mardi 23 décembre 2014

Octave Uzanne et les Sonnets du Docteur Camuset (1884).



Culispice de Félicien Rops
pour l'édition de 1884 des Sonnets du Docteur
Vous trouverez ci-dessous deux textes publiés à neuf ans d'intervalle au sujet des Sonnets du Docteur. Le premier est un compte rendu fait par Octave Uzanne lui-même et publié dans la livraison de janvier 1885 de la revue Le Livre qu'il dirige. Le deuxième est une notice de catalogue rédigée encore une fois par Uzanne pour la vente de ses livres en mars 1894. On apprend qu'Octave Uzanne a pris part à l'édition de ce petit ouvrage libertin illustré par Clairin et Rops. On déduit que c'est très certainement Uzanne qui a facilité l'impression de ce petit volume chez l'imprimeur dijonnais Darantière. C'est encore Uzanne qui permettra à Drumont de faire imprimer sa France juive chez le même Darantière à Dijon en 1886, à peine deux ans plus tard.
      Nous ne savons rien des relations d'Octave Uzanne et du Docteur Camuset (*). Le fait qu'il soit oculiste cependant, alors qu'Octave Uzanne souffre depuis son plus jeune âge de troubles de la vue (notamment un œil droit presque perdu depuis ses années d'école primaire à Auxerre et un oeil gauche souffrant), nous laisse croire qu'il a sans doute eu recours à ses services en tant que praticien.
      Octave Uzanne n'a pas jugé utile, semble-t-il, de faire un compte rendu de la réédition de 1888 imprimée par le même Darantière et illustrée de 2 nouvelles héliogravures de Félicien Rops.


Bertrand Hugonnard-Roche


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Les Sonnets du Docteur. A Paris, chez les principaux libraires. 1 vol. Prix : 5 francs.

      Le docteur... le nommerai-je ?... est un honorable oculiste dijonnais, natif du Vendômois, qui a conservé la pleine verdeur de son pays d'origine. - Poète rabelaisien de la bonne école, il aime le large rire gaulois et courtise la muse gaillarde et grasselette de Grécourt et de Panard. - Ses sonnets sont exquis et pleins d'originalité ; c'est de la médecine lyrique qui pourrait, dans une note spirituelle et délicate, faire une redoutable concurrence au Livre des Convalescents du pitre Cadet. Le docteur, en outre, est un parnassien très moderne, qui se plaît à ouvrer son vers et à ciseler sa rime ; une des pièce de son recueil est déjà célèbre, c'est le Homard à la Coppée, pastiche étonnant du jeune académicien, qu'on attribue à tort à Monselet, lequel a le tort de ne pas protester.
      Dix autres pièces sont aussi remarquables : le Cataplasme, Ecchymoses, le Massage, Dermatologie, Congestion cérébrale, Bonbon laxatif, Médecine légale, Transformisme, les Gaules, la Langue fumée, sont dignes des suffrages de tous les lettrés délicats.
      Cet opuscule d'une cinquantaine de pages est spécialement destiné aux bibliophiles ; le tirage total atteint à peine 500 exemplaires, et l'impression, faite par maître Vascosan Darantière, de Dijon, est hors ligne et fait grand honneur à ce trop modeste émule des Sheuring et des Hérissey. Le texte, d'une merveilleuse pureté, bien mis en page et interligné, est entouré d'un encadrement rouge très sobre et d'un ton harmonieux. Ce joli petit livre s'ouvre par un frontispice de Georges Clairin et se termine par un curieux culispice à l'eau-forte de Félicien Rops, le chemisier favori des déesses de la mythologie moderne et le gantier des amours, le seul qui sache attacher une jarretière sur les mailles rosées d'un bas follement capiteux ; un grand artiste, en un mot, qui est dans l'art le Villon des petites villotières et le Rembrandt des sabbats charnels.
      Les Sonnets du Docteur vivront spirituellement et typographiquement, et les bibliophiles du XXe siècle fouilleront les archives de l'Académie de médecine pour découvrir le nom de ce fantastique Hippocrate qui mis en exergue au cou de sa muse, au nez voluptueusement retroussé : Camuse est.


U. [Octave Uzanne]
Notice publiée dans Le Livre,
Livraison du 10 janvier 1885

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67. CAMUSET (Dr. G.). Les Sonnets du Docteur. Paris, chez la plupart des libraires (imprimé par Darantière, à Dijon), 1884, in-8, front. à l'eau-forte de Clairin. Texte encadré de fil r., cart. cuir japonais, non rogn., couv.

Exemplaire sur japon, contenant trois spirituelles lettres autographes du docteur Georges Camuzet (sic) écrites avant sa mort au sujet de ce livre, et un frontispice en couleur de F. Rops avec la signature autographe de l'artiste.
On y a ajouté, sur les marges, une série de jolis DESSINS ORIGINAUX coloriés par Emile Mas et qui font un Exemplaire unique.
Le docteur Camuzet, médecin oculiste à Dijon, fut un joyeux vivant dont l'esprit devint célèbre dans les cénacles parisiens au lendemain de la guerre. Ses poésies couraient les ateliers, et l'une d'elles, qu'on attribua longtemps à Monselet, est demeurée classique : c'est le Petit Homard à la Coppée. - Les Sonnets du Docteur sont une des curiosités bibliographiques à l'édition desquelles le Bibliophile [Octave Uzanne] prit part. - Rops devait l'illustrer en entier, mais il ne parvint à fournir qu'un culispice. Les jolies lettres du docteur ont trait à l'impression des sonnets et à la paresse de Rops, qui mériterait cependant d'être salué par le cliché : le plus fécond de nos aquafortistes.

Notice rédigée par Octave Uzanne
pour la vente des Livres contemporains d'un écrivain bibliophile
[vente Octave Uzanne des 2 et 3 mars 1894]


(*) Georges Camuset (1840-1885) est un médecin ophtalmologiste plus connu pour ses spirituels Sonnets publiés pour la première fois en 1884. Sa biographie nous est révélée par les travaux du Docteur A. Brunerie (Deux ophtalmologistes dijonnais, Cahiers lyonnais d’histoire de la médecine,‎ 1960, Lyon, n° 1). Camuset, nait en 1840, à Lons-le-Saunier, d’une famille de robins et décèdera le 12 mars 1885 à Paris. Après des études très éclectiques, il s'inscrit en médecine à Paris, s’oriente un moment vers le laboratoire et présente une communication sur la vaseline à la Société de Médecine. Il pratique également la botanique et joue de l’ophicléide. Il est également un des plus joyeux vivants des cénacles parisiens. Il voyage à travers l'Europe et rencontre Gustave Doré à Londres mais se destine finalement à l'ophtalmologie plutôt qu'aux lettres et s'établit médecin oculiste à Dijon. Il y compose ses fameux sonnets dont l'édition originale parait anonymement en 1884 (Imp. Darantière à Dijon), peu avant son décès, et sont réédités en 1888, 1926 puis avant 1939 par les laboratoires Camuset (parenté ? homonymie ?). Fantaisie légère, les Sonnets sont un grand classique spirituel et gaillard de la littérature médicale. Les Sonnets ne sont pas le seul ouvrage du Docteur Camuset, il écrit aussi un Manuel d'Ophtalmologie (publié chez Masson en 1877) et un Mémoire sur la Vaseline (Société de médecine, 1877), produit qu'il est le premier à utiliser en France3. Il s'essaye même à quelques chansons comme celle d'une lettre qu'il écrit « A mon ami Lamarche » (Paroles de Bibi sur une musique de Gounod). (source Wikipédia).

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