de "l'instituteur des idiots", le médecin Edouard Séguin (1812-1880).
Edouard Séguin (né le 20 janvier 1812 à Clamecy dans la Nièvre) était le fils de Jacques-Onésime Séguin et de Marguerite Uzanne. D'après l'acte de mariage de ses parents en date du 29 avril 1811 à Auxerre, il apparaît que le patronyme s'écrit Seguin et non Séguin comme on le lit le plus souvent. Dans cet acte il est également indiqué que Jacques-Onésime Seguin est âgé de 30 ans, qu'il est médecin à Clamecy (fils de François Seguin propriétaire à Coulanges-sur-Yonne près d'Auxerre, et de Marie-Thérèse Guimard, tous deux décédés), et qu'il épouse Marguerite Uzanne âgée de 17 ans domiciliée à Auxerre et fille de Joseph Uzanne (en réalité Maurice Joseph) marchand, et de Marie Agnès Peronnier.
Le couple Maurice Joseph Uzanne (1752-1806) et Marie-Agnès Peronnier (1757-1827) s'était marié aux Chapelles (Savoie) le 3 octobre 1774. Il s'agit du couple fondateur de la lignée auxerroise des Uzanne, dont Octave Uzanne est le descendant direct. Ils eurent 5 enfants : Marie-Antoinette (1779-1855), Antoine (1784-1858) le grand-père d'Octave Uzanne, Joseph Maurice (1787-1860) le grand oncle célibataire et à héritage d'Octave Uzanne, Marie-Antoinette (1791-1857) et enfin Marguerite-Marthe (1793-1871) épouse Seguin et mère du célèbre "instituteur des idiots".
En résumé, Marguerite, la mère d'Edouard Seguin, était la grand-tante d'Octave Uzanne. L'a-t-il jamais connu ? Nous ne savons pas. Elle a vécu à Clamecy où elle est décédée le 25 septembre 1871, Octave Uzanne venait d'avoir 20 ans. Cependant, ce que nous savons, c'est qu'Octave Uzanne était très proche de sa grand-mère maternelle Geneviève-Marguerite Gremeret (branche Chaulmet), elle aussi native de Clamecy dans la Nièvre. Il est donc tout à fait probable que le jeune Octave ait rendu visite dans ses jeunes années à la grand-tante Marguerite, sœur de son grand-père Antoine Uzannaz (Uzanne).
Pourquoi en venir à cette généalogie un peu lointaine ? Parce que le hasard nous a mis en présence de quelques chiffres intéressants concernant le patrimoine de la famille Uzanne au début du XIXe siècle (*). Ainsi nous relevons les chiffres suivants : Marguerite Uzanne apporte en dot 42 000 francs dont 16 000 francs en immeubles lors de son mariage avec Jacques-Onésime Seguin en 1811. Par ailleurs on apprend que Maurice-Joseph (en réalité Joseph-Maurice), son frère (le même grand oncle célibataire qui léguera le domaine de La Villotte près de Villefargeau à la maman d'Octave Uzanne et sans doute d'autres biens), lui lègue à cette occasion la somme de 1 000 francs or.
Que représentent ces sommes en 1811 ? D'après quelques rapides recherches, il faut considérer qu'un ouvrier non qualifié gagne alors environ 1 franc par jour voire un peu moins. Un calcul rapide permet donc de déduire que la dot de Marguerite Uzanne, prise dans son ensemble, est équivalente à environ un peu plus d'un siècle de salaire d'un ouvrier. Une conversion sommaire et nécessairement largement erronée permet tout de même de dire que la dot Uzanne représente environ 1 million d'euros de notre époque (voire un peu plus). Ce n'est pas rien. Il faudrait retrouver les montants des dots des deux autres filles Uzanne (sœurs de Marguerite) qui se sont mariées, la première en 1808 (à Auxerre) et la seconde à une date et dans un lieu encore inconnu de nous.
Ces quelques chiffres devront être mis en comparaison de quelques autres que nous découvrirons bientôt lors de l'étude d'autres contrats de mariages ou inventaires après décès (en cours d'étude) afin de mieux cerner "la fortune des Uzanne". On sait que la branche auxerroise des Uzanne était marchands de père en fils et ce dès la fin du XVIIIe siècle. Il ne s'agissait pas de petits marchands de province comme on pouvait alors en compter de nombreux mais de marchands en gros dans le domaine de la mercerie. Que vendaient-ils ? des boutons, des rubans, des draps, du linge, des habits ? (Antoine Uzannaz dit Uzanne, le grand-père d'Octave et le frère de Marguerite était désigné comme marchand rubanier). Comment ont-ils fait fortune ? Comment sont-ils devenus riches ? Une piste pourrait être la vente en gros aux armées durant les guerres napoléoniennes. C'est une piste que nous devrons explorer. Il faudra par ailleurs nous pencher sur la fortune de la branche maternelle (Chaulmet d'Auxerre également) et qui n'est sans doute pas moins considérable avec une généalogie complète de marchands remontant au moins jusqu'aux premières années du XVIIIe siècle.
Octave Uzanne est arrivé à Paris au début des années 1870 avec un suffisamment d'argent en poche pour se laisser vivre et profiter de la bohème parisienne de son temps. Cependant il ne s'est jamais laissé aller à ne rien faire et à toujours écrit et s'est fait payer pour cela (même si les archives nous manquent également de ce côté). A partir des années 1890-1900, sa carrière de journaliste lui procure un revenu sinon somptuaire du moins confortable. Il semble néanmoins qu'à cette époque il ne vive plus guère sur les deniers hérités et sur la fortune familiale. Nous ne savons encore rien de la succession Uzanne en 1931 si ce n'est que c'est son frère Joseph qui en fut le légataire universel et unique héritier. Nous ne savons encore rien non plus de l'héritage de Joseph Uzanne à son décès en 1937 (on l'a dit pauvre ... ce que nous avons du mal à croire). Il meurt laissant pour unique héritière la fille (Françoise Millon) issue du premier mariage de son épouse Marie Adenot et son fils l'historien de l'architecture Yvan Christ).
Il y a encore tellement de choses à découvrir pour mieux comprendre ! Tout viendra en son temps.
Nous rappelons aux lecteurs que la généalogie des Uzanne (la plus complète à ce jour) est disponible en ligne ICI.
Bertrand Hugonnard-Roche
(*) Un pionnier de la psychiatrie de l'enfant : Edouard Seguin (1812-1880), par Yves Pélicier, Guy Thuillier, Association pour l'histoire de la Sécurité Sociale, 1996. Page 390.
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